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Face à la société haïtienne, Sherlee Skai se met à nu !

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 La chanteuse Sherlee Skai est surtout connue pour ses deux chansons, « Jwe m » et « Filem an Kreyòl ». Si « Jwe m » porte un discours libre sur la sexualité féminine, « File m an kreyòl » encense la femme créole et sa langue. Avec une voix fiévreuse et unique, Sherlee Skai chante dans son album « Toutouni » d’autres thèmes aussi provocants qu’intéressants. Dans cette entrevue, l’artiste se met à nu devant son public.

Comment se mettre nue sans frôler la perversion ? Comment inviter l’autre à se perdre dans son intimité en restant mystérieux ? C’est cette action d’éclat que pose Sherlee Skai en réalisant son premier album « Toutouni ». Toutouni comme un secret divulgué sur les toits, toutouni comme une femme créole en mal de tendresse. Chanteuse, compositrice et interprète, sa voix est une hymne qui colporte son innocence et désarme  tout auditoire. De l’église à l’école des sœurs de la Charité de Saint-Louis de Bourdon (là où elle fit ses études secondaires), Sherlee Skai a peaufiné sa musique au rythme de ses multiples prestations et projets musicaux. Sa participation à plusieurs émissions télévisées et à des concours de chants populaires, dévoilent les premières lueurs de son talent au public haïtien.

Très tôt, la présence de Sherlee Skai dans les grands évènements culturels de Port-au-Prince laisse entrevoir sa place dans la musique haïtienne. Que ce soit Maryaj Lenglensou (premier opéra classique haïtien), Starmania (première version haïtienne de la comédie musicale), ou l’édition 2006 de Musique en  Folie, toutes ces créations esthétiques portent l’empreinte significative de l’artiste.

Emigrée aux Etats-Unis depuis 2007, la distance qui la sépare de son pays inspire son travail. Ainsi, dans « Ou manke m », sixième titre de son album, Sherlee raconte le vide qui l’habite quand la nostalgie de sa patrie envahit son âme. « « Ou Manke m » traduit la réalité que je vivais en Californie en tant qu’immigrante haïtienne. Après plusieurs années passées aux Etats-Unis, Haïti continue encore à me manquer. », confie la chanteuse sous un ton d’aveu.

Sherlee Skai a su profiter de sa terre d’accueil pour raffiner sa musique, en suivant des cours de composition musicale à Los Angeles City College. Elle n’est pas non plus restée indifférente à cette nouvelle culture locale qui imprègne plusieurs  aspect de sa musique. Son ouverture à culture musicale américaine lui a permis de bénéficier d’opportunité intéressante. Ainsi, elle a participé à des évènements d’envergure tels que Harlem Week , et The New York Marathon . Cependant, Sherlee comprend que le marché  qui reste le plus accessible à son art est la communauté haïtienne vivant aux Etats-Unis. Pwezi ak Mizik anba Tonèl organisé par « Haiti Cultural Exchange », Ayiti deploge sont quelques des événements organisés par la diaspora qui ont accueilli Sherlee Skai sur leur podium.

Entre une parole libre et un art engagé, Sherlee Skai se veut être un croisement qui donne libre cours à ses mots mais qui embrasse aussi certaines causes sociales. C’est pourquoi dans son opus « File m an kreyòl » elle a exprimé sa préférence pour la langue Kreyòl qui selon elle offre tellement plus de possibilités au peuple haïtien de raconter le monde.

Si certains voient en Sherlee Skai une artiste qui repousse les limites du tabou et joue un peu la carte de la provocation c’est surtout à cause du titre « Jwe m », le sixième titre de Toutouni. Ecrite par la chanteuse elle-me, comme d’ailleurs la plupart de ses morceaux, cette chanson est une invitation à couvrir l’artiste de tendresse, tel un instrument de musique qu’on fait jouer les notes les plus aiguës. « Je suis féministe. Je crois que la sexualité de la femme est aussi importante que celle de l’homme. Dans la chanson « Jwe m » j’exprime comment je le veux exactement. Quelle quantité de sel et d’épices que je veux dans ma nourriture », ponctue Sherlee Skai avec un sourire complice.

Dès la première écoute de son album, on ressent le métissage des rythmes que l’artiste propose. «  Mon Album est un mélange de Jazz, de soul, de R&B et de musique traditionnelle haïtienne », précise-t-elle. Si la liberté qu’elle laisse à sa voix limpide rappelle celle d’Emeline Michel, c’est parce ce qu’elle s’inspire de la diva nationale.  «  Emeline Michel certainement m’influence comme d’ailleurs toute ma génération. D’autres artistes comme Beethova Obas, Tracy Chapman, Lauryn Hill m’ont beaucoup inspiré aussi ». En dépit de ce long chemin parcouru, Sherlee Skai croit qu’il lui reste encore des sommets à gravir.

Patrick Erwin Michel a étudié les Sciences Juridiques à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques (FDSE) de l’Université d’Etat d’Haïti. Il finalise actuellement son mémoire de sortie sur la pauvreté et les Droits humains. Il a également étudié l’art dramatique à l’Ecole Nationale des Arts (ENARTS), ainsi que le journalisme à l’ISNAC. Son champ d’intérêt inclue le Droit, la littérature, la sociologie et les arts.

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