POLITIQUE

300 employés fictifs révoqués, procès, « kalewès »… le sénat dans la tourmente

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450 employés « fictifs » ont été démasqués. 300 d’entre eux ne reçoivent plus leur chèque

À l’arrivée de Youri Latortue à sa présidence en 2017, le Grand Corps comptait seulement 800 employés. Début 2020, le Sénat revendiquait un personnel pléthorique de 1 800 têtes.

Ces employés sont pour la plupart sans compétence. La majeure partie d’entre eux sont des proches — militants, amis, membre de la famille — de sénateurs.

L’année dernière, le ministère des Finances a cessé les virements bancaires, pour effectuer les paiements par chèque. Cette initiative est entreprise afin de révoquer les individus confortablement installés chez eux à l’étranger ou en Haïti, mais qui touchent mensuellement un salaire du Sénat de la République pour un travail inexistant.

D’octobre 2020 à février dernier, 450 employés « fictifs » ont été démasqués. 300 d’entre eux ne reçoivent plus leur chèque. Ces informations proviennent d’une source au sein de l’actuelle administration du Grand Corps.

Procès en cours

250 autres individus nommés sous la présidence de Carl Murat Cantave en 2019 ont été écartés en 2020, faute de budget. Ces actions ramènent le personnel du Sénat à environ 1 300 employés, puisque de nouvelles nominations ont accompagné les révocations.

La plupart des employés fraichement limogés font appel à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratifs, pour exiger paiement et réintégration.

En clair, la loi régissant la fonction publique ne reconnaît que les « fautes administratives graves et l’abandon de poste » comme motifs pouvant conduire à une révocation dans la fonction publique.

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Jecozias Pierre fait partie des employés ayant traduit l’administration du Sénat par devant la CSCCA. Il a été nommé comme attaché de presse en août 2019 à la fin du mandat de Carl Murat Cantave. L’administration suivante dirigée par Pierre François Sildor aurait chassé en tout 80 des partisans de Cantave nommés au Sénat de la République.

Cette décision serait une vengeance à l’égard de Cantave. Jecozias Pierre dit avoir appris qu’il existe une rivalité entre les deux hommes en se plaignant de sa révocation à son protecteur, l’ancien président du bureau, Carl Murat Cantave.

L’ancien président Pierre François Sildor n’a pas souhaité réagir sur le dossier. « Tout ce qui concerne l’administration du Sénat sous ma présidence doit être abordé avec l’ancien questeur Jean Marie Ralph Fethiere », a-t-il déclaré.

Les révocations successives en cours ne plaisent pas à certains sénateurs qui réagissent en menaçant de mort certains membres de l’administration, dévoile la source demandant l’anonymat pour honorer une promesse faite de régler cette affaire hors des regards de la presse.

Staff en mode «kalewès»

Le cas de Marie-Paule Genius (nom d’emprunt) illustre la réalité d’un Sénat qui ne sait que faire de ses employés dans un contexte de diminution des budgets.

Cette mère de famille cumule déjà une quinzaine de mois depuis sa nomination comme infirmière au Grand Corps. Elle n’a jamais obtenu son salaire.

Lors de sa dernière requête auprès du comptable de l’institution, Genius était étonnée d’apprendre qu’il n’y avait pas assez d’argent dans le budget pour payer tous les employés du Grand Corps. Par conséquent, elle a tout bonnement cessé de se rendre au local du Sénat.

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Pour l’année fiscale 2020-2021, le budget du Grand Corps est de 1 754 074 789 gourdes contre 2 230 859 901 pour l’exercice fiscal 2019-2020. Pour rapport à l’exercice précédent, celui de 2019-2020 a été amputé de 600 millions de gourdes.

Dès l’élection du nouveau bureau au mois de janvier 2021, l’administration du Sénat avait averti le président Joseph Lambert qu’elle n’est en mesure d’effectuer aucune nouvelle embauche, rapporte notre source.

Déjà, la majeure partie du personnel ne fait rien. Pour ne pas encombrer l’espace, l’institution demande aux employés de se présenter uniquement deux semaines par mois, depuis le départ des vingt sénateurs, début 2020.

Poète dans l'âme, journaliste par amour et travailleur social par besoin, Samuel Celiné s'intéresse aux enquêtes journalistiques.

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