En Haïti, la plupart des hommes rechignent à se faire circoncire par peur d’une réduction de la taille de leur pénis. Néanmoins, cette chirurgie mineure augmente la satisfaction sexuelle et prévient de nombreuses infections.
«La circoncision est un acte chirurgical qui consiste à ôter le prépuce, c’est-à-dire le repli de peau qui recouvre l’extrémité du pénis, laissant le gland plus ou moins à l’air libre», dit le médecin Whatson Exantus, urologue depuis une dizaine d’années. La circoncision peut être partielle ou totale car le patient peut décider d’enlever tout son prépuce ou juste une partie. «Cet acte n’a rien à voir avec la taille du pénis», dit le médecin.
Cette pratique existe depuis l’antiquité. D’après les prescrits bibliques, tout mâle devrait être circoncis le huitième jour après sa naissance. Selon le Dr Exantus, cette pratique peut être liée à la culture d’un peuple, à la tradition familiale. elle est aussi réalisée pour des motifs religieux, hygiénique ou simplement pour obtenir une bonne performance sexuelle.
Eliminer le prépuce : une opération simple
Nous suivons Juno, 38 ans, dans la salle d’opération d’une polyclinique au Centre-ville de Port-au-Prince. Il accepte que nous assistons à sa circoncision.
Marié depuis tantôt six ans, Juno se dit inconfortable dans ses rapports sexuels avec sa femme. «Après le sexe, il arrive souvent que j’aie eu de petites inflammations», relate-t-il. Précautionneux, il a averti à sa femme qu’après l’opération ils feront chambre à part pour éviter une érection post opératoire. À 38 ans, Juno n’a douté à aucun moment de son choix de se faire circoncir. Confiant, l’air souriant, il rentre dans la salle d’opération de la polyclinique Christina à Clercine.
La salle d’opération, fraîche est bien aérée. On y retrouve le bureau du médecin et les murs sont couverts d’affiches représentant l’anatomie des parties génitales mâle et femelle. Derrière une baie vitrée, est installé le lit médicalisé et un petit bureau sur lequel se trouve tout le matériel du médecin pour procéder à l’opération.
Juno s’étend sur le lit et se prépare être anesthésié. D’un air calme, le médecin enfonce l’aiguille d’une seringue dans la jointure du gland et injecte le liquide anesthésiante dans la verge. Légèrement surpris par ce geste, Juno se détend au fur et à mesure pendant qu’il reçoit plusieurs autres injections autour de son gland. Il reste conscient car l’anesthésie est locale.
Bien disposé, le chirurgien Exantus est très motivé. Sans hésiter, il tire le prépuce avec des pinces, puis le coupe avec son bistouri. Le sang jaillit. Quelques manoeuvres de plus et Juno sera « circoncis ».
Avantages de la circoncision
Le frein du pénis est aussi enlevé. Ce fil, situé au-dessous du gland, est une fine membrane qui le relie avec le prépuce. «Si cette membrane n’a pas été déchiré dans les jeunes âges (couramment appelé « chire fil la »), il se peut qu’il pose des difficultés lors des rapports sexuels. Il arrive souvent que certains hommes saignent après déchirement causé par le frottement pendant le sexe», explique le médecin.
En toute quiétude, Le patient s’exprime clairement et participe à la conversation pendant l’opération. Entre temps, l’on assiste à la plus longue partie du travail.
Muni d’un aiguille à la forme d’un arc, l’urologue Exantus pratique une suture avec des fils dans la peau du pénis d’avec la muqueuse du gland. Tout de suite après, on procède au lavement du pénis avec de la betadine. En dernier ressort, une pommade grasse est utilisée pour faciliter la cicatrisation bien avant le pansement qui protège le gland et les parties dûment cousues.
«Chez les adultes, les érections nocturnes spontanées constituent l’une des causes majeures de douleurs en raison de la tension exercée sur les points de suture», affirme le médecin ajoutant que des pilules ont été prescrits aux patients pour apaiser de potentielles érections. Selon le médecin certains patients préfèrent le risque de la douleur qui vient avec l’érection que de prendre le médicament qui empêche leur érection de manière ponctuelle. Ces patients ont peur que les effets restent plus longtemps que prévus, donc ne prennent aucuns risques.
Juno affirme d’être bien dans sa peau après l’opération. Notons que la reprise des relations sexuelles interviendra après la cicatrisation complète qui varie selon le patient.
Les bienfaits de la circoncision
L’opération dure en moyenne 45 minutes et peut être guéri après 22 jours sans risque de complication. «Néanmoins, il existe un très faible risque d’infection et de fièvre qui n’arrive que rarement», précise l’urologue exantus qui atteste aussi que seulement 2% des hommes en Haïti se font circoncire.
Après l’opération, l’anatomie de la verge change. L’enlèvement du prépuce réduit la l’hypersensibilité du gland qui peut favoriser l’éjaculation précoce. Selon l’urologue Exantus, ce phénomène s’appelle: effet de kératinisation de la muqueuse du gland. La kératinisation est une substance fibreuse et résistante permettant à la peau de s’épaissir, d’être durci et de se désensibiliser. Exposé à l’air libre, la zone érogène du gland qui, très sensible, subira cet effet et disparaîtra au fur et à mesure. «Le pénis devient plus résistant, moins sensible et favorise l’endurance durant l’acte de frottement», croît l’urologue.
La circoncision enlève complètement les rique de phimosis. Cette condition se présente lorsque le prépuce empêche le décalottage du gland. «Les conséquences d’un phimosis sont une augmentation du risque d’infection et un inconfort lors des relations sexuelles qui peut engendrer des blessures», renchérit le médecin. Des études montrent que la circoncision diminue le risque de contracter des maladies sexuellement transmissible (MST). Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la circoncision réduit le risque d’acquisition du VIH d’environ 60 %.
D’autres études présentent des avis contraires
Des études prouvent que la circoncision a des conséquences indésirables sur la sexualité. Elles soutiennent l’idée que la circoncision enlève une partie des tissus sexuels du pénis qui lui enlève sa sensibilité. Le plaidoyer qui se fait dans ces études se résume en trois grands points: la perte d’une zone érogène, la désensibilisation du gland et la perte du mécanisme de déroulement-glissement du prépuce. Certains pays parlent même d’interdire la circoncision à la naissance.
Emmanuel Moïse Yves
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