Le prince rencontra enfin sa princesse qu’il cherchait depuis si longtemps. Ils tombèrent amoureux, vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants.
Je poussai un soupir discret, signe de mon exaspération croissante en écoutant cette mère qui lisait haut et fort à sa fille. En entendant la fin de l’histoire, elle battit des mains tout en répétant « une autre… encore une autre maman, je veux une autre histoire d’amour ». La mère sourit et chercha un autre livre dans son sac pour commencer une nouvelle épopée de prince charmant.
Oui, l’amour, ça existe dans la vraie vie… la seule chose qu’ils omettent dans ce genre d’histoire, c’est d’expliquer que l’amour n’a pas que des hauts, que les mauvais moments existent aussi et ont leur raison d’être et enfin qu’il y a aussi différents types d’amour.
Je sais exactement à quel moment, j’ai eu un coup de cœur pour chaque homme que j’ai pris la chance de fréquenter dans ma vie ou que la peur m’ait convaincu d’y renoncer. J’aime appeler ce picotement que je ressens face à cet être spécial des « papillons dans le ventre ». Je n’ai pas eu beaucoup de phase « papillons »; en fait, si je puis être honnête, je peux les compter sur les doigts d’une main mais je reste infiniment reconnaissante de ce que ces petites bêtes m’auront appris.
Cela a toujours bien commencé d’ailleurs. Pourtant ces relations n’ont pas su tenir la route. J’ai aussi connu cette spirale de la descente aux enfers après un cœur brisé, cette totale humiliation pour s’être trop affichée. La société ne pardonne pas quand la fin d’une histoire arrive et cherche sans relâche un coupable. Elle oublie que certaines ruptures suivent le cours de la vie et ne nécessitent l’aide d’aucun des partenaires pour se faire. Peut-être que l’explication réside aussi dans le fait que le macabre, le sordide, le tordu est attirant.
J’avais dû faire des faux pas aussi comme partenaire et commettre des impairs, rater certains signes comme victime et continuer la tête baissée. J’avais analysé chaque histoire après l’échec. J’ai plus été victime que bourreau et quelque part j’avoue que j’aurais préféré que les rôles soient inversés. J’ai ainsi retenu qu’il fallait juste apprendre à vivre pleinement de chaque instant et à quitter la scène quand l’acte ne seyait plus au personnage…sans forcer, sans attendre…. J’ai compris qu’il fallait me défaire de ces bagages émotionnels desquels les mauvaises personnes m’avaient affublé sans que je m’en rende compte. Oui, je ne les avais pas vus m’user psychologiquement encore et encore mais je savais mieux que ça maintenant. Ces histoires auront servi finalement à mieux me connaitre et à m’apprécier pour qui j’étais : une jeune femme qui croyait en des jours meilleurs… et qui les croyait devant elle à coup sûr.
Perdue dans mes pensées, dans cet aéroport bondé comme à l’ordinaire, la voix monotone dans le haut-parleur me rappela au présent m’extirpant ainsi de mon univers secret. Je regardai autour de moi un peu désemparée et au fur et à mesure que les résolutions m’ayant poussé à me retrouver dans cet environnement me revenaient en mémoire, le calme s’emparait de moi offrant une sérénité à mon être tout entier.
« Voyage d’affaire ou voyage d’agrément » me demanda une vieille dame en m’examinant longuement.
« Ni l’un ni l’autre, c’est un voyage de découverte »
Elle parut décontenancée par mes mots un instant puis secoua la tête comme si elle avait finalement compris le message crypté. Elle me sourit et me souhaita bonne chance tandis que je me levais de la chaise pour aller en ligne tout en traînant mon « carry-on ».
Oui, mon voyage ne concernait ni le plaisir ni les affaires. C’était un projet que je commençais… un voyage vers le moi intérieur… un voyage vers la vérité. J’avais compris qu’avant d’avoir mes prochains «papillons», je me devais de recalibrer mais je voulais surtout que mes prochains papillons dans le ventre se fassent avec ma propre personne. Je voulais retomber amoureuse de moi.
Je devais me reconnecter avec moi-même, me séduire avant de pouvoir séduire quelqu’un d’autre et même pouvoir apprécier une quelconque séduction. Je devais m’aimer avant d’attendre que l’on m’aime. Alors pour un début, j’avais décidé faire un voyage avec moi-même pour une longue introspection qui j’espérais m’amènerait vers la paix intérieure et l’acceptation de tout ce qui était à venir.
Et qui sait, peut-être bientôt, ce sera moi qui écrira un livre qu’une jeune femme quelque part lira, à voix basse de préférence :
« La princesse se rencontra enfin au bout de ses épreuves. Elle comprit assez vite que s’aimer était la chose la plus importante en ce bas monde car l’amour qu’elle dédierait aux autres serait le reflet de son amour-propre. Lorsqu’elle comprit cela, elle décida de sourire à la vie, vécut et fut enfin heureuse ».
Et ce serait comme dans les contes de fées…
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