Depuis le 21 février 2022, l’hôpital de l’université d’État d’Haïti est en grève. Ce sont les membres du syndicat de l’hôpital qui ont lancé ce mouvement, de concert avec la fédération nationale haïtienne des travailleurs de santé. Ils protestent contre les difficultés qu’ils rencontrent au jour le jour, pour faire fonctionner cet hôpital qui est en manque de tout.
Mais les employés se plaignent aussi d’être traités en parents pauvres par l’État. Selon Maria Louise Alda Bien-Aimé, secrétaire générale du syndicat de l’institution, des négociations ont été initiées avec le gouvernement. Leurs nombreuses revendications sont jusque-là tombées dans des oreilles de sourds, selon elle. « Nous exigeons 60 000 gourdes comme salaire de base, dit-elle. Il y a aussi la carte de débit qui n’est pas alimentée depuis dix-neuf mois. Tant que nos exigences ne seront pas satisfaites, la grève perdurera. »
L’hôpital général fonctionnait déjà dans une situation lamentable, indigne du plus grand hôpital public du pays. Saleté, odeurs nauséabondes, matériels inexistants, absence d’électricité. Cette grève, qui n’est pas la première, laisse des patients dans une situation encore plus compliquée.
Il n’y a plus personne aux urgences, car les médecins ont renvoyé les malades qui y étaient. Mais pour d’autres patients, se déplacer est impossible. Ils restent dans les locaux de l’hôpital, sans assistance, sinon celle de quelques missionnaires chrétiens qui passent parfois pour s’occuper d’eux.
Maria Louise Alda Bien-Aimé en est consciente et se dit désolée. « Nous nous excusons auprès de la population, dit-elle. Il y a beaucoup de personnes qui n’ont pas les moyens d’aller ailleurs. Nous avons aussi trois prisonniers parmi les patients, et personne ne peut s’occuper d’eux. »
Joseph Nicolas, 64 ans, est l’un de ces prisonniers. Il est au pénitencier depuis 2011. Par erreur, assure-t-il. Mais, il est constamment malade et depuis janvier 2021 il se trouve à l’hôpital. « Ma femme et mes petits-fils ne savent rien de moi, dit-il. Je suis abandonné ici. Je ne reçois aucun soin, et même pour la nourriture, c’est un autre malade qui m’apportait un peu de ce qu’il avait pu prélever de son propre repas. »
Les draps sont sales et remplis de punaises, à en croire des déclarations d’autres malades. Les toits sont troués et laissent passer l’eau de pluie. Pourtant, depuis 2010 un nouveau bâtiment est en train d’être construit pour héberger l’hôpital. Douze ans après, les patients de l’hôpital ne sont toujours pas traités avec dignité, par manque de moyens, de matériels et de personnels.
Image de couverture : Une dame est abandonnée par sa famille à l’hôpital. Seule sur son lit de fortune, elle gère tout. Carvens Adelson/AyiboPost
Photos : Carvens Adelson/AyiboPost
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