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L’art de la jonglerie n’est pas ce que vous croyez !

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La jonglerie est, pour la plupart des pratiquants, un loisir, souvent une passion. Mòskòy, âgé de 25 ans, est un amoureux de ce métier qui requiert beaucoup de dextérité

Mòskòy, de son vrai nom Xavier Badio, a commencé le jonglage à l’âge de 16 ans. Il a appris cet art de la scène vieux de quatre mille ans avec des Canadiens à la Maison Arc-en-ciel en août 2010. « A ce moment, j’ai découvert que j’ai le don, le talent et la passion pour jongler », explique le jeune homme qui habite à Delmas.

En riant, Mòskòy raconte qu’il faisait souvent tomber les balles lors de ses premières expériences. « C’était ennuyant, j’ai débuté avec trois balles. Quand je les ai envoyées dans l’air, elles sont tombées par terre. J’étais complètement stressé », relate-t-il, en admettant que ses exploits d’aujourd’hui lui ont coûté d’innombrables heures d’entraînement.

Mòskòy visite Ayibopost. Photo : Snayder Pierre Louis / Ayibopost

Dans quelques mois, Mòskòy aura presque dix années dans la pratique du métier. Selon lui, le jonglage exige beaucoup d’investissement personnel. Dans le milieu, cette discipline fait partie des plus difficiles à maîtriser. « Ce métier demande beaucoup de patience et d’amour. Sinon, je serais découragé lors de mes premières expériences. Grâce aux entraînements au jour le jour, et surtout [l’accompagnement des] entraîneurs de la Maison Arc-en-ciel, j’ai réussi. »

Jongler avec des objets insolites

Les balles demeurent l’un des outils les plus utilisés par les jongleurs. « Mais, j’utilise plusieurs instruments, précise Mòskòy : le rola bola, les massues (…). Et, d’autres objets insolites : bouteilles cristal, chapeaux, œufs crus  … » Et d’ajouter, « Quand je joue avec les œufs, les gens ont peur que cet instrument [fragile] ne se brise pas. J’aime beaucoup jongler avec le chapeau, car tout le monde [s’émerveille de la façon dont] j’arrive à faire passer cet instrument du bas de la mâchoire en haut », explique le jongleur.

Les massues, selon Mòskòy, sont, avec les balles, l’emblème du jongleur. En 1885, Dewitt Cook était le premier à utiliser les Joris, massues de musculation indiennes, comme instrument de jonglerie.

Mòskòy visite Ayibopost. Photo : Snayder Pierre Louis / Ayibopost

Comment jongler ?

Jongler n’est pas facile, prévient Mòskòy. La pratique nécessite coordination, agilité, concentration, réflexion et réflexes. « Sinon, tout le monde le ferait. C’est une activité qui n’existe pas dans la nature. »

Pour se professionnaliser, il ne suffit pas de réussir mais de maîtriser. De ce fait, ce n’est pas parce qu’on a réussi à passer deux tours avec trois balles qu’il faut tenter de se lancer avec quatre balles. Il faut d’abord maîtriser la figure de base puis ses variantes les plus simples et ainsi de suite.

La façon la plus naturelle pour débuter est avec une balle. « Vous prenez une balle. Le lancer se fera par le bas. Et, il faut donner une trajectoire en forme de huit qui devrait passer à 30/40 cm au-dessus des épaules. Les mains restent basses, à hauteur de la taille. Elles ne dépassent pas la poitrine au moment du lancer. Les balles circulent parallèlement au corps », explique-t-il, tout en ajoutant qu’au fur et à mesure, le ou la débutant (e) va progresser.

Comment prépare-t-on un numéro ?

Dans un premier temps, Mòskòy définit le public cible puis le contexte dans lequel le numéro sera exécuté (galas, festivals, dans la rue, écoles, etc.). En fonction de ce contexte, il décide de la durée adéquate. Ensuite, il écrit ce qu’il veut faire en déterminant les objets avec lesquels il va préparer le numéro. Puis, il invente un personnage, lui construit « une vie » et « je m’accorde quelques semaines de travail pour l’explorer, l’inventer. Je cherche un élément déclencheur, je travaille mes émotions, mes gestes. »

L’artiste adore mettre en scène des personnages qui bougent. « Je joue sur la musique, j’aime chorégraphier mes mouvements. Mettre de la poésie, du rire, dans chaque geste et dans chaque dire. »

Et finalement, Mòskòy teste son spectacle devant un maximum de personnes afin d’entendre leurs remarques et faire évoluer le personnage. « Je peux également me faire aider par un metteur en scène, mais cela reste un choix personnel. »

Un amant de la scène

Pratiquer son art sur scène est pour Mòskòy un pur plaisir. Il a joué dans plusieurs activités en Haïti. « J’ai participé à de grands événements dans le pays. On m’invite toujours dans les activités, surtout celles des enfants », affirme-t-il.

Le succès se remarque dans l’admiration des spectateurs. « Si un jongleur joue sur une scène ou dans les rues, il doit capter l’attention du public. C’est beau lorsqu’une personne vient me demander si je suis un magicien », déclare-t-il en riant.

Jongler est aussi un sport complet

Selon Mòskòy, l’exercice d’adresse qui consiste dans son sens le plus strict à lancer, rattraper et relancer de manière continue des objets en l’air, est un sport complet qui favorise la santé cérébrale et physique.

Mòskòy visite Ayibopost. Photo : Snayder Pierre Louis / Ayibopost

Le jonglage est aussi un territoire de liberté. « C’est là où je peux m’exprimer le plus. Car, quand le public est devant vous, il s’arrête et vit le présent, en harmonie avec d’autres personnes qui regardent également », raconte l’agent animateur de l’Hôpital Universitaire d’État d’Haïti. Pour lui, il n’y a pas de parcours prédéfini pour devenir un grand jongleur. Il faut vraiment être passionné, car le but ultime reste le même : « être sur scène et se donner à sa manière, que ce soit par la jonglerie, le chant, la danse, le théâtre, la musique, etc. ».

Le seul hic consiste en la difficulté de vivre du métier en Haïti. « Je me demande chaque jour, comment je vais gérer dans ces conditions [difficiles et] gagner ma vie avec ce métier que j’aime tant ? » 

Journaliste à Ayibopost. Je m'intéresse à la politique et à la culture.

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