En concédant le nul face à Valence (1-1), le FC Barcelone ne venait pas uniquement de valider son billet pour la finale de la Coupe du Roi, mais aussi, de battre le record d’invincibilité du club détenu par un certain Josep Guardiola. Trente matchs de suite, sans la moindre défaite. Du jamais, dans l’histoire des Blaugranas. Ce nouvel exploit des joueurs de Luis Enrique, en plus de conforter cette équipe catalane dans la légende, vient de relancer le débat sur la meilleure équipe barcelonaise de tous les temps. Laquelle de ces deux équipes l’aurait emporté si elle devait s’affronter ? Une telle comparaison aurait pu se faire plus aisément dans les chiffres. Mais, pour certains, elle aurait été réductrice. Trop mécanique. La magie barcelonaise, bien au-delà des résultats, se trouve dans le jeu. A défaut d’autres rivales, pourquoi ne pas tenter d’opposer le Barça à lui-même. Cette rencontre virtuelle aurait pour effet de confronter le sublime à l’exceptionnel. De comparer l’éternel et l’unique. Ce duel imaginaire permettrait de concrétiser l’objet de nos plus grands fantasmes. De satisfaire nos désirs footballistiques les plus fous. Alors, pourquoi se priver d’un tel bonheur ? Plongeons-nous un instant aux pays des merveilles et savourons l’un des rêves les plus doux au pays des merveilles footballistique…
Faire jouer ces deux équipes barcelonaises, renvoie à monter leurs équipes idéales. Il s’agit là de l’exercice le plus compliqué. Car, certains joueurs ont joué dans les deux formations. Il n’est donc pas évident de les monter l’un contre l’autre. En faisant appel à la fertilité de notre imagination, il y a moyen de surmonter cet obstacle. A dire vrai, ce match surréaliste a le mérite d’être excitant. On ne s’oppose aucune limite. Grace à la magie de la fiction, nous n’avons aucune contrainte. N’est-ce pas là, toute la beauté de la chose ! Il ne suffit que définir l’équipe type du Barça sous la direction de Guardiola. En faisant de même pour Enrique, nous aurions campé les deux meilleures équipes barcelonaises de tous les temps. Ainsi dans le premier cas, on aurait : Valdès, Puyol, Piqué, Alvès, Abidal, Busquets, Xavi, Iniesta, Messi, Pedro, Villa.
De l’autre côté : Bravo, Mascherano, Piqué, Alvès, Alba, Busquets, Rakitic, Iniesta Messi, Neymar, Suarez
Le Barça de Guardiola était injouable. Cette équipe avait construit son succès sur trois piliers : la possession du ballon, un pressing « tout-terrain », et aussi surtout, Lionel Messi. Les rares fois où le jeu blaugrana était mis en échec, l’Argentin s’occupait de tout. Avec un jeu de passes d’une rare fluidité, le Fc Barcelone avait frôlé la perfection. Atteignant certaines fois, près de 80 % de possessions de balle, les Culés ne laissaient que des miettes à leurs adversaires. Et quand d’aventure, ils perdaient le ballon, le pressing époustouflant orchestré par Pedro, se chargeait de le récupérer rapidement. Cette stratégie de défense par l’attaque comblait largement les éventuelles lacunes de l’arrière garde catalane. Peu importe l’adversaire ou l’enjeu, la tactique ne changeait pas. Il revenait aux autres équipes de s’ajuster. Quant au Barça, il dictait sa loi. Imposait son rythme. On se souvient encore de cette fameuse manita passée au Réal où l’on voit Cristiano Ronaldo martyrisé face aux catalans. Abandonné par le reste de son équipe, l’attaquant portugais tenta malgré lui, en vain, de courir après le ballon. Son coup de gueule contre ses partenaires a parfaitement traduit son angoisse. Avec ce Barça-là, le football a été élevé à un niveau jusque-là inégalé. Le « tiki taka » faisait rêver. La patte de Guardiola a réinventé le plaisir de jouer au football.
Quand Luis Enrique débarque, le Barca n’est plus aussi génial. Le plaisir de jouer a atteint ses limites. Xavi est au soir de sa carrière. Messi n’a plus ses jambes de 23 ans. Les Catalans ne sont plus les maitres incontestés du football mondial. De plus, l’héritage de Tata Martino, n’est pas un fardeau léger. C’est la fin d’un cycle. Il est temps de se réinventer. Entretemps Rakitic est arrivé. Mascherano s’est installé comme un taulier de la défense. Et pour épauler Messi, il y a désormais, Suarez et Neymar. Au Barça, une nouvelle ère commence : celle de la MSN. Le temps de la magie collective étant révolue, le football barcelonais cède la place aux qualités exceptionnelles de sa triplette pour faire la différence. Considéré comme le meilleur trio de l’histoire, la MSN terrorise les défenses. Avec plus de 120 buts inscrits sur une année, elle appartient désormais à la légende. Et cette saison encore, elle continue de symboliser presque à elle seule, la suprématie catalane. L’an dernier, la demi-finale de la Ligue des Champions face au Bayern de Guardiola a été l’occasion pour les joueurs de Luis Enrique de toucher les sommets. Ce jour-là, Messi a répondu brillamment à cette question : entre Messi et Guardiola, lequel a rendu l’autre meilleur ? Le passage de témoin étant effectif, le Barça de Luis Enrique a pris les rênes du football mondial et compte bien les garder encore longtemps.
On avait dit tantôt que l’équipe de Guardiola ne changeait jamais d’approche dans son jeu. Il en aurait été de même face au Barça de Luis Enrique. Les joueurs de Guardiola voudraient à tout prix monopoliser le ballon. L’activité de Pedro et de Villa nuirait considérablement Alba et Alves. Ce qui paralyserait considérablement les phases offensives de l’adversaire. La capacité du milieu de Guardiola à conserver le ballon permettrait aux joueurs de Pep de contrôler le tempo de la rencontre. Jamais une équipe n’aura contesté la possession de balle au Barça de Guardiola. On voit mal, l’équipe actuelle, le faire. Dans le jeu, elle devrait se préparer à souffrir contre la plus grande équipe manieuse de balle de tous les temps. Surtout qu’avec Neymar et Suarez ,Luis Enrique ne dispose pas de grandes armes de pressing.
Heureusement, pour l’équipe de Luis Enrique, il dispose d’un atout majeur pour contrecarrer les assauts des hommes de Guardiola, Sergio Busquets. Au grand malheur de Pep, il devra partager son joyau avec le rival. A bien des égards, le milieu Espagnol pourrait-être la clé de cette confrontation. Sa capacité à jouer dans les espaces réduits et sa bonne vision de jeu seraient vitales aux joueurs de Luis Enrique. Sergio Busquets est à la fois le poison et l’antidote du système Guardiola. C’est comme détenir la chose et son contraire. Pour se protéger de la pression adverse, les joueurs de Luis Enrique n’auraient qu’à passer la balle à leur sentinelle. Sa faculté de trouver les joueurs démarqués aurait aidé son équipe à se projeter vers les buts de Valdès. A ce moment, imaginez la suite…
Nous n’allons pas pronostiquer sur le résultat de cette rencontre virtuelle. Rassurez-vous, ce n’est pas l’envie qui nous manque. La tentation de prolonger le plaisir est très forte. Mais, ce serait tout gâcher. En restant sur notre soif, on se donne les moyens de continuer de rêver. Libre à vous de choisir votre camp. De désigner votre vainqueur. Le football, c’est aussi ça. On n’est jamais sûr du résultat. Malheureusement, le monde n’aura jamais l’opportunité de voir un tel spectacle. Mais, au moins nous pouvons l’imaginer. Car, la pensée n’est pas circonscrite dans le temps et dans l’espace, elle vogue. Et ses découvertes nous en mettent pleins la vue. Vive le football ! Hommage à Guardiola ! Chapeau Enrique ! Visca Barca !
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