Coronavirus

Doit-on quand même se faire vacciner si on a déjà été infectés par le Covid-19?

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On a 10 fois moins de chance d’attraper le virus si on est vaccinés et 10 fois plus de chance de ne pas développer de forme grave si on est infectés

Déjà infecté au coronavirus, Tercy Frantz Jean-Bertrand, 29 ans, refuse de se faire vacciner. L’ingénieur de formation a préféré se sauver d’un centre de quarantaine l’année dernière. 

« J’étais en Espagne à l’époque, raconte-t-il. Comme je commençais à vraiment me sentir mal et que je ne pouvais plus supporter mon état, j’ai décidé de rentrer en Haïti. Mais on m’a fait faire un test Covid-19 dont le résultat était positif. J’ai été placé dans un hôtel où je devais passer 40 jours, mais j’y suis resté seulement 20 jours. Parce que j’ai appris qu’ils allaient m’injecter le vaccin après la quarantaine, je me suis enfui de l’hôtel. »

Les gens ont développé des anticorps contre la grippe mais cela ne leur empêche pas d’être grippés

Lorsque Jean-Bertrand est arrivé au pays en décembre 2020, il n’y avait pas encore de vaccination en cours. Depuis, cela a changé. Mais il ne veut pas changer sa décision. En plus de ne pas vouloir prendre le vaccin, Jean-Bertrand est convaincu qu’avoir été déjà infecté lui donne un certain avantage. 

Sans lui donner raison, le docteur Marc Edson Augustin confirme que, vacciné ou pas, lorsqu’on a été infectés par un virus, notre système immunitaire devient plus résistant face à lui. Mais encore, dans l’un ou l’autre cas, on est susceptibles d’être infectés à nouveau. « Toute la différence, dit-il, réside dans la réponse que confère le vaccin au système immunitaire ». 

Les anticorps

Selon le directeur médical de l’Hôpital St Luc de Port-au-Prince, les anticorps ont leur principe. « Une fois que notre corps entre en contact avec un virus, notre système immunitaire développe des réponses qui restent dans la mémoire de notre organisme; ce sont les anticorps », explique Marc Edson Augustin. 

Sauf que ces anticorps restent dans le système immunitaire entre 6 à 8 mois. En outre, le Covid-19 est un virus qui évolue régulièrement et dont on apprend au quotidien. Il change sans cesse de forme et sait s’adapter, reconnaît Dr Augustin. Et il s’agit là, selon lui, de l’une des principales raisons pour lesquelles ceux qui sont déjà infectés devraient prendre le vaccin, histoire de renforcer leur capacité de résistance à une nouvelle infection. 

« 99% des gens hospitalisés sont ceux qui n’ont pas été vaccinés. On a 10 fois moins de chance d’attraper le virus si on est vaccinés et 10 fois plus de chance de ne pas développer de forme grave si on est infectés », Dr Marc Edson Augustin tient à le rappeler.  

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Avec sa capacité à sans cesse évoluer, « le Covid-19 s’apparente à la grippe », souligne Dr Augustin. Le responsable de l’Hôpital St Luc en charge des cas de coronavirus fait un autre constat qu’il juge non moins insignifiant.  

« Les gens ont développé des anticorps contre la grippe mais cela ne leur empêche pas d’être grippés ». À le croire, c’est pour cela que la vaccination contre ce virus a lieu chaque année aux États-Unis. Et toujours selon lui, cette perspective n’est pas à écarter pour le Covid-19.  

Une vaccination continue

Il n’y a pas encore un mois, les autorités sanitaires ont fait don de 250 000 doses de vaccin anti-covid au Honduras. Il s’agit de doses qui allaient être périmées tandis que la population refusait de se faire vacciner. Sans donner de date précise, le directeur général du ministère de la Santé publique a tout de suite confirmé l’arrivée prochaine d’autres vaccins dans le pays. 

Mais pour Biguerson François, les difficultés liées à la vaccination de la population ne disparaîtront pas de sitôt. Le cadre du MSPP s’explique par le fait qu’on ait affaire à une nouvelle maladie et de nouveaux vaccins. Il comprend donc que la population soit réticente. Mais ceci ne doit pas empêcher cela. « On va continuer à faire ce qu’on a à faire, promet-il. Car c’est une question de responsabilité que de continuer à rendre disponible les vaccins et d’inciter la population à se faire vacciner ».

Le responsable de communication ne veut pas parler de campagne, car elle ne serait pas traditionnelle. Dans les campagnes de vaccination régulières, Biguerson François explique qu’on a généralement deux semaines de vaccination intensive suivies d’autres qui le sont moins. Or la vaccination contre le Covid-19 se prolonge sur le long terme. 

Possibilité d’exiger le vaccin ?

Recevoir des transferts d’argent, prendre le bus, aller au restaurant, entrer dans un centre commercial, faire ses courses… ce sont autant de services qui réclament une carte de vaccination en République dominicaine. 

Il y a peu, le pays voisin instaurait le couvre-feu jusqu’à une heure du matin comme l’une des mesures devant lutter contre le Covid-19. Mais désormais, c’est la preuve qu’on a pris non pas une, mais deux doses de vaccin anti-covid qui est exigée.

Pour Samuel Lindor, le plus dur a été de voir l’obligation s’imposer aux facultés. Parce qu’il n’était pas vacciné, l’actuel étudiant en sécurité informatique ne pouvait pas aller en cours. « Certes, je suivais certains cours à distance, mais la majorité était en présentiel », informe-t-il. 

Tant qu’il ne pouvait présenter de carte de vaccination, l’accès à la fac lui était interdit. Pour espérer rentrer dans une salle de cours en janvier prochain, Samuel Lindor a donc pris le vaccin. 

Selon l’assistant-directeur de communication au MSPP, ces mesures contraignantes prises par la République dominicaine sont la preuve que la réticence existe partout dans le monde: « Il n’y a pas que les Haïtiens qui sont réticents. C’est pour cela que des gouvernements optent pour la contrainte ». 

Toutefois, questionné au sujet de la possibilité que l’État haïtien ait recours à de pareilles mesures, Biguerson Francois révèle que la question n’a pas encore été discutée au niveau des autorités, et n’a pas voulu se mouiller davantage sur le sujet. 

Rebecca Bruny

Photos: Carvens Adelson / Ayibopost

Rebecca Bruny est journaliste à AyiboPost. Passionnée d’écriture, elle a été première lauréate du concours littéraire national organisé par la Société Haïtienne d’Aide aux Aveugles (SHAA) en 2017. Diplômée en journalisme en 2020, Bruny a été première lauréate de sa promotion. Elle est étudiante en philosophie à l'Ecole normale supérieure de l’Université d’État d’Haïti

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