Dans cette période fortement dominée par le nouveau Coronavirus, les asthmatiques redoutent de manifester des difficultés respiratoires en public
Le nombre de personnes souffrant d’asthme visitant l’hôpital des Médecins sans frontières de Martissant a augmenté de façon considérable depuis le début du Nouvel An.
Pour le premier trimestre, 1 250 asthmatiques sont enregistrés, soit 14% des patients qui fréquentent le centre. Ceci peut être le résultat de la grève des médecins de l’unique centre hospitalier du pays spécialisé en pneumologie.
Les personnes touchées par les crises de la maladie évoquent très souvent des péripéties endurées lors de leur déplacement durant cette période de pandémie du Coronavirus, selon Frandzy Samson, directeur médical du centre de Martissant. « Ils font régulièrement mention de discriminations ou de menaces reçues dans les transports publics. »
Comme le Covid-19, l’asthme, provoque des crises respiratoires, parfois sévères, qui nécessitent fort souvent une hospitalisation. Les personnes asthmatiques ne figurent pas en tête de liste des patients qui développent les formes les plus sévères du Coronavirus, selon les résultats d’une étude préliminaire menée récemment sur des patients à New York.
Mais tout comme l’éternuement ou la toux, la détresse respiratoire des personnes asthmatiques n’est pas bien vue par certains membres de la population, terrifiés à l’idée d’attraper le Covid-19. Ces jours-ci, même les médecins et centres hospitaliers posent des conditions pour accueillir les gens qui visiblement affichent une difficulté respiratoire.
Stigmatisations
Les problèmes de respiration ne sont pas bien vus dans la société et dans les centres hospitaliers de nos jours, fait savoir le pneumologue Jean Ardouin Esther Louis Charles, directeur médical de l’hôpital Sanatorium.
Généralement, les asthmatiques fréquentent les hôpitaux lorsqu’ils manifestent des crises respiratoires aigües, poursuit Charles. Dans ces situations, ils requièrent le soutien d’un médecin pour stabiliser leur respiration.
« Les personnes asthmatiques ne manifestent pas des signes généraux comme la fièvre, mais la maladie s’accompagne parfois de fréquentes toux, confie Charles. Les individus touchés par cette affection savent qu’ils sont oppressifs et la maladie est plutôt [prévalente dans certaines familles] ».
Prudence des centres hospitaliers
Avec les dangers de transmission du nouveau Coronavirus, des centres hospitaliers du pays prennent des dispositions pour ne pas exposer leurs médecins aux patients manifestant les symptômes de l’asthme. Leur prise en charge se fait prudemment au centre de Martissant, informe le docteur Frandzy Samson.
À cet effet, Lunos Saint-Brave, responsable de communication de MSF, précise que l’espace de soin de Martissant est aménagé et les patients souffrant l’asthme sont diagnostiqués afin de déterminer si leur crise respiratoire est liée à la maladie ou s’il s’agit des symptômes du Covid-19.
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À l’hôpital de Martissant, cette charge est confiée à un médecin.
« Nous sommes obligés de sélectionner les patients qui présentent des difficultés respiratoires aiguës afin de procéder à leur analyse. Si les examens médicaux révèlent que c’est une maladie pulmonaire comme l’asthme, la pneumonie ou la bronchite, le patient reçoit les soins appropriés. En cas où les symptômes diffèrent de ces pathologies, le patient est suspecté de Covid-19. Le ministère de la Santé est donc alerté pour assurer les suivies », explique Frandzy Samson.
Entre-temps, le patient suspecté est placé dans un espace d’isolement d’une capacité de cinq lits, avise le médecin.
Pour sa part, l’hôpital Sanatorium, unique centre hospitalier du pays spécialisé en pneumologie, ne reçoit pas de nouveaux patients. Immobilisé depuis des jours par une grève, ce centre hospitalier est presque désert. « Nous avons une douzaine de médecins interne, mais nous n’avons pas encore reçu de matériels », dit le directeur médical de l’hôpital, Jean Ardouin Esther Louis Charles.
Sans matériels de protection efficace, le pneumologue pense qu’il serait difficile pour un médecin de recevoir un patient avec une détresse respiratoire sans clairement savoir s’il s’agit des symptômes de l’asthme ou d’autres maladies.
D’autres problèmes surgissent
Pour limiter la propagation du Coronavirus, les autorités du pays préconisent l’usage généralisé des masques.
Cependant, les citoyens asthmatiques comme Sonia Dorvilus éprouvent des difficultés à adopter l’instrument. « J’utilise de préférence un mouchoir pour me protéger, car avec le masque j’éprouve des difficultés à bien respirer », raconte la jeune fille de 27 ans.
Sonia Dorvilus a été hospitalisée pendant des heures à plusieurs reprises. Elle s’en est bien sorti à l’aide de la respiration artificielle.
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Hérode Christian, également asthmatique, fait état des mêmes problèmes. En plus, il explique ne pas pouvoir demeurer dans des endroits chauds, sinon, il risque de faire une attaque de crises respiratoires. Néanmoins, rapporte Christian, « j’applique les principes d’hygiène et de distanciation recommandés. »
Le directeur médical du MSF corrobore ces phénomènes. Les asthmatiques qui se présentent à l’hôpital sont généralement en phase de précrise, dit-il. Cette étape est marquée par un déficit criant d’oxygène absorbé dans les voies respiratoires. Le port des masques vient limiter encore la quantité d’oxygène qu’ils obtiennent dans l’air, pense-t-il.
Le protocole actuel exige que les patients soient munis de leur masque à l’intérieur des centres hospitaliers. « Mais après diagnostics, les patients identifiés comme asthmatique enlèvent leur masque pour mieux gérer leur essoufflement », dit le médecin.
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