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Racisme, xénophobie… des Haïtiens qui vivent en Chine témoignent

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Les Noirs sont de plus en plus victimes de mauvais traitements en Chine, en pleine crise du Covid 19. Des Haïtiens qui vivent dans le pays parlent de leur expérience dans l’empire du Milieu

Sous une pluie battante, une vingtaine de personnes, toutes noires, défilent l’air hagard. Dans la vidéo, des policiers chinois les prend à partie. Ce sont des Africains qui vivent en Chine.

Depuis quelque temps, les témoignages de manifestations racistes envers les noirs affluent de Chine. Ils sont refusés dans les hôtels, les restaurants. Certains ont été chassés de leur résidence et ont dormi dans les rues. Les plus hautes autorités chinoises ont même été obligées de réagir tant la situation s’envenimait.

Ces incidents ont lieu principalement à Canton, dans la province de Guangdong, au sud de la Chine. Des Nigérians testés positifs au Covid-19 n’auraient pas respecté la période de quarantaine obligatoire. Ils seraient allés à plusieurs restaurants. Cela a conduit les responsables de la ville à tester plus de 2000 personnes qui auraient pu être infectées à cause d’eux. Il n’y a pas de preuves pour ces accusations.

Les représailles chinoises sont en partie dues à la peur que le virus soit réintroduit dans le pays, après tous les ravages qu’il y a faits. Selon eux, les étrangers en seraient responsables.

Des Haïtiens en Chine

Marcus Bo vit en Chine depuis une dizaine d’années. Il a laissé Haïti pour ses études. Aujourd’hui, Marcus Bo est le PDG d’une entreprise appelée Imar Business Group, en Chine. Dans son entourage, à Shanghai, il n’y a pas beaucoup d’Haïtiens. Une vingtaine, croit-il. Parmi eux, il entretient de bonnes relations avec une dizaine. L’entrepreneur croit que les Chinois, contrairement à ce que peuvent laisser penser ces épisodes, ne sont pas racistes.

« Il y a un plus grand virus que le Covid-19, dit-il, et c’est l’ignorance. Les Chinois posent parfois des questions curieuses, qui pourraient s’assimiler au racisme, sans l’être totalement. Quand on marche dans la rue, on peut être pointés du doigt à cause de notre couleur. Les gens veulent savoir s’ils peuvent te toucher, s’ils peuvent se prendre en photo avec toi. »

Pourtant, Marcus Bo admet que depuis les débuts de l’épidémie, les comportements laissent de plus en plus à désirer. « L’une de mes employées [noires] voulait récemment aller dans un salon de beauté, explique-t-il, mais elle s’est vu refuser l’accès à plusieurs. On lui a tellement posé de questions qu’elle a préféré rentrer chez elle. »

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« Ces faits ne se déroulent pas dans toutes les villes, précise-t-il. Il s’agit surtout des zones les plus reculées. Dans une ville comme Shanghai, on peut entendre parfois des expressions comme ‘nous ne voulons pas des étrangers’, mais c’est tout. »

« J’espère vraiment que c’est un moment qui passera rapidement. Je fais souvent des vidéos de sensibilisation. J’explique aux Chinois que les Noirs étaient à leurs côtés quand le monde les stigmatisait pour le Coronavirus. Ils ne devraient donc pas nous traiter différemment.»

Montée xénophobe

Mike Day étudie les sciences informatiques depuis trois ans en Chine, à Shanghai lui aussi. Il avait obtenu une bourse d’études. « Je vis sur le campus, dit-il, je ne sors pas tout le temps. Avant le Coronavirus, j’allais en cours pendant la journée, puis dans l’après-midi je mangeais dans un restaurant où j’allais au supermarché pour m’acheter des produits à cuisiner. Je n’ai pas subi d’actes racistes pendant ces rares sorties, ni même avec mes camarades, mais je sais que beaucoup de Chinois ont un problème avec les étrangers. »

« Certains n’ont jamais vu un étranger de leur vie, continue-t-il. Ils sont méfiants quand ils en croisent un. D’autres assimilent l’étranger à tout ce qui est mauvais. J’ai rencontré des Chinois qui me demandaient pourquoi ma peau était noire. Ils voulaient savoir si je ne me baignais pas. Aujourd’hui, je ne dirais pas que je me sens en danger, mais je sais que ce n’est pas le moment pour un étranger de se balader dans les rues de Chine. »

Marcus Bo assure lui aussi que les étrangers sont parfois victimes, quelle que soit la couleur de leur peau. « Je connais un ami haïtien qui a été battu récemment, alors qu’il est clair de peau avec des cheveux soyeux. » Ayibopost a essayé d’entrer en contact avec cette victime, qui n’a pas fait suite à notre demande.

Mike Day ne pense pas que ce sont des comportements racistes. Cependant, surtout en ce moment, il y a, croit-il, une vraie remontée de la xénophobie. « La plupart des noirs, surtout africains, vivent à Guangdong. C’est une ville à la température douce, qui a beaucoup d’usines et des ports. Il y avait déjà des tensions entre eux et les Chinois. »

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« Dans la tête des Chinois, si tu es Noir tu es africain, et si tu es africain tu es pauvre et malade. Ce sont des préjugés. En janvier, avant que l’épidémie traverse les frontières chinoises, je connais un ami qui a vécu une expérience dans un train. Un Chinois avait préféré se lever de son siège pour s’asseoir ailleurs, au lieu de rester assis à ses côtés. Mon ami lui a demandé pourquoi. Le chinois a répondu que c’était pour se protéger. »

Cette résurgence de la xénophobie dans la société chinoise est en partie due aux nouveaux cas de coronavirus. Selon les autorités, le virus qui a officiellement fait jusqu’à date 4 632 morts et plus près de 90 000 infectés avait été éliminé du pays. Alors des étrangers, pour la plupart chinois, ont voulu regagner leur pays, comme le Coronavirus commençait à frapper le reste du monde.

À cause de ces expatriés qui rentraient, de nouveaux cas de Covid-19 ont été recensés. Depuis, les actes xénophobes ont commencé, par crainte d’une deuxième vague de l’épidémie. Pourtant, 90% des nouveaux cas positifs parmi ces expatriés étaient des Chinois.

Revenir en Haïti

Au début du Coronavirus, quand il n’était encore qu’une épidémie locale, beaucoup d’étrangers ont laissé la Chine pour rentrer chez eux. C’était la création d’une chaîne de transmission de l’infection. Mike Day n’a pas cru bon de rentrer, au tout début. « J’ai sous-estimé la maladie, admet-il. Je ne croyais pas qu’elle deviendrait aussi sérieuse.»

Quand l’étudiant s’est rendu compte de l’ampleur de la crise, il était trop tard. « Tous les vols vers l’Europe ou les États-Unis ont été bloqués, je suis donc resté coincé. Ma situation est un peu compliquée, mais j’essaie de rester fort. »

Marcus Bo, lui, vit la situation inverse. Quelques jours avant que l’épidémie empire, il était rentré en Haïti pour des raisons personnelles. Il se retrouve coincé dans le pays, loin de sa vie et de son entreprise. « Je suis impatient de rentrer en Chine, dit-il. C’est un pays que j’adore.  »

Le système chinois

La Chine est un grand pays tant en termes de superficie, que de démographie et d’économie. La population est de plus de 1,4 milliard d’habitants. Le pays est dirigé par un parti politique unique, le parti communiste.

Beaucoup considèrent le système chinois comme une dictature qui ne dit pas son nom. Les opposants au régime ne sont pas toujours bien perçus dans le pays, et les critiques de la société chinoise non plus.

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Mike Day a récemment publié une vidéo dans laquelle il reprenait le débat sur la xénophobie des Chinois. D’après lui, certains commentaires reçus à propos de cette vidéo lui signalaient qu’il avait donné trop de détails.

Pourtant, le jeune homme n’a pas peur des conséquences que cela pourrait avoir. « Ce n’est pas la première fois que j’explique les difficultés que rencontrent les étrangers en Chine, dit-il. J’aime dire ce que je pense, surtout si je ne mens pas. »

Jameson Francisque

Journaliste. Éditeur à AyiboPost. Juste un humain qui questionne ses origines, sa place, sa route et sa destination. Surtout sa destination.

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