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10 millions d’enfants du Bon Dieu Bon

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Le mardi 20 mars dernier, le sénateur Nawoon Marcellus, en pleine séance, est victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC). Incapable de trouver sur place les soins que nécessite son cas, un avion-ambulance est affrété le lendemain pour le transférer au Jacksonville Memorial Hospital, en Floride, aux Etats-Unis d’Amérique.

Le sénateur Marcellus rejoint ainsi la longue liste des hommes issus de l’élite politique ou économique du pays qui, un jour, se sont rendus compte qu’à cause de l’irresponsabilité des dirigeants qui se sont succédé ces dernières décennies, l’espérance de vie en Haïti est d’une durée de 24 heures renouvelable. Haïti, ce pays où vivotent, avec plus ou moins bonne fortune, 10 millions d’enfants du Bon Dieu Bon !

Haïti est un pays où tout est urgent: le nombre d’écoles à construire, le nombre de bouches à nourrir, les routes à faire, la décentralisation, le taux de chômage à baisser…  La liste est longue et donne le tournis.

La santé n’est pas en reste. Selon le dernier rapport du ministère de la Santé publique et de la Population, seulement 31,5 %  de la population bénéficie des services sanitaires. Plus inquiétant encore, selon ce rapport, le secteur santé disposait au 30 juin 2016 d’une main-d’œuvre de 23 171 employés, dont 911 médecins, pour 10 millions d’habitants. Ce même rapport indique qu’au niveau national, il n’existe que six (6) lits d’hôpitaux par tranche de 10.000 habitants !

En 2018, dans une Haïti dont le chef du gouvernement, le docteur Jack Guy Lafontant, est médecin, la santé ne représente que 4,3 % du budget national. Pour l’exercice fiscal 2017-2018, seuls 6,1 milliards de gourdes sont prévues pour le ministère de la Santé publique en vue de servir les plus de 10 millions d’habitants: soit 610 gourdes par habitants ! Parallèlement, le Parlement haïtien a la coquette somme de 7,2 milliards de gourdes pour 143 hommes et 4 femmes, députés et sénateurs, soit 48 979 591, 84 gourdes  par parlementaire !

Dans un pays gangrené par le cancer de la corruption, l’argent du contribuable et l’aide internationale pourraient servir à construire plus d’hôpitaux et de centres de santé sur toute l’étendue du territoire national, à mieux équiper les quelques 115 « établissements de santé » existants et à former plus de médecins et d’infirmières.

Aujourd’hui comme hier, il est inacceptable qu’être malade en Haïti ne soit qu’un luxe de plus, un luxe de trop. Luxe que ne peuvent se payer à degrés divers, que les hommes et femmes de l’élite économique et politique (dont Nawoon Marcellus, Moïse Jean-Charles, Michel Martelly, etc.); que quelques braves gens de la classe moyenne et les heureux de la loterie génétique.

10 millions d’hommes et de femmes fatalistes espèrent – aussi bien pour leur santé que pour bien d’autres choses – que le « Bon Dieu Bon » les préservera du pire !

 

Max Jean-Louis

Social Innovator, Captain of Hope and Filmmaker. Élu Administrateur du Centre de la Francophonie des Amériques en 2010 et 2012.

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