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Son père est emprisonné pour l’assassinat de sa mère. Qui a la garde d’Anaëlle?

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Le jeudi 3 mai 2018, un homme poignarde son compagne au cours d’une dispute à Jacmel. Appréhendé par la police, il laisse derrière lui une fille de quatre ans dont le sort demeure inconnu. L’on ne sait pas en effet qui va assurer la tutelle de cette fillette, laquelle vivait jusque-là avec sa mère. En attendant, l’on se questionne sur la position de la loi dans une pareille situation.

Ce drame survenu au début du mois de mai n’a laissé personne indifférent. Un conjoint qui tue sa partenaire (ou ex-partenaire) – pour quelque motif que ce soit – est un fait courant dans notre société. Cela émeut et suscite l’indignation à chaque fois. Chacun veut aussi faire valoir son point de vue. Et de ce fait émanera toute sorte d’histoires et de rumeurs. Mais, dans les commentaires, l’on ne se préoccupe pas toujours du sort des enfants issus de ladite relation. Ils sont directement concernés dans l’affaire.

Le cas de la petite orpheline, Anaëlle Kya Ernest, fille du tueur et de la victime, soulève à nouveau la question de la prise en charge de l’enfant quand les parents sont absents ou sont dans l’impossibilité d’exercer leur autorité parentale. Que se passe-t-il donc dans ces cas?  Norah A. Jean-François, spécialiste en droit des enfants et professeur à l’Université d’État d’Haïti explique que « Dans ces cas de figure, c’est la justice qui doit intervenir ».

La Constitution de 1987 exige du père et de la mère une assistance permanente à leurs enfants tant sur le plan moral que sur le plan matériel en vue d’assurer sa protection. En son article 261, il est dit que : « […] Tout enfant a droit à l’amour, à l’affection, à la compréhension et aux soins moraux et matériels de son père et de sa mère ». Le code civil haïtien mentionne aussi qu’il revient de plein droit au père et à la mère la tutelle de l’enfant. Que celui-ci soit né dans le mariage ou considéré comme enfant naturel, l’administration de ses biens relève du ressort des parents qui en ont la charge jusqu’à sa majorité. Seule la mère peut se dispenser de cette responsabilité si elle le désire, mais obligation lui est faite de remplir les devoirs qui s’y rattachent en attendant de faire nommer un tuteur légal pour l’enfant.

La désignation du tuteur

Dans le cas du meurtre à Jacmel, ni la mère ni le père ne peuvent remplir leur mission de tutelle. La mère est morte et le père est en prison. Une lourde peine pourrait même être requise contre lui. Le sort du mineur en question peut être remis à ce moment-là entre les mains du grand-père du côté paternel, ou à défaut, de celui du côté maternel. « Lorsqu’il n’a pas été choisi au mineur un tuteur par le dernier mourant de ses père et mère, la tutelle appartient de droit à son aïeul paternel ; à défaut de celui-ci, à son aïeul maternel […] », peut-on lire dans l’article 335 du code civil qui traite de la tutelle des ascendants.

Il est impératif qu’un mineur soit pourvu d’un tuteur. Au cas où il n’en aurait pas, le conseil de famille sera chargé d’en désigner un. Présidé par le juge de paix de la commune du domicile du mineur, le conseil de famille est composé de six parents proches du concerné, dont la moitié provient du côté paternel et l’autre du côté maternel. Il veillera également à nommer un subrogé-tuteur dont la mission est de représenter les intérêts du mineur en contrôlant la gestion du tuteur.

En explorant divers cas de figure dans cette affaire, le juge Norah Jean-François croit que toutes décisions visant à placer la petite fille dans une institution pour enfants ou un foyer d’accueil, ne peuvent être prises que par le doyen du tribunal ou un juge délégué par ce dernier. « *L’IBESR, la *BPM et *l’OPC n’ont pas autorité pour cela », déclare-t-elle.

*IBESR : Institut de bien-être social et de la recherche

*BPM : Brigade de protection des mineurs

*OPC : Office de la protection du citoyen

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