Mon cher Doccy, j’ai toujours apprécié ton sens d’observation et ta capacité d’analyse. Tu comprendras donc très vite que ce qui me préoccupe le plus c’est d’abord l’absence de références et de modèles et ensuite l’effritement de certaines valeurs fondamentales dans notre société. Nous nous sommes perdus dans la globalisation: nous prenons tout ce qui vient avec elle, nous laissons tomber tout ce que nous sommes, tout ce que nous avons… nous avons perdu notre identité.
Beaucoup essayent de faire un rapprochement entre ce qui se passe présentement en Haïti et ce qui se passe dans les grands pays occidentaux, comme quoi, le sexe, la musique facile se vendent bien et sont très populaires. À ces gens, je réponds que c’est très dangereux comme réflexion car ces mêmes sociétés ont la capacité de s’auto-réguler, de s’auto-censurer. Ils ont fixé une limite à ne pas dépasser. Est-ce pourquoi certaines musiques ne sont jouées qu’en club privé et ne passent pas sur les ondes. Les artistes concernés sont donc contraints de faire un remix plus potable s’ils veulent être diffusés sur les ondes radio. Ce qui veut dire que même dans les sociétés « les plus libérales », il y a des standards à respecter. Je crois que libéral et liberté sont très éloignés de libertinage…
Je reconnais qu’effectivement, dans notre histoire de peuple et même dans l’histoire de l’humanité, nous avons très souvent (peut-être même trop souvent) contraint au silence beaucoup de femmes et beaucoup d’hommes exceptionnels, à cause de leur intelligence supérieure ou tout simplement parce qu’ils refusaient de se mettre au pas de la foule. Mais que s’est-il passé quelques années plus tard? L’humanité a été obligée de reconnaitre sa stupidité et a dû faire amende honorable pour n’avoir pas su faire le bon choix. Et quand bien même, il y’a réhabilitation de ces personnalités « injustement punies » au final, cette réhabilitation occasionne une perte de temps inutile en ce sens qu’elle aurait pu être évité et qu’elle aurait pu servir à faire des choses plus nobles. Et, c’est justement cette perte de temps que j’aimerais qu’on évite. Pourquoi ne pas orienter, modeler la demande plutôt que de se soumettre à elle? Pourquoi ne pas donner le ton en offrant ou en ne consommant que des produits de qualité ? D’autant plus quand, tout comme celui qui offre, on sait pertinemment que le produit sur la sellette n’est pas du tout recommandable. On n’y gagne rien, après tout. C’est comme administrer un mauvais médicament à un patient que l’on aime. Lorsqu’on en prend conscience, on tente tout ce qui est possible pour le sauver mais à ce moment on dépense beaucoup plus que l’on aurait dépensé si, lors du premier traitement, on l’avait soigné comme il fallait en lui administrant les remèdes appropriés.
Au passage, laisse-moi citer et placer dans ce contexte précis, une réflexion de l’actuel Dalaï Lama, que tu connais surement bien : «… Les hommes vivent comme s’ils n’allaient jamais mourir et meurent comme s’ils n’avaient jamais vécu ». Ceci dit, si on veut différer les coûts de notre insouciance alors tant pis.
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