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Photos | Saint-Jude, la nouvelle route pour éviter les balles de Martissant

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Mieux vaut la poussière que la morgue.

La route de Martissant est surnommée à juste titre la route de la mort. Affrontements entre gangs armés, enlèvements, rançonnements, tirs à hauteur d’homme sont autant de dangers qui guettent les passants les plus aventureux.

Cette route, la nationale 2, mène pourtant à quatre départements du pays, dans le Sud. A cause des bandits, il est de plus en plus difficile de faire l’aller-retour entre Port-au-Prince et ces autres villes.

Il fallait trouver des alternatives, pour circuler entre Martissant, Fontamara, Carrefour, et Port-au-Prince. L’une d’entre elles est de prendre la mer. Des entreprises, et aussi certains particuliers, font le trajet en bateau. Le risque encouru est moindre, mais il n’est pas inexistant. Non seulement il arrive que les bateaux soient trop chargés, mais aussi les bandits de Grand-Ravine sont tout près de cette route maritime.

Vue panoramique de la route de Saint-Jude.

Un camion transporte des passagers. On s’y résigne car il coûte bien moins cher qu’une mototaxi.

L’autre solution est d’emprunter la route de Saint-Jude, qui contourne Martissant en hauteur, et qui finit à Fontamara 43, un peu plus loin du no man’s land des gangs.

C’est de loin la solution la plus populaire, mais non la moins dangereuse. Le danger cette fois-ci ne vient pas des gangs, mais de la route elle-même. Escarpée, sinueuse, au bord d’une falaise… Et elle coute cher. Entre mille et mille deux cents cinquante gourdes le trajet en mototaxi. Et les accidents sont nombreux. C’est pour cela que certains préfèrent y passer à pied.

Un homme porte son bébé dans les bras.

Après quelques allers-retours sur la route, ce chauffeur de mototaxi est couvert de poussière. Mais vu le prix exorbitant du trajet, cela en vaut la peine.

Sur la route étroite et poussiéreuse, les embouteillages ne manquent pas.

Bravant la nuit, des marcheurs s’empressent de rentrer chez eux.

Mais Saint-Jude est devenu si populaire que même des camions à bascule, ordinairement réservés au transport de sable, se mettent à transporter des passagers. Entassés comme des sardines, ceux-ci se résignent. Etre couverts de poussière, être assaillis par les odeurs corporelles diverses venant d’autres passagers, tout cela est bien mieux que de risquer la mort par balles. Mieux vaut la poussière que la morgue.

Un portefaix transporte des marchandises, sur la route.

C’est ici que certaines motocyclettes déposent leurs passagers, qui vont continuer à pied. Au prix fort, les taxis vous emmènent jusqu’à Fontamara.

Station de taptap improvisée. Ces camionnettes partent du Stade Sylvio Cator, et déposent les passagers quelque part sur la route. Ceux qui en ont les moyens paieront une motocyclette pour le reste du trajet.

Une vue de la route, à Tibwa.

La route de Saint-Jude est aussi contrôlée par un gang armé, celui de Krisla, en conflit avec les bandes de Grand-Ravine. Mais le passage est assuré pour les passants, même si chaque motocyclette est rançonnée. C’est une « cotisation » pour l’entretien de la route. Pelles en mains, on voit parfois de jeunes hommes s’activer sur le sentier poussiéreux, pour dégager le passage. Ils portent des armes pour la plupart.

Ces jeunes hommes se font payer 50 gourdes par motocyclette, « pour l’entretien de la route. »

A la queue leuleu…

Terminus. Fontamara 43, relativement éloigné des zones les plus dangereuses de Martissant. Là, les passagers peuvent se rendre sans embuches à Carrefour, ou à leur destination finale.

Photographe à AyiboPost depuis septembre 2021, Carvens Adelson pratique également le montage vidéo, le graphisme et demeure un passionné des films documentaires. Il a suivi une formation en photojournalisme avec le collectif K2D en 2019.

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