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Lyonel Trouillot | Pauvreté de la politique et du politique

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Il y a la nécessité de parler pays, construction nationale. Sortir le politique de la pauvreté de la politique

En relisant le Manifeste du parti de l’Entente populaire de Jacques Stephen Alexis, comment ne pas penser que c’est ce qui manque aujourd’hui et qui a largement manqué depuis la chute de la dictature en 1986 ?

Une analyse des rapports sociaux et des propositions claires et cohérentes de la société dans tous les domaines de vie en fonction de cette analyse. Il y a eu quelques tentatives allant dans ce sens de la part de certaines formations politiques, mais sans doute pas assez élaborées et victimes du peu de confiance qu’inspiraient leurs porteurs.

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Quand on regarde la composition du Conseil présidentiel de transition, cela ressemble beaucoup plus à un accord entre clans, groupes disposant chacun d’un peu de pouvoir qu’entre des représentants de propositions différentes. Aucune des institutions « représentées » ne peut prétendre représenter une proposition politique fondée sur un projet de transformation de la société concrète en la société rêvée en fonction de la vision qu’on a des rapports entre les humains et les groupes sociaux.

Pour constituer ces improbables blocs représentés au CPT, on a vu d’ailleurs des alliances qui ont bien montré qu’il n’y a pas de vision sociale, n’importe qui a fait alliance avec n’importe qui, et impossible de dire qui représente quoi. Le pouvoir n’est qu’un objet de partage.

Intéressant de voir que des gens qui se présentaient comme les disciples Gérard pierre-Charles ou de Charlemagne se soient alignés sur la position suiviste du PHTK concernant les élections au Venezuela.

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Personne ne défend rien. Parti des travailleurs ? Parti représentant quels intérêts sociaux, quel mode d’organisation de la vie dans la société. Rien de ce type.

Il semble même y avoir une volonté de fuir ce type de positionnement et de débat. Même le jean-claudisme n’était pas tombé dans un tel vide. Elles valaient ce qu’elles valaient, mais le parti du dictateur diffusait des émissions sous le titre « qu’est-ce que le jean-claudisme ? ».

L’acharnement à présenter les élections comme une panacée a de suspect que l’on ne travaille pas à donner des raisons de voter en faveur de telle ou telle formation. Déjoie ou Duvalier, pas forcément des propositions géniales des deux côtés, mais un choix au moins entre des positions officielles et des discours différents sur la société.

Là, rien. Et qu’on ne prétende pas que c’est parce qu’on n’est pas encore en campagne. Cela sous-entendrait que c’est lorsqu’on entre en campagne qu’on va s’improviser un point de vue. Les propositions de campagne sont des espérances de concrétisation par des politiques d’un point de vue sur la société. Elles renvoient à une vision globale.

Il y a certes le conseiller Leblanc qui semble voir la vie du pays en rose, les scandales, les tractations, les Kenyans mieux payés que les policiers haïtiens, le désolant tolalito autour de l’Hôpital Général, toutes ces choses qui font l’actualité. Mais il y a aussi la nécessité de parler pays, construction nationale. Sortir le politique de la pauvreté de la politique.

Par Lyonel Trouillot

Image de couverture : Certains membres du conseil présidentiel de transition et le premier ministre Garry Conille. © Odelyn Joseph | Associated Press


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Poète, romancier, critique littéraire et scénariste, Lyonel Trouillot a étudié le droit.

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