À l’occasion de la fête patronale de Jacmel, en mai dernier, les rues et places publiques de la ville sont bondées de mendiants. Parmi ces hommes et femmes qui demandent l’aumône, il y a ceux qui viennent de la capitale et d’autres villes du pays
Dans le Centre-Ville de Jacmel, l’on trouve de nombreux bâtiments de style colonial, notamment la Maison Cadet datant du XIXe siècle. Pour la fête patronale, les activités artistiques, récréatives, religieuses ou gastronomiques se multiplient dans la ville.
Comme partout où il y a mouvement de foule, la mendicité n’est jamais bien loin. Monique et Liline sont deux mendiantes venant d’autres villes du pays.
Elles s’assoient l’une à côté de l’autre entre les rues Alcius Charmant et Vallières. Une main tendue, elles haussent la voix pour se faire entendre du flot de passants.
Liline, à la fois manchot et unijambiste, vient de Delmas 18. Elle fait partie des rescapés du séisme de 2010 qui peinent à se remettre du cataclysme.
« Je travaillais avant à l’usine APAID qui se trouve à Delmas. Avec le minimum que je recevais, j’avais l’opportunité de vivre avec mes enfants », explique la dame, qui après le séisme, s’est vue installer une prothèse composée de pièces mécaniques synthétiques.
Une main sur sa béquille et l’autre tendue vers les passants, Monique prend place à côté de son amie. Cette mère d’un fils vit à Port-au-Prince, mais traverse les rues du pays pour chercher la vie.
Voyager pour mendier
Ensemble, ces dames participent aux grandes activités du pays. Pour la semaine allant du 29 avril au 2 mai 2019, elles ont choisi de quitter la capitale pour mendier à Jacmel.
« Nous vivons grâce au moyen que les gens nous donnent. Pour gagner beaucoup plus afin de subvenir à notre besoin, nous sommes obligés de participer aux fêtes patronales, carnavals, etc., peu importe la ville », fait savoir Liline.
Ces dames paient les transports publics, relate le chauffeur qui les a transportées dans la ville portuaire sur la côte sud du pays, le lundi 29 avril dernier. « Liline et moi payons les transports comme tout le monde, peu importe la ville où nous allons », lance Monique, en affirmant qu’il s’agit d’un investissement. « Nous dépensons notre argent pour générer du profit. »
Une vie épuisante
La mendicité ne rapporte pas beaucoup. De plus, l’activité épuise physiquement et psychologiquement. Le montant assemblé fluctue en fonction des périodes, des fêtes et de la générosité des gens rencontrés, expliquent Liline et Monique.
Devant l’ancien bâtiment du marché en fer de la ville, Peter, un autre mendiant ambulant âgé de 64 ans, précise qu’il gagne beaucoup plus d’argent que les mendiants sédentaires. « Ceux qui restent dans un seul endroit gagnent moins d’argent, car nous ciblons des touristes étrangers ou haïtiens », déclare le père de cinq enfants.
Monique, de son côté, mentionne qu’elle a gagné lors la fête patronale de Jacmel en 2018, plus de 20 000 gourdes en une semaine, et Liline, 25 000 gourdes. « J’ai obtenu plus que cette somme le 15 mai l’année dernière à Saint-Michel de l’Attalaye à l’occasion du Saint Michel Archange. »
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