Challenges, l’unique magazine haïtien de standard international a déjà bouclé quatre années d’existence. En ce printemps 2019, alors qu’un licenciement massif du personnel est confirmé, la direction nie toute allusion à la fermeture du média.
Le 29 avril 2019, l’administration de Challenges vire l’ensemble de son personnel. Ce qui implique, a priori, la fermeture définitive du magazine. Si pour les employés licenciés, l’aventure s’arrête là, la direction, de son côté, ne le voit pas de cet œil.
Créé en 2015, Challenges est la propriété de GB Group S.A, l’un des groupes financiers les plus influents du pays, qui appartient à la famille Bigio. Au départ, c’était un magazine hebdomadaire dirigé par deux équipes. L’une qui se trouvait aux États-Unis d’Amérique s’occupait de la mise en page et de l’impression de chaque édition ; et l’autre en Haïti, se chargeait du contenu médiatique, de la distribution et des publicités. Le staff de Challenges était ainsi constitué de professionnels haïtiens et étrangers.
Selon Ady Jean Gardy, premier rédacteur en chef et membre fondateur du magazine, l’un des objectifs de Challenges visait à doter le pays d’un magazine critique indépendant et équilibré qui mettait l’emphase sur le secteur des affaires.
Des numéros du magazine étaient distribués gratuitement dans des ambassades et des ONG internationales dans l’idée d’encourager des investissements étrangers dans le pays
Des inquiétudes surgissent
Deux ans après son apparition, Challenges arrêtait ses publications hebdomadaires pour se transformer en mensuel. Dans l’intervalle, le rédacteur en chef qui était également le gestionnaire administratif a démissionné. Le coût des opérations se faisait sentir de plus en plus, à savoir l’entretien du personnel, l’impression (de grande qualité) des différentes publications. Le nombre d’abonnés a chuté au point que la vente des publications ne garantissait même pas le paiement de l’équipe, nous confie un employé récemment licencié qui souhaite garder l’anonymat afin d’éviter d’éventuels conflits avec le staff administratif. Les difficultés s’accumulaient. L’administration de Challenges dirigée par Laurence Sarah Bigio, jette finalement l’éponge en renvoyant tout le personnel.
Le début de la fin ?
Le 29 avril, les employés de Challenges reçoivent un courriel dans lequel l’administration annonce leur licenciement ainsi que la fermeture du magazine. « Les raisons avancées sont d’ordres économiques. Il n’y a pas de commanditaires. Les abonnés deviennent de plus en plus rares », explique Georges Harry Rouzier qui ne cache pas son regret face aux difficultés auxquelles fait face Challenges. Ce photographe, grâce au magazine, a eu l’opportunité de publier plusieurs reportages photo. « Cela m’a permis d’avoir des contrats avec d’autres institutions », raconte-t-il.
Ady Jean Gardy, de son côté, croit que le bilan financier serait à l’origine de la fermeture du magazine. « Je n’ai pas l’intention de retourner à la tête de la rédaction quoique l’absence de Challenges constitue une perte énorme pour la presse haïtienne », avoue-t-il.
Alors que plusieurs employés évoquent la fin de l’aventure Challenges suite au dernier mail qu’ils ont reçu, le rédacteur en chef Cossy Roosevelt n’est pas du tout de cet avis. Dans un premier temps, il nous confie que Challenges est en phase de restructuration. Selon lui, les publications se feront désormais en version numérique à travers le site internet du média. Ensuite, le rédacteur révèle qu’il n’est pas autorisé à prendre la parole au nom du magazine suite à une réunion du conseil d’administration. Ce dernier devra communiquer une note de presse relative à l’avenir de Challenges, poursuit Cossy Roosvelt.
Entre des employés licenciés et le mutisme du staff administratif après plus de 20 jours, l’avenir de l’unique magazine existant au pays est à l’agonie. Certes, son site internet est toujours en fonction et des articles insérés dans son dernier numéro sont mis en ligne, cependant la situation actuelle laisse planer des doutes pour la suite. La fermeture définitive du site qui suivrait le licenciement du personnel ne serait peut-être qu’une question de temps.
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