EN UNESOCIÉTÉ

Je suis égoïste.

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Je ne sais plus comment poser les yeux sur quelqu’un qui se dit être mien. Je ne peux plus formuler un seul mot pour exprimer des sentiments. J’ai tout oublié. Des mains dans les miennes me rendent rigides et gauches. Je ne peux plus me promener bras dessus bras dessous, échanger des sourires bêtas, faire des mamours ; je ne m’y retrouve plus. Je crois que j’ai oublié…

Je ne sais plus lier mon corps à celui d’un autre, je ne peux plus mêler ma vie à celle d’un autre, je suis devenue égoïste. Si on m’offre un cœur je ne saurais quoi en faire… Si on m’offre de la compagnie, une vie à deux, je sentirais mon confort complètement menacé. Je ne veux perdre mon insouciance,  mon indolence, ma paresse et ma désinvolture. Je ne tolère plus de partager, encore moins de me partager. Je ne tolère plus de retrancher mes envies, de transposer mes habitudes, de décaler mes rêves. Je l’avoue, je suis tout à fait égocentrique.

Parfois cela m’amuse. Je me sens un être particulier, différent, solitaire. Un humanophobe. Un esprit très exclusif, un individu extrêmement introverti qui ne prend son pied que dans le recul, qui ne reprend vie que derrière des portes closes ou dans son véhicule en marche, transporté par les mélodies du monde. Je le concède, je souffre d’humano-phobie modéré. J’observe les autres de loin, je les côtoie sans pour autant me livrer ; je garde presque consciemment mes distances. Je les observe parler, rire aux éclats, faire des projets … Je souris à ce qu’ils disent mais l’intérêt n’y est pas. Je les sens donner, et donner, puis redonner de l’énergie, cela me surprend, moi je n’en ai pas autant. Malgré tout, je n’arrive pas à me nourrir de la leur. Ils me drainent. Alors je m’éloigne dès que possible pour me nourrir de ces choses- là : mon oreiller, ma boite à  lunch, le livre posé sur ma table de chevet depuis tantôt 6 mois.

Et puis… je retourne à mon maudit portable, ce lien entre moi et le reste. Et je relis ses messages. Pas mal, il a l’air d’être sincère. Je n’ai pas de doute sur ses intentions mais plutôt sur les miennes. Je ne sais pas si je suis fiable. Je ne sais pas ce qu’impliquent mes propres réflexions. Néanmoins, je continue d’avancer vers lui, ses rêves et ses désirs. Parfois, quand il approche son visage un peu trop près du mien, je ne sais plus, je ne bouge plus… Je ne sais pas si mon cœur palpite sous le coup de l’excitation ou de la panique. Toutefois, je pencherais pour le second. Mes regards sont fuyants, entre le cool et le ringard, mon toucher, comme un effleurement, mon oui sans parfum.  Cependant, j’ai beau tout oublié, je n’oublierai pas mes propres aspirations. Je veux être honnête et je n’aurai d’autre choix que de lui tourner tout simplement le dos. J’ai du mal à gérer mes émotions et je ne suis certainement pas prête à faire autant pour celles d’un autre. Au risque de perdre cette promesse de bonheur, j’opte pour continuer à me complaire dans cet étau sûr et rassurant qu’est l’égoïsme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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