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Haïti : l’extrémisme est-il à nos portes ?

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Depuis la publication des résultats partiels de l’élection présidentielle haïtienne, le pays se divise. Les recommandations pleuvent. Ce ne sont pas les propositions qui sont en reste. D’un côté, certains réclament l’annulation des élections pour cause de fraudes. D’autres exigent une commission de vérification, face à un conseil électoral provisoire (CEP) qui n’en fait qu’à sa tête. Tous, pour justifier leur acharnement au pouvoir, ne jurent qu’au nom du « peuple ».

Le peuple. Voilà la formule magique de nos hommes et femmes politiques. Leur mine d’or. Avec celui-ci, le sésame est garanti. Il suffit de pouvoir bien articuler autour de ce mot pour découvrir la caverne d’Ali Baba. Atteindre Canaan, le pouvoir. Plus que du lait et du miel, ici dans notre Canaan, le trésor public, l’argent coulent à flots.
À bien regarder, on peut croire que cette cohabitation, celle du peuple et des politiques, est une vraie histoire d’amour. En effet, les hommes et les femmes politiques ne disent jamais deux mots sans nommer leur véritable partenaire : le peuple. Pour ce dernier, ils sont prêts à accueillir la mort et faire des sacrifices inouïs.
Paradoxalement, de la ruelle Vaillant, en passant par Saint-Jean Bosco, pour arriver à 2004, c’est le peuple qui dénombre les cadavres. Il est passé sous les bottes et les balles assassines de l’armée. Ses entrailles ont accueilli les poignards et les tortures. Sa seule récompense est de voir des dévoyés crier au scandale pour n’avoir pas eu une franchise douanière éternelle.

Le peuple : toujours malchanceux

La semaine écoulée, des organismes des droits humains ont convoqué le peuple à descendre dans les rues pour aller réclamer le respect de leur droit de vote. Quel droit ? Il ne manquait plus que ça. Comme si se faire cocufier par les pasteurs et les politiques ne les suffit pas. Les organismes de droits humains s’y mêlent maintenant.
À travers cette action, je crois comprendre pourquoi le peuple, malgré tous ses déboires, ne cesse de supporter ce qui est pour moi inacceptable depuis presque 30 ans. C’est probablement parce que pour l’Haïtien, manger à sa faim n’est pas un droit. Aller à l’école, avoir un logement et vivre en bonne santé ne le sont pas non plus.
Si c’était le cas, ces gens qui se disent militants de droits humains et qui habitent les quartiers les plus huppés de Port-au-Prince, qui roulent dans les modèles de 4×4 les plus chers d’Haïti auraient déjà trouvé d’autres moyens de s’enrichir. En montrant leur vrai visage de vrai parti politique peut-être.

La patience a une limite

Pour être franc, ce ne sont pas les hommes et les femmes politiques de ce pays qui m’inquiètent. Encore moins les organisations de défense de droits humains. Mon plus gros souci reste et demeure l’effet séisme de la population haïtienne. Car je suis convaincu qu’un jour, la population se réveillera de ce cauchemar. Et ce réveil, croyez-moi, sera brutal.

Suite à l’évènement du Bataclan le 13 novembre dernier, je discutais avec des amis sur la situation économique des jeunes d’Haïti, en tentant de faire un rapprochement entre ces derniers et la radicalisation de certains jeunes Français. L’ami m’a clairement dit que je dois enlever cette idée de mon esprit parce que nous n’avons pas cette culture en Haïti de nous suicider.

Je ne sais pas si des Haïtiens pourront se radicaliser ou pas. Mais une chose est sûre, nous sommes en train de les transformer en une véritable bombe humaine.
Quand le cynisme de nos hommes et femmes politiques va jusqu’à asseoir leur pouvoir sur la misère de la majorité de la population, quand le fossé entre le mandataire et les mandants est de nature à créer une frontière entre le peuple et le droit à l’alimentation, on est en droit de dire que l’explosion n’est pas loin.

Wilney Taris

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