SOCIÉTÉ

Deux ex-officiels de l’administration Jovenel Moïse et Jimmy Cherizier sanctionnés par les Etats-Unis

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L’annonce tombe au jour de la commémoration de la journée internationale des droits de l’homme, ce 10 décembre

L’administration fédérale américaine vient de sanctionner deux anciens officiels de l’administration de Jovenel Moïse, Fednel Monchery, Joseph Pierre Richard Duplan et l’ancien policier, désormais chef du G9, Jimmy Cherizier, pour leur implication dans le massacre de La Saline.

Dans une note de presse publiée par le Département du Trésor américain, les individus précités sont ciblés comme auteurs de graves violations des droits de l’homme. Ils sont sanctionnés en vertu du Magnitsky Act, une loi sortie en 2012, qui autorise le gouvernement américain à geler leurs avoirs et à leur interdire d’entrer aux États-Unis.

« La violence généralisée et la criminalité croissante des gangs armés en Haïti sont renforcées par un système judiciaire qui ne poursuit pas les responsables d’attaques contre des civils », peut-on lire dans la note de presse.

La décision est bien accueillie par les militants des droits de l’homme.  « C’est encourageant et regrettable, déclare Me Samuel Madistin de la Fondation Je Klere. C’est encourageant de voir un pays étranger, comme les États-Unis, qui convaincu de l’implication de ces individus dans le massacre de La Saline a pris des mesures contre eux. C’est regrettable que la justice haïtienne n’ait rien fait alors que la Fondasyon Je Klere [qui milite pour la défense des droits humains] les avait indexés dans son rapport sur le massacre de La Saline. »

Les autorités américaines confirment les liens établis entre le pouvoir et les groupes criminels. « Ces gangs, avec le soutien de certains politiciens haïtiens, répriment la dissidence politique dans les quartiers de Port-au-Prince connus pour participer à des manifestations antigouvernementales, continue la note. »

« En échange d’attaques destinées à créer de l’instabilité et à faire taire les demandes de la population de Port-au-Prince pour l’amélioration des conditions de vie, les gangs reçoivent de l’argent, une protection politique et suffisamment d’armes à feu pour les rendre mieux armés que la Police nationale haïtienne (PNH). »

Lire aussi: Qui sont ces officiels de l’administration de Jovenel Moïse accusés dans les massacres de la Saline ?

L’attaque de La Saline perpétrée en novembre 2018 a fait au moins 71 morts et occasionnée l’incendie d’environ 400 maisons sans compter les multiples viols, les victimes brulées et démembrées.

« Alors qu’il était officier de la PNH, Jimmy Cherizier (Cherizier) a planifié et participé à l’attaque de La Saline en 2018 », expliquent les autorités américaines. « Tout au long de 2018 et 2019, Cherizier a dirigé des groupes armés dans des attaques coordonnées et brutales dans les quartiers de Port-au-Prince. Plus récemment, en mai 2020, Cherizier a dirigé des gangs armés lors d’une attaque de cinq jours dans plusieurs quartiers de Port-au-Prince dans laquelle des civils ont été tués et des maisons incendiées. »

« Fednel Monchery (Monchery) était le directeur général du ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales. Tout en exerçant ce rôle, il a participé à la planification des [massacres de] La Saline. Monchery a fourni des armes et des véhicules d’État aux membres des gangs armés qui ont perpétré l’attaque. Monchery a également assisté à une réunion au cours de laquelle les massacres étaient planifiés et où des armes ont été distribuées aux auteurs de l’attaque. »

Joseph Pierre Richard Duplan (Duplan), qui était le délégué départemental du président Jovenel Moïse à l’époque, est accusé d’être « l’auteur intellectuel » et a été vu en train de discuter de l’attaque avec des membres de gangs armés dans le quartier de La Saline pendant les violences. Duplan a fourni des armes à feu et des uniformes de la PNH aux membres de gangs armés qui ont participé aux meurtres. Duplan a également assisté à une réunion au cours de laquelle La Saline a été planifiée et où des armes ont été distribuées aux auteurs de l’attaque.

Contactée, l’Ambassade américaine n’a pas indiqué si elle compte réévaluer ses relations avec l’administration en place. « Les États-Unis encouragent le gouvernement haïtien à promouvoir les libertés fondamentales et l’État de droit en Haïti », déclare un porte-parole de l’institution.

« Avec ces sanctions, continue le porte-parole, les États-Unis cherchent non seulement à imposer des conséquences tangibles et significatives à ceux qui commettent de graves violations des droits de l’homme ou se livrent à la corruption, mais aussi à protéger le système financier des États-Unis contre des abus de la part de ces mêmes personnes. »

Rien ne vient indiquer quel type de biens possèdent les trois individus indexés en territoire américain. « Toutes les entités qui appartiennent, directement ou indirectement, à 50 % ou plus à une ou plusieurs personnes bloquées sont également bloquées », assure le porte-parole de l’ambassade.

« Les règlements du Bureau américain de contrôle des actifs étrangers interdisent généralement toutes les transactions effectuées par des personnes américaines ou à l’intérieur des (ou en transit aux) États-Unis qui impliquent des biens ou des intérêts liés à des possessions de personnes désignées ou autrement bloquées. »

Cet article a été mis à jour avec les réactions de l’Ambassade Américaine en Haïti. 17.12.2020 8.14

Widlore Mérancourt est éditeur en chef d’AyiboPost et contributeur régulier au Washington Post. Il détient une maîtrise en Management des médias de l’Université de Lille et une licence en sciences juridiques. Il a été Content Manager de LoopHaïti.

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