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Covid-19: Grand Goâve totalement démunie

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La commune qui n’a aucun cas confirmé de Coronavirus ne dispose d’aucune capacité de prise en charge

Beaucoup d’églises à Grand-Goâve ont fonctionné le dimanche 22 mars, malgré l’arrêté sorti deux jours avant et déclarant l’état d’urgence sur tout le pays.

La plupart des ménages de cette commune de 124 135 habitants n’étaient pas au courant des mesures de confinement prises par l’État sur tout le territoire, selon Olrich Noël, membre de l’Assemblée de la section communale Gérard à Dano (une localité de Grand Goâve).

L’élu local a donc profité de la circonstance pour sensibiliser quelques membres d’église sur le Coronavirus.

« Nous avons parlé aux leaders religieux, mais aussi à leurs fidèles des menaces qui pesaient sur eux et sur nous tous, s’ils ne respectaient pas les mesures de confinement. Nous avons réussi à les convaincre qu’il était dans leur intérêt de fermer les portes des églises», explique Olrich Noël.

Aucune structure de réponse

Si une partie de la population Grand-goâvoise est à ce jour informée des menaces du Covid-19, les mesures de confinement peinent à être respectées dans la commune.

«Les écoles et les églises ont fermé leurs portes, mais les marchés publics fonctionnent encore. Mercredi dernier (mercredi est un jour de marché à Grand-Gôave), le marché public a fonctionné comme à l’ordinaire. Les marchands ont exposé leurs produits et les clients s’en sont procuré sans respect de la distanciation sociale», révèle Olrich Noël. Selon lui, la plupart des gens n’ont pas de moyens pour rester chez eux.

De son côté, le maire de Grand Goâve, Jean Maxo Pinchinat, avance qu’il n’y a aucune disposition pour la prise en charge d’un éventuel cas confirmé du Covid-19 dans la commune qu’il administre.

 « Je ne pense pas que l’État lui-même soit prêt pour la prise en charge des patients atteints du coronavirus, dit-il. On ne sait même pas où se trouve le centre où l’on place les gens qui sont infectés.»

Le personnel médical attend encore le MSPP 

Si le maire de cette ville située à environ une heure de Port-au-Prince n’est pas prêt, c’est parce que le personnel médical à Grand Goâve ne l’est pas non plus.

Selon le médecin Marie Josy Morin Dossil, directrice de l’hôpital public Georges Gauvin à Grand Goâve, l’hôpital ne dispose que d’une salle pour isoler les éventuels patients atteints du coronavirus.

« Ce qu’on fait c’est le lavage des mains, il y a aussi des prestataires de soin qui portent des masques à part cela on n’a rien, rapporte Dossil. Le Ministère de la Santé par la Direction sanitaire de l’Ouest (DSO) a fait des formations pour nous et nous a promis des intrants, nous les attendons.»

La directrice relate que l’hôpital priorise les patients qui nécessitent des soins en urgence et ceux qui présentent les signes du coronavirus notamment des difficultés respiratoires, la fièvre, la grippe et la toux.

Lire aussi: Témoignage détaillé d’un médecin haïtien depuis un foyer de Coronavirus aux USA

Pour ce faire, le personnel médical a diminué et le nombre d’heures de travail a été réduit au sein de l’hôpital Georges Gauvin. Toutefois, la directrice s’inquiète beaucoup qu’un patient soit testé positif au Covid-19 à Grand-Goâve.

« Si nous trouvons des cas [aggravés] de coronavirus, dit-elle avec peine, nous nous demandons comment nous allons procéder puisque nous n’avons pas de respirateur artificiel et nous sommes à présent en rupture de stock pour des bonbonnes d’oxygène. Donc, s’il y a des cas graves qui se présentent, nous serons obligés de les référer dans les sites appropriés à Fonds-des-Blancs ou à Mirebalais.»

Le ministère de la Santé a communiqué des numéros de téléphone pour que les médecins puissent appeler s’il y a des cas suspects du Coronavirus afin de les tester au Laboratoire national. Jusqu’à présent, les autorités médicales n’ont signalé aucun cas suspect à Grand-Goâve.

Le centre hospitalier Georges Gauvin est un hôpital public qui a été inauguré en 2007. Son incapacité de prise en charge illustre la situation de beaucoup d’autres hôpitaux dans le pays. Trois quarts des 1 048 institutions sanitaires du pays sont des dispensaires et des centres de santé sans lits, selon un rapport du MSPP sorti en 2015.

Certaines régions reculées du pays ne disposent même pas d’un dispensaire où leurs habitants peuvent bénéficier des premiers secours.

Photo couverture: Grosame / Grand-Goave

Laura Louis est journaliste à Ayibopost depuis 2018. Elle a été lauréate du Prix Jeune Journaliste en Haïti en 2019. Elle a remporté l'édition 2021 du Prix Philippe Chaffanjon. Actuellement, Laura Louis est étudiante finissante en Service social à La Faculté des Sciences Humaines de l'Université d'État d'Haïti.

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