Depuis trois ans, Codepath et Transition Digitale organisent une formation intensive de courte durée à l’intention des programmeurs. Cette année, un tiers des participants qui ont achevé le programme sont des femmes. Une belle avancée dans un secteur largement dominé par les hommes.
Les jeunes femmes ont toujours été réticentes à participer aux bootcamps en programmation Android organisés par Transition Digitale et Codepath. Les rares femmes qui ont pris part au camp les deux premières années n’ont pas pu terminer programme. Ce bootcamp est un programme en général offert par Codepath aux employés des plus grandes compagnies de la Silicon Valley telles que Youtube, Facebook, Dropbox, etc. Grâce à la collaboration de Transition Digital et Codepath, un jeune haïtien participant au programme bénéficie des classes gratuitement.
En 1985, 35% des finissants en Sciences Informatiques aux Etats-Unis étaient des femmes. Aujourd’hui, seulement 18% des licenciés sont des femmes. A travers le monde, les métiers liés à l’informatique et aux nouvelles technologies se masculinisent depuis près de 30 ans. La réalité n’est pas différente en Haïti. Les universités qui offrent des programmes en sciences informatiques accueillent majoritairement des hommes. Le paradoxe est que, malgré les avantages financiers et l’importance croissante des métiers en nouvelles technologies dans le monde, les femmes n’arrivent toujours pas à profiter aussi bien que les hommes de ce secteur en pleine expansion.
“La chose avec les stéréotypes c’est qu’ils s’auto-renforcent naturellement « Sheryl Sandberg
L’une des figures qui joue le rôle de porte-voix de la problématique du manque de femme dans les métiers en sciences informatiques est Sheryl Sandberg, directrice des opérations (COO) à Facebook. Elle estime que le problème réside dans le processus de socialisation des jeunes filles. La société envoie aux jeunes filles et jeunes femmes de nombreux signaux sous-entendant que certains métiers ne sont pas à leur portée. En ce sens, Haïti connaît une situation sociale similaire. « Lorsqu’elles sont intéressées à l’informatique, les jeunes filles sont beaucoup plus encouragées à faire la bureautique », explique Thodly Dugue, jeune informaticienne à l’école Supérieure d’Infotronique d’Haïti (ESIH). De Microsoft à Facebook en passant par Google, les multinationales spécialisées en technologies prennent des dispositions pour encourager les jeunes femmes à coder et à faire carrière dans le monde de la technologie.
Le directeur de Transition Digitale, M. Carly Baja, a expliqué que le manque de participation des femmes au Bootcamp le tracassait. Selon lui il y a un manque de sensibilisation des écoles pour encourager les jeunes écolières à s’orienter vers les sciences informatique et les métiers liés aux nouvelles technologies qui pourtant font partie d’un secteur en pleine croissance en Haïti et dans le monde.
Cette année, M. Baja se réjouit d’avoir un tiers des gradués qui sont des femmes. Elles sont cinq sur les 15 participants qui ont achevé le programme. Julio Jean-Fils, professeur-accompagnateur du Bootcamp, avoue qu’il est impressionné par le bon niveau de ces jeunes femmes. Selon lui, l’expérience de cette année leur prouve à Transition Digitale, qu’il faut davantage encourager les femmes à participer.
Au début du mois de septembre 2017 les cinq jeunes femmes ont présenté avec leurs équipes respectives leurs projets de fin de session. Elles ont travaillé sur cinq applications différentes, dans plusieurs secteurs. Les applications Android présenté ont autant charmé les professeurs sur place que les représentants de Codepath aux Etats-Unis. « J’espère que dans les années qui viennent, le nombre de femmes qui participeront égaleront les hommes », espère Carly Baja. Et pourquoi Haïti ne servirait pas de modèle aux Etats-Unis et l’Europe qui n’arrivent pas encore à atteindre la parité dans les secteurs de l’informatique et de la technologie ?
Au cours d’un échange avec des élèves d’une école de Philadelphie, une écolière de 17 ans a demandé à Bill Gates pourquoi elle remarquait si peu de femmes dans les grandes compagnies de technologie. Le créateur de Microsoft répondit qu’ « Il y a des femmes qui occupent des postes très importants [dans le monde des technologies], et elles réussissent bien. Mais, d’une manière ou d’une autre, nous intimidons les jeunes femmes ou leur envoyons des signaux sociaux qui les découragent. » Il faudra donc s’assurer dans nos écoles et dans nos familles de ne pas dissuader nos filles de se lancer dans les sciences informatiques. Ces cinq jeunes femmes prouvent que le genre ne devrait pas être un obstacle en informatique ou n’importe quel autre champ.
Retrouvez ci-dessus notre reportage vidéo sur les jeunes femmes qui ont participé au Bootcamp cette année.
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