Naturelle, défrisée, extensions, mohawk? Androgyne, poitrine à la Kim, fesses à la Nicky? Blonde, rousse, brune? Bimbo au visage refait ou beauté aux traits assumés? Style conventionnel ou signature atypique? Notre image et notre corps ne nous appartiennent plus; nous en sommes devenus esclaves. Nous multiplions les laïus qui dénoncent tour à tour la tyrannie de la minceur, l’objectification de la femme, la suprématie des canons occidentaux, la survalorisation de la beauté et rabâchons à outrance les verbiages sur l’affirmation et l’acceptation de sa beauté intérieure. Mais nous suivons comme des cons la mouvance, victimes et vecteurs du même présupposé: ce qui est beau est bon. Tout part de là.
Très tôt, on nous apprend à dissimuler et camoufler qui nous sommes vraiment : encouragées (ici il faut plutôt lire « contraintes ») à nous nourrir de « light », de « diet », de « low fat », à nous draper de glamour, à cacher nos ô-
La beauté est aussi enchainée dans nos esprits. Dans nos consciences – collectivement – déséduquées (puis reformatées), elle est gage de séduction, bonheur, bien-être et succès. Que l’on s’y résolve ou que l’on se révolte, nous ne sommes pas moins tributaires de notre image. Alors nous endossons les contraintes qui nous sont imposées et que (
Vous me direz que sont des clichés ? Et c’est bien beau de le prendre par ce bout. Sauf que c’est aussi très simpliste et largement réducteur, l’histoire démontrant bien que la relation des femmes à leur corps a toujours été un douloureux et incessant combat entre leur obsession de ressemblance aux canons de beauté et l’oppression de cet impératif esthétique. Masochiste mais logique. Pourquoi ? Parce que la femme est conditionnée pour aspirer à la perfection. À la manière d’Alain Suchon, « on nous inflige des désirs qui nous affligent ». La vérité est là: en tant que femme, pour être, il faut paraître (non ! bien paraître) et nous valons ce que vaut notre image. Personne n’y échappe, même pas maintenant que les injonctions tendent de plus en plus vers la différenciation. Paradoxal ? Dé
Oui, il y’a eu du progrès au cours des dernières années: ces femmes, comme nous, qui sont choisies pour faire la couverture des magasines à cause de leur unicité en sont une illustration certaine. La campagne Real Beauty de Dove qui invite les femmes à se poser un regard plus clément en est une autre. Aujourd’hui, les messages qui sont véhiculés sont de plus en plus axés sur l’affirmation de sa différence: « affiche ton originalité », « exprime ta singularité », « raconte et montre au monde ce que tu es ». À priori, nous devrions les recevoir comme une libération et saisir au vol cette occasion inouïe de montrer au monde que toutes les beautés se valent. Pourtant, il n’en est rien car, en fait, la société n’a jamais pas cessé de nous dicter comment il fallait être pour « être ». Seul le référentiel a changé, la dictature du remarquable se substituant à celle de la minceur. Dans une société au sein de laquelle « être » est devenu accessoire, performer (je devrais plutôt dire surperformer) honorable et se faire concurrence une condition de survie, les femmes sont plus que jamais dépendantes du « rendement » de leur image : spectatrices passives de la vie mise en scène des autres on est tout le temps confrontées à nos « lamentables » performances. Alors on ajuste son éclairage de présentoir et on met en vitrine son image, recourant à tous les moyens pour se donner du relief et du piquant. Pour justifier son existence et décrocher un permis d’exister.
Alors oui, on nous invite à voir la vie en rose mais finalement le rose qu’on nous propose n’est pas si rose que ça. Un, parce que se voir comme un symbole de beauté ou s’identifier à ses « défauts » physiques revient toujours à se définir par son apparence. Deux, parce que même quand on est encouragée à être « normale » cette normalité est codifiée: il s’agit d’avoir le bon leggings normal, les bonnes chaussures normales et le bon
Mais entre être et paraître, beaucoup ont résolument opté pour la seconde option et, j’ai le regret de dire que (trop) souvent je fais partie de ce lot. Car au 21e siècle, la femme doit encore « souffrir pour être belle », peut-être même plus qu’avant. À ceux qui trouvent que les choses ont changé, dans quel monde é
Je fais 1.60 m pour 130 livres, j’ai des rondeurs et la liste de mes imperfections est infinie mais je suis belle. Pourtant, face à mon reflet dans la glace je me surprends parfois à m’examiner sous le filtre d’un idéal inatteignable, moi aussi, frissonnant de ne pas correspondre aux filles de papier glacé ou de ne pas être assez originale. Je rêve du jour où je pourrai porter ce qui me plait sans me sentir obligée d’obéir aux codes du moment. Du jour où je pourrai choisir la beauté qui me convient à moi, sans ressentir le besoin de recevoir de validations extérieures. Du jour où j’accepterai vraiment qu’être jolie sans être vraie avec
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