À la rencontre des « Père Noël

En Haïti, au-delà du simple fait d’enfiler le traditionnel manteau rouge vif – assorti de hautes bottes noires lustrées, de bonnet, etc. – ces personnages redonnent le sourire aux enfants comme aux adultes, parfois sans être rémunérés, selon les témoignages de deux personnes qui incarnent le Père Noël recueillis par AyiboPost

Après les guirlandes multicolores, les cadeaux et les décorations, la magie de Noël s’opère aussi à travers la bienveillance de ceux qui incarnent, chaque année, le personnage du Père Noël.

En Haïti, au-delà du simple fait d’enfiler le traditionnel manteau rouge vif – assorti de hautes bottes noires lustrées, de bonnet, etc. – ces personnages redonnent le sourire aux enfants comme aux adultes, parfois sans être rémunérés, selon les témoignages de deux personnes qui incarnent le Père Noël recueillis par AyiboPost.

Dans la matinée du 21 décembre 2025, Yves Maky Alcindor reçoit un appel l’invitant à se présenter, en tant que père Noël, aux festivités du Marché de Noël des Gonaïves vers dix heures, dit-il.

Sans tarder, l’homme de 34 ans se prépare puis s’habille méthodiquement grâce à son costume, procuré l’an dernier dans un magasin de la commune de Delmas.

« J’enfile d’abord le pantalon, ensuite les chaussettes qui maintiennent le bas du pantalon, en remplacement des bottes. Ensuite, je mets une paire de chaussures noires, un manteau, la cape puis le chapeau », explique Alcindor, qui est également enseignant au fondamental.

Le but : être prêt en vue de défiler devant des milliers d’enfants de la Cité de l’Indépendance, tous excités à l’idée de voir le personnage.

L’homme fixe sous son chapeau sa grosse perruque blanche, qui lui sert de cheveux, puis une fausse barbe attachée avec un élastique, avant de couronner le tout avec une paire de lunettes, qui se tient droite sur son nez épaté.

Toutefois, quelques pièces de son costume, telles qu’une paire de bottes et une ceinture noire, manquaient en raison d’un retard dans leur livraison cette année.

Ce qui ne l’empêche pas de « prendre la rue à bord d’une motocyclette en mode Père Noël, vers la parade », dit-il d’une voix rieuse au téléphone, dans un entretien accordé à AyiboPost.

« Je le fais à cœur joie, car je sais que je vais mettre le sourire sur le visage des gens », déclare Alcindor qui en est à sa troisième participation en tant que Père Noël au traditionnel marché de noël des Gonaïves.

Une fois sur place, vers onze heures du matin, il commence à défiler en voiture aux côtés des mannequins d’une marque de boisson présente pour l’événement.

« Je saluais les enfants qui étaient aux anges de voir le Père Noël, ainsi que les adultes », se souvient Yves Maky Alcindor.

Arrivé au complexe hôtelier Village des Dattes, vers deux heures, « nous effectuons des séances de photos et d’animation avec les enfants pendant une trentaine de minutes », poursuit l’enseignant.

Ensuite, il confie rejoindre une autre initiative d’une clinique de soins pédiatrique où un groupe d’enfants l’attendait déjà pour recevoir des cadeaux.

Cette journée intense se poursuivra jusqu’à 23 h 30.

****

Alendy Almonor, est psychopédagogue et initiateur de la première édition du marché de Noël du Cap-Haitien.

Toutefois, ces responsabilités ne le prive pas d’accomplir l’une de ces tâches favorites durant l’année, qui consiste à incarner le rôle du Père Noël.

L’homme qui interprète ce personnage depuis 2019 explique « il ne s’agit pas d’une activité que je fais contre une rémunération. L’expérience est toujours positive, et c’est toujours un plaisir. »

Il constate qu’en dépit des situations difficiles que traverse le pays, beaucoup de gens sont toujours attachés au symbolisme du Père Noël.

« Tous ceux qui viennent voir le père Noël le font avec un regard d’enfant », relate Alendy Almonor à AyiboPost.

Il y a des gens de 40 ans qui viennent s’asseoir sur les genoux du Père Noël, se prennent en photo avec lui, et acceptent des cadeaux de ses mains pendant que d’autres jouent ou sautent à la corde. Ce sont des attitudes qui nous rappellent ce que devrait être la vie ordinaire, poursuit Almonor.

Pour lui, « C’est cela, la vraie magie de Noël : aider les gens qui vivent au milieu des turpitudes à redevenir l’enfant qui sommeille en eux. »

Durant l’activité, il s’en souvient des propos qu’une dame de 40 ans l’a confiés, après avoir attendu pendant une heure pour le voir : « La seule raison de ma présence au marché de noël est de voir le père noël, qu’il me prenne sur ses genoux et me donnent des cadeaux », rapporte Alendy.

Après avoir manqué l’occasion à plusieurs reprises, la dame a confié à Almonor qu’elle tenait à vivre cette expérience pour « se sentir humain ».

Bien que ce rôle permette de « mettre la joie au cœur des enfants », l’enseignant Yves Maky Alcindor estime que certains critères sont indispensables pour enfiler ce costume.

« Pour être Père Noël, il faut avoir de l’amour, et la personne ne doit pas être timide », explique l’homme qui évoque d’autres critères physiques comme une forte corpulence.

À défaut, le figurant peut se retrouver dans une situation où elle est obligée de superposer les vêtements, ou de nouer un oreiller sous son manteau pour simuler un embonpoint.

Une astuce qui peut rendre la chaleur insupportable au bout d’un moment, prévient Alcindor.

Pour Alendy Almonor, qui incarnait cette année le rôle du Père Noël au marché de Noël du Cap haitien, cette pratique nécessite même une préparation mentale. « Quand j’enfile le costume, Alendy n’existe plus. Tous mes problèmes doivent attendre que je l’enlève pour refaire surface. »

Il poursuit : « Il faut être patient, tolérant et compréhensif. Car le Père Noël n’a pas le droit d’être en colère contre les enfants ou les parents. »

Et ce, même lorsqu’il y a parfois du désordre lors des distributions de cadeaux, poursuit-il.

« Almonor évoque également l’importance d’une bonne condition physique pour assurer ces tâches, qui durent généralement dix à douze heures.

Il doit, par exemple, soulever des dizaines d’enfants pendant des heures, participer à des séances de football ou encore sauter à la corde avec eux.

Une bonne agilité est aussi nécessaire pour ne pas trébucher sur les enfants qui veulent tous être dans les bras du Père Noël, toucher sa longue barbe ou se prendre en photo avec lui.

Arrivé sur le lieu où on l’attend, Alendy Almonor veille à créer un effet de surprise en apparaissant sans que l’on ne voie d’où il sort, son sac de cadeaux à l’épaule.

Sans oublier le fameux cri joyeux « Ho ! Ho ! Ho ! », lancé par le personnage du Père Noël, attendu par tous les enfants.

« Les enfants croient toujours au Père Noël, à en juger par les nombreuses demandes pour sa présence lors des activités », constate Almonor.

Si certains petits restent timides et évitent de l’approcher, d’autres n’hésitent pas à le solliciter pour obtenir des jouets, tels que des ballons de foot, poupées, etc.

Cette année, il y a des demandes de vœux pour le moins surprenantes, comme celle de cet enfant de neuf ans, explique Almonor, qui m’a demandé : « Peux-tu faire revenir ma mère ? »

Quand je lui ai demandé où était sa maman, l’enfant m’a répondu qu’on lui avait dit qu’elle était morte.

« Là où j’étais assis, cela m’a glacé le sang. Je me suis dit que je ne pouvais pas le laisser partir avec ce poids sur le cœur. Alors, je lui ai dit que sa maman était passée laisser un joli cadeau pour lui », confie le producteur culturel.

Yves Maky Alcindor ne pratique cette activité que par passion pour les enfants, sans détenir de contrats pour ses prestations.

Toutefois, il reçoit de « petites compensations » loin d’être satisfaisantes pour ces journées de travail.

L’homme, qui participe à cinq activités en cette fin d’année, explique : « Il n’y a pas de réelle possibilité ni de demande pour trouver des prestations rémunérées. »

S’il souhaite que, dans les années à venir, tous les magasins de jouets et les soirées de gala lors de la période de Noël fassent appel aux services d’un Père Noël, il suggère aussi que ce travail soit dûment rémunéré.

Par : Jérôme Wendy Norestyl

Couverture |

► AyiboPost s’engage à diffuser des informations précises. Si vous repérez une faute ou une erreur quelconque, merci de nous en informer à l’adresse suivante : hey@ayibopost.com

Gardez contact avec AyiboPost via :

► Notre canal Telegram : cliquez ici

► Notre Channel WhatsApp : cliquez ici

► Notre Communauté WhatsApp : cliquez ici