Dirigeants politiques, commentateurs et analystes, responsables d’organisations et d’organismes de la « société civile », on dirait qu’ils sont nombreux à se contenter de citer le discours convenu de « l’international »
L’un des aspects les plus médiocres de la situation haïtienne, c’est la pauvreté langagière aussi bien dans la description de la réalité que dans la quête pour sa transformation. Il est plus facile de se fâcher contre un compatriote tentant de construire une pensée radicale que de se demander si l’on a les mots justes, à quel discours sur le monde participe le langage qu’on utilise.
Déjà que les mêmes mots ne couvrent pas les mêmes réalités. Le nationalisme de Péralte et de Roumain a-t-il grand-chose à voir avec les nationalismes des extrêmes droites européennes ? Rien à voir.
Des processus et des contextes historiques différents. Mais ensuite, quand les réalités sont les mêmes et que les acteurs ont les mêmes comportements, on n’utilise pas les mêmes mots pour les désigner dans les assemblées internationales, les médias dominants.
Les pouvoirs qui dominent le monde ont produit le langage pour le nommer à leur convenance et l’imposent. Ayons le courage de le dire, l’usage qu’ils font du mot « démocratie » participe de cela. Ils y mettent tout ce qui leur convient, élections truquées, dictatures protégées… Et tout ce qui ne leur convient pas est forcément « anti-démocratique ».
Le terme est-il à rejeter ? Non, mais avec le devoir de penser ce que serait ou sera une véritable démocratie ici, et en pensant aussi les moyens et conditions pour y arriver.
Dirigeants politiques, commentateurs et analystes (quand même moins que les dirigeants), responsables d’organisations et d’organismes de la « société civile », on dirait qu’ils sont nombreux à se contenter de citer le discours convenu de « l’international ». Les mêmes catégories, les mêmes schémas, et en dernière instance les mêmes gaspillages de temps et d’argent.
Rien n’est plus douloureux que d’entendre un Haïtien reprendre le discours d’hommage à la « résilience » haïtienne. Compliment assassin : capacité de survivre dans le pire, de s’y adapter.
On aurait préféré une vertu plus libératrice et une appréciation valorisant plus la rupture que la continuation.
Les merveilleux contresens qu’on nous crache dans la bouche. Un bel exemple : retour à l’ordre constitutionnel quand on réunit une poignée de, je crois en moi pour pondre un projet de constitution en violation flagrante des prescrits de la constitution que l’on croyait en vigueur.
Dans des situations de crise, les vrais leaders n’ânonnent pas. Ils produisent un langage capable de convaincre et fondé sur un sens de l’urgence et de la dignité.
Par : Lyonel Trouillot
Couverture | Port-au-Prince, le 26 juin 2025.—Le Premier ministre Monsieur Alix Didier Fils-Aimé, réuni à l’hôtel Montana, cette rencontre a rassemblé les représentants des partenaires bilatéraux et multilatéraux — États-Unis, Canada, Union européenne, France, Allemagne, Japon, Brésil, Mexique, entre autres — ainsi que les plus hautes autorités de la PNH et les experts du PNUD. Photo : Primature de la République d’Haïti
► AyiboPost s’engage à diffuser des informations précises. Si vous repérez une faute ou une erreur quelconque, merci de nous en informer à l’adresse suivante : hey@ayibopost.com
Gardez contact avec AyiboPost via :
► Notre canal Telegram : cliquez ici
► Notre Channel WhatsApp : cliquez ici
► Notre Communauté WhatsApp : cliquez ici
Comments