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Ambiance et interdits dans la base des Kényans en Haïti

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Les responsables de la mission semblent vouloir éviter les scandales survenus lors de la dernière mission des Nations Unies

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Les 400 officiers kényans déjà en Haïti sont interdits de parler à la presse, de consommer de l’alcool, de s’acheter de la nourriture en dehors de la base ou de quitter la base pour des raisons personnelles, révèle à AyiboPost une source officielle proche de la mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS).

Tout contact individuel avec des personnes extérieures est formellement interdit. Les policiers ne reçoivent pas de visites amicales.

L’utilisation du téléphone portable ne leur est pas interdite.

Mais pour des raisons de sécurité et de confidentialité, les policiers ne sont pas autorisés à publier sur les réseaux sociaux des photos ou des vidéos d’eux en mission, à l’exception de celles qui ont été officiellement diffusées par le bureau de communication, poursuit la source rencontrée par AyiboPost.

Des policiers kényans profitent de leur temps libre dans leur base à Clercine.

Plus d’un mois après le débarquement du premier contingent de Kényans en Haïti, l’insécurité continue de terrasser Port-au-Prince et plusieurs villes de province.

Le gouvernement a décrété un état d’urgence sécuritaire dans quatorze communes des départements de l’Ouest et de l’Artibonite.

Une attaque menée par les bandits de Canaan, dirigée par le dénommé Jeff Gwo Lwa, dans l’après-midi du 6 août sur les communes d’Arcahaie et de Cabaret, a fait une dizaine de morts.

Dans son bilan partiel, présenté quinze jours après cette proclamation, la police haïtienne a annoncé avoir tué 104 bandits et saisi dix-neuf armes et neuf véhicules lors d’opérations menées dans l’Ouest et l’Artibonite.

Durant cette même période, le gang 400 Mawozo a attaqué la commune de Ganthier.

Le 21 juillet, les assauts du gang sur cette commune de 60 000 habitants ont poussé près de 6 000 personnes à fuir leurs maisons.

Plus d’un mois après le débarquement du premier contingent de Kényans en Haïti, l’insécurité continue de terrasser Port-au-Prince et plusieurs villes de province.

D’autres attaques ont eu lieu à Gressier et dans l’Artibonite.

Le 30 juillet, les forces policières haïtiennes et kényanes ont annoncé avoir mené une opération dans la commune de Ganthier pour repousser les bandits.

Un jour après, les gangs sont revenus. Le 04 août, ils incendient un blindé de la PNH, après avoir détruit le commissariat communal une semaine avant.

Le même jour, un bateau partant de Port-au-Prince, transportant des passagers de l’Autorité portuaire nationale à Miragoâne, a été attaqué par des hommes armés.

Deux personnes ont été blessées.

La dernière intervention internationale armée en Haïti avait été menée par les Nations Unies entre 2004 et 2017. Les soldats onusiens ont pacifié provisoirement le pays, mais y ont introduit le choléra, tuant plus de 10 000 citoyens. Ils ont également été impliqués dans des dizaines de cas de violations des droits humains et de violences sexuelles.

Lire aussi : Retour sur 15 années d’échecs de l’ONU en Haïti

La force kényane semble vouloir tirer des leçons de cette intervention.

Un règlement interne prévoit des sanctions comme la suspension, l’isolement, et éventuellement le renvoi définitif au Kenya des contrevenants.

Les policiers participent à des séances de formation intensive régulières et des entraînements conjoints avec la Police nationale d’Haïti (PNH) à l’académie de police.

Les policiers kenyans sont « à fond » dans cette première phase de la mission dite phase de pré-déploiement, qui durera jusqu’en septembre 2024, selon la source officielle.

Un règlement interne prévoit des sanctions comme la suspension, l’isolement, et éventuellement le renvoi définitif au Kenya des contrevenants.

À ce jour, 400 policiers kényans évoluent dans leur base située à Clercine sous le commandement de Godfrey Otunge.

De nouvelles troupes sont attendues à Port-au-Prince dans un contexte où les autorités haïtiennes et kényanes se plaignent du manque de matériels pour ces renforts.

Les préparatifs en vue d’accueillir les nouvelles troupes avancent, selon la source.

La Jamaïque et le Salvador sont parmi les pays qui sont déjà venus en Haïti en prélude du déploiement de leurs policiers dans le pays.

Lire aussi : L’accord complet signé avec le Kenya pour la force multinationale

Les journées de travail sont planifiées un jour à l’avance.

Dans le camp, les troupes sont divisées en sections. Chaque section est dirigée par un commandant.

Le commandant de section est responsable de la planification des journées de ses protégés.

Des cours de créole haïtien et de français, des formations sur les droits humains et de secourisme sont réalisés par des professionnels haïtiens et américains au bénéfice des policiers.

Des officiers kényans passent des examens médicaux pour s’assurer qu’ils sont en pleine forme pour accomplir leurs missions. Un centre hospitalier a été installé pour les urgences et les problèmes de santé courants.

En dehors des hangars, des leçons de conduite ont lieu.

Au Kenya, comme dans plusieurs pays de l’Afrique de l’Est, le volant des voitures est placé à droite, et la conduite se fait donc à gauche des routes, contrairement à Haïti où celui-ci est placé à gauche. « Cela nécessite une adaptation », poursuit la source.

La cuisine à l’intérieur du campement est exclusivement haïtienne : riz et légumes, jus naturel, griyo, bannann…

Aucune spécialité culinaire kényane n’est présente dans le menu, selon la source.

La vie religieuse est une composante valorisée à l’intérieur du campement.

Certains policiers ont apporté leurs bibles en Haïti.

Le révérend anglican, Constable Emmanuel Magut, un des policiers,  assure les cultes tous les dimanches.

Parfois, des religieux de Port-au-Prince viennent organiser des cultes de prière et de prédication au sein de la base les samedis et dimanches.

Visionnez un extrait d’un service dominical dans la base des policiers kényans à Clercine

Les policiers profitent de leur temps libre pour écouter de la musique troubadour haïtienne, du Benga ou du Kapuka, parler avec leurs familles restées au Kenya ou faire de la musculation.

Le Benga et le Kapuka sont des genres musicaux kényans mêlant des éléments de musique traditionnelle avec des influences contemporaines.

Le 30 juillet 2024, un policier kényan a été blessé lors d’un affrontement d’une patrouille kényane avec des individus armés au centre-ville de Port-au-Prince.

« Il se porte de mieux en mieux. Il va pouvoir recommencer à s’entraîner », assure la source à AyiboPost.

Par Wethzer Piercin

Mise à jour de la rédaction: Nous souhaitons préciser que ce sont les Bahamas, et non le Salvador, qui sont en mission d’évaluation en Haïti dans le cadre du déploiement de la force multinationale. Cette précision reflète les dernières informations reçues de notre source. 11.20 22.8.2024

Image de couverture : Des policiers kényans en poste à proximité de l’Ambassade américaine à Tabarre, le 5 juillet 2024. | © Jean Feguens Regala/AyiboPost


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Wethzer Piercin est passionné de journalisme et d'écriture. Il aime tout ce qui est communication numérique. Amoureux de la radio et photographe, il aime explorer les subtilités du monde qui l'entoure.

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