Malgré l’existence du Centre de Facilitation des Investissements depuis treize ans, Haïti est classé parmi les pires pays où il faut investir. La directrice générale explique pourquoi l’impact de l’institution qu’elle dirige est difficilement mesurable.
Jusqu’à présent, le Centre de facilitation des investissements (CFI) n’a pas d’objectifs mesurables définis. Pourquoi ? Parce que le Conseil d’administration -qui doit définir ces objectifs- ne se réunit pas aussi souvent qu’il le devrait. C’est ce qu’affirme la directrice générale de l’institution, Tessa Jacques.
Le Centre de facilitation des investissements est créé en 2006 pour promouvoir l’image d’Haïti à l’étranger et dévoiler les opportunités d’investissement dans le pays. Il est coiffé par un Conseil d’administration composé de dix ministères et autres institutions. Ce Conseil est présidé par le ministre du Commerce.
Sans objectifs mesurables, il est difficile aujourd’hui de mesurer l’impact du CFI sur le climat des affaires dans le pays, reconnaît la directrice. « Il y a eu beaucoup de changements à la tête de l’institution et dans la stratégie gouvernementale pour attirer les investissements. Nous n’avons pas un système pour chiffrer précisément le nombre d’entreprises implantées dans le pays grâce à notre travail », se plaint-elle.
Que fait le CFI entre-temps ?
« Nous participons à plusieurs évènements dans le monde, dédiés aux investissements. Nous établissons des contacts avec de potentiels investisseurs, pour générer de l’intérêt. Si cet intérêt se concrétise, nous accompagnons l’entrepreneur dans toutes les étapes de la création de son entreprise », répond Tessa Jacques.
Il y a encore plus. L’institution implémente actuellement un « Customer Relationship Management ». Selon la directrice, il s’agit d’une technologie qui permettra à l’institution de « déterminer des objectifs, améliorer ses résultats et garder les traces des entreprises avec lesquelles le CFI discute. » Avec ça, le Centre de Facilitation des Investissements peut relancer les entreprises qui n’ont pas répondu favorablement dans un premier temps.
Beaucoup d’incitations, peu d’investisseurs
Le tourisme, l’agriculture, les énergies renouvelables et le BPO, entre autres, sont prioritaires pour l’État haïtien. Ces secteurs sont importants parce qu’ils peuvent créer des milliers d’emplois.
Un entrepreneur qui investit dans l’un de ces secteurs peut bénéficier de plusieurs années d’exonération fiscale et douanière. C’est le Code des investissements qui fixe ces avantages incitatifs. « Nous avons le code d’investissement le plus généreux de la région, affirme Tessa Jacques. Ce code est même trop avantageux à mon goût, quant aux incitatifs qu’il offre. »
Selon la directrice générale, Haïti est encore ouverte aux investissements. La proposition de valeur d’Haïti, c’est-à-dire l’ensemble de raisons pour lesquelles un investisseur aurait intérêt à investir dans le pays, est très riche selon Tessa Jacques Antoine. La position géographique d’Haïti par rapport aux États-Unis, la main-d’œuvre abondante et bon marché sont quelques avantages pour attirer des capitaux étrangers.
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Pourtant, les avantages incitatifs alléchants du code des investissements et la proposition de valeur du pays n’attirent cependant pas beaucoup d’investisseurs. « Il y a trop d’instabilité dans le pays, déplore Tessa Jacques. Les citoyens ont une grande responsabilité. Il est normal de revendiquer certains droits, mais il y a une manière de le faire. De plus, il n’existe pas un réel écosystème entrepreneurial chez nous, poursuit-elle. Le climat des affaires est mauvais. »
Selon le rapport Doing Business 2019, le processus de création d’une entreprise dans le pays dure en moyenne 97 jours. L’investisseur doit passer par douze étapes successives pour compléter son dossier. Le processus dure environ seize jours en République Dominicaine (102e) et ne contient que sept étapes.
La technologie pour améliorer le système
Tessa Jacques Antoine croit qu’il faut créer un guichet unique d’investissement. Toutes les démarches pour monter une entreprise pourraient être réalisées dans un même espace. Ce guichet unique doit être hybride, c’est-à-dire à la fois en ligne et dans un espace physique. « L’étude conceptuelle est déjà faite, assure la directrice. Nous sommes maintenant à la recherche de financement pour réellement mettre le projet en œuvre. J’espère que dans deux ans tout sera prêt ».
Le CFI a élaboré une plateforme en ligne appelée OpenData où des données importantes sur les différents secteurs économiques du pays sont compilées. « Puisque nous sommes à l’ère du numérique, les projets récents du CFI vont dans ce sens. Nous avons aussi développé Haïti Service Providers, en collaboration avec la Chambre de commerce et d’industrie d’Haïti et le PNUD », déclare Tessa Jacques Antoine. HSP est un catalogue de différents fournisseurs de biens et de services en Haïti.
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Haïti est toujours une terre d’opportunités
L’hibiscus ne représente plus le pays à l’international. Le CFI a dévoilé une nouvelle marque au début de l’année et un nouveau slogan « une terre, une âme ».
« Il fallait changer le narratif négatif sur le pays, et le remplacer par une histoire positive, explique la directrice. De plus, l’hibiscus ne représentait qu’un seul secteur, le tourisme. Maintenant, la nouvelle marque peut rassembler tous les secteurs de la vie nationale. Haïti doit être vendue comme le pays où l’on peut forger des opportunités solides ».
La marque pays Haïti a été dévoilée le 24 janvier 2019, dans les jardins du Mupanah.
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