POLITIQUE

Les Kényans disent avoir repris l’hôpital général. Faux, répondent des policiers.

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« À aucun moment, il n’y a eu de policiers kényans présents sur les lieux », tranche un des policiers à AyiboPost

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La force multinationale kényane en Haïti revendique la reprise du contrôle de l’hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH) à Port-au-Prince, dans une publication sur son compte X.

Trois agents de la Police nationale d’Haïti (PNH) — dont deux ayant directement participé aux opérations du 7 juillet 2024 en question — contestent à AyiboPost cette version des faits.

« À aucun moment, il n’y a eu de policiers kényans présents sur les lieux », tranche un des policiers à AyiboPost.

Des policiers haïtiens en opération dans le bas de la ville de Port-au-Prince. | Jean Feguens Regala/AyiboPost

Les liens des différents comptes de réseaux sociaux de la force multinationale ont été partagés par une source officielle de la mission en Haïti rencontrée physiquement par AyiboPost.

Des publications relatives à la mission, telles que les communiqués de presse et les comptes rendus de réunion, sont partagées sur le même compte.

La plus récente publication du 18 juillet des Kényans met en avant les « succès significatifs » et les « avancées importantes » enregistrées par les policiers étrangers depuis leur arrivée dans le pays.

« L’équipe poursuit ses opérations en Haïti après avoir repris le contrôle de l’hôpital public qui était sous le contrôle des gangs », lit-on dans ce communiqué signé par le commandant en chef de la force multinationale, Godfrey Otunge.

Kényans

Note de la MMAS publiée le 18 juillet 202 sur son compte X (Twitter).

Un policier haïtien ayant pris part à l’opération à l’hôpital général dénonce une campagne de désinformation.

L’opération policière à l’hôpital général a été menée par des agents de l’Unité départementale de Maintien de l’Ordre (UDMO), du SWAT, et de la Brigade de Recherche et d’Intervention (BRI) dans la soirée du 7 juillet, selon les trois sources policières, dont un haut cadre de Port-au-Prince.

Le 10 juillet, un média kényan rapporte en premier la participation des Kényans dans cette opération.

« Il s’agissait d’une intervention menée exclusivement par des unités de la PNH », insistent à AyiboPost les deux policiers ayant pris part à l’opération.

« L’espace n’était plus occupé par les bandits à ce moment-là », déclare une des sources, ajoutant que les agents de la police nationale sont rentrés chez eux vers huit heures du soir, après l’opération.

Un policier haïtien ayant pris part à l’opération à l’hôpital général dénonce une campagne de désinformation.

Des dommages matériels ont été observés au plus grand hôpital de Port-au-Prince par les policiers. L’institution ne fonctionne plus depuis plusieurs mois à cause de la violence des gangs.

Questionnée sur les démentis des policiers haïtiens, la source kényane au sein de la mission maintient l’implication des officiers étrangers. « Parfois, vous ne devez pas prendre tout le crédit, dit la source. Cela construit la PNH. Cela les met en avant. »

Des officiels de l’État, dont le Premier ministre Garry Conille, le conseiller présidentiel Louis-Gérald Gilles et le chef de la police, Normil Rameau, ont visité les locaux de l’HUEH au lendemain de l’opération.

Aucune présence kényane n’a été remarquée sur place. Ils n’ont pas non plus été mentionnés dans les annonces subséquentes des autorités haitïennes.

Hier mercredi, une patrouille constituée de policiers haïtiens et kényans s’est rendue au centre-ville de Port-au-Prince dans des véhicules blindés neufs.

Pendant cet exercice, un des véhicules est tombé en panne. La source au sein de la mission explique à AyiboPost qu’il s’agissait d’un problème temporaire de rodage.

Lire aussi : Qu’attendent les Kényans pour agir contre les bandits ?

Dans un message à la nation diffusé la nuit du 15 juillet, le Premier ministre haïtien, Garry Conille, a décrété l’état d’urgence sécuritaire sur quatorze communes contrôlées par les gangs.

Le chef de la Primature a renouvelé la volonté de son gouvernement et celle des forces policières de reprendre graduellement les territoires sous contrôle des gangs.

Questionnée sur les démentis des policiers haïtiens, la source kényane au sein de la mission maintient l’implication des officiers étrangers.

Le 16 juillet, un deuxième contingent de policiers kényans arrive en Haïti, ce qui met leur nombre autour de 400 officiers. Ce débarquement vient après qu’un premier contingent d’un peu plus de 200 officiers est arrivé en Haïti le 25 juin 2024.

Ce deuxième contingent de policiers a quitté Nairobi, la capitale du Kenya, dans un contexte marqué par une grave crise sociopolitique.

Des manifestations parfois violentes s’y déroulent avec pour toile de fond la demande de démission du président William Ruto.

Très contesté, le chef d’État a renvoyé presque l’ensemble de son cabinet cette semaine après avoir fait machine arrière sur une loi de finances décriée.

En parallèle, une équipe constituée de hauts responsables de la Jamaïque est arrivée dans le pays pour effectuer une évaluation préalable au déploiement de leurs policiers qui rejoindront la mission.

Par Widlore Mérancourt & Wethzer Piercin 

Image de couverture éditée par AyiboPost illustrant la reprise contestée de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH) par les Kényans de la MMAS. | © Photos : Jean Feguens Regala/AyiboPost


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Widlore Mérancourt est éditeur en chef d’AyiboPost et contributeur régulier au Washington Post. Il détient une maîtrise en Management des médias de l’Université de Lille et une licence en sciences juridiques. Il a été Content Manager de LoopHaïti.

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