De plus en plus, les bandits, souvent munis d’armes de guerre, s’appuient sur les technologies dans leurs attaques contre la population
Des drones supposément « téléguidés par des bandits » sillonnent régulièrement le Fort National.
Ces patrouilles technologiques sont observées plus de deux semaines après les attaques de la coalition de gangs dénommée « Viv ansanm » contre ce vaste quartier de Port-au-Prince, selon les révélations à AyiboPost d’un agent de la Brigade d’Opération et d’Intervention Départementale (BOID).
Le bourdonnement des objets volants inquiète dans la zone. « Nous faisons tout pour les abattre », confie l’agent de police.
De plus en plus, les bandits, souvent munis d’armes de guerre, s’appuient sur les technologies dans leurs attaques contre la population.
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Lors de l’évasion de la plus importante prison du pays en février 2024, Johnson « André » Izo avait utilisé un drone pour survoler les lieux.
Les autorités haïtiennes font également un usage limité de drones. Cette année, la plupart des drones en leur possession embarquent des explosifs. La police et la force kenyane déclarent ne pas être au courant de ces efforts.
Mais les attaques semblent inquiéter les chefs de gangs dans un contexte où des observateurs disent craindre la menace ouverte des bandits qui disent vouloir eux-aussi utiliser des explosifs.
Durant les assauts de février à Fort-National, les bandits ont envoyé quotidiennement au moins deux drones pour ausculter la zone, selon l’agent de la BOID. « Nous avons réussi à neutraliser deux d’entre eux à grand renfort de balles », témoigne le policier.
Le quartier de Fort-National abrite la base de la BOID et représente un point stratégique donnant accès au Champ-de-Mars, à Nazon, à Lalue et à d’autres localités du bas de la ville de Port-au-Prince depuis le nord-est de la capitale.
Les bandits poursuivent leurs assauts contre la population, forcée de quitter en masse des quartiers autrefois épargnés par la violence au centre-ville. Pour contrer les attaques de drones des autorités et la présence des blindés, les gangs progressent à l’intérieur des maisons en perçant les murs.
Les gangs incendient progressivement les quartiers conquis pour empêcher le retour de la population et y établir des bases pour de nouvelles attaques.
Depuis début mars, ils contrôlent la dernière route terrestre permettant d’entrer dans la capitale à partir du sud-est.
Selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), plus d’un million de personnes sont déplacées à l’intérieur d’Haïti, dans un contexte de crise humanitaire grave et d’une recrudescence des cas de choléra.
Les bandits poursuivent leurs assauts contre la population, forcée de quitter en masse des quartiers autrefois épargnés par la violence au centre-ville. Pour contrer les attaques de drones des autorités et la présence des blindés, les gangs progressent à l’intérieur des maisons en perçant les murs.
Lors de l’attaque de Fort-National en février, les bandits ont incendié plusieurs maisons de la zone.

Des douilles sur une maison à Fort-National, le 20 novembre 2024. Photo: Junior Legrand pour AyiboPost

Des maisons vides à Fort-National après des attaques récurrentes des gangs armés. 20 novembre 2024. Photo: Junior Legrand pour AyiboPost
Joël, un habitant de Fort National, a abandonné sa demeure, comme des centaines de ses voisins, pour se réfugier à Lalue. Les bandits ont incendié sa maison et tout ce qui s’y trouvait.
« Mes efforts de plusieurs années ont été anéantis en quelques minutes. Je n’ai rien pu sauver de cet incendie, hormis les vêtements que je porte », confie-t-il à AyiboPost.
Les gangs pillent, volent et détruisent les biens privés et publics dans les territoires conquis. Mais ils convoitent surtout les commissariats et postes de police.

Une photo du sous-commissariat de Poste-Machand, le 4 mars 2025. Photo: Junior Legrand pour AyiboPost
Selon l’agent de la BOID, la dernière attaque sur Fort-National visait directement la base de cette unité.
« Les bandits ont apporté pour l’attaque des bonbonnes de gaz lacrymogène, des masses et des burins pour percer les murs, ainsi que des cocktails Molotov », confie l’agent de police à AyiboPost.
Les bandits, divisés en plusieurs groupes, ont attaqué la zone à partir du corridor Basquiat et ont investi de nombreux couloirs menant presque tous à la base de la BOID, selon l’agent.
Dépassés et à court de munitions, les policiers ont demandé le renfort de la Direction Départementale de l’Ouest (DDO).
Aidés par des drones, les bandits ont tout de même réussi à assassiner un policier du Bureau de Lutte contre le Trafic de Stupéfiants (BLTS) et au moins trois brigadiers de la zone dans une embuscade, révèle le policier.
Les échos de l’attaque du 20 février 2025 terrorisent les quartiers voisins de Fort-National. De nombreux habitants de Poste-Marchand ont fui leurs maisons depuis.
Zone stratégique, Fort National subit depuis près de deux ans des attaques récurrentes des gangs. Et à chaque fois, des habitants se réfugient dans des camps improvisés à travers la zone métropolitaine ou dorment à la belle étoile sur le bas-côté de quelques rues encore épargnées.
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Un ancien immeuble de Poste Marchand est aujourd’hui en cours d’aménagement en sous-commissariat à l’initiative des forces de l’ordre pour mieux répondre aux attaques des gangs. Une contribution minimale de 250 gourdes est demandée aux riverains pour aider à la finition des travaux.
Il n’est pas clair si la Direction générale de la police soutient la construction de ce nouveau poste de police à Poste-Marchand.
Interrogé par AyiboPost, Lionel Lazarre, porte-parole adjoint de l’institution policière, a réagi : « C’est vous qui m’apprenez cette information. Je ne le savais pas. »
En réalité, de nombreux policiers disent se sentir souvent seuls, sans soutien de la hiérarchie, face aux bandits. « Il se pourrait qu’en haut lieu, on soit au courant, mais moi non. Je ne parle que de ce dont j’ai connaissance », a déclaré Lazarre.
Par Junior Legrand
Couverture | Photo d’un drone accompagné d’un homme cagoulé et armé. Collage Florentz Charles pour AyiboPost – 16 mars 2025
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