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Le sisal d’Haïti, un produit recherché et viable, mais peu exploité

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Une compagnie dans le Nord-Est produit du sisal sur 100 hectares, elle en exporte seize tonnes vers le Salvador tous les deux mois

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Haïti occupait le premier rang des pays exportateurs de sisal en 1952.

Installée à Fort-Liberté, dans le Nord-Est, en 1927, la plantation Dauphin assurait la production de 35 000 tonnes de cette fibre organique.

L’apparition des fibres synthétiques dans les années 1950, la baisse du prix sur le marché international et, plus tard, les crises politiques feront chuter cette production.

En 1951, le sisal représentait 24,4 % de la valeur des exportations haïtiennes, alors qu’en 1953, il atteignait seulement 8,9 %.

Dauphin ferme définitivement ses usines et quitte le pays en 1986.

Mais l’intérêt pour la fibre organique depuis quelques années dans le monde, jugée plus respectueuse de l’environnement, offre une opportunité pour Haïti, selon l’agronome Edson Pierre.

Pierre dirige la North Coast Development Corporation.

Installée à Terrier-Rouge, dans le Nord-Est, cette entreprise produit du sisal depuis 2013.

« Avec des investissements conséquents, c’est un secteur qui peut être très bénéfique pour l’économie du pays », explique Pierre à AyiboPost.

Sisal

Plantation de Sisal de la compagnie North Coast, à Terrier-Rouge.

La compagnie produit du sisal sur 100 hectares, elle en exporte seize tonnes vers le Salvador tous les deux mois.

L’agave sisalana, communément appelé sisal ou « pit », est une plante cultivée pour les fibres extraites de ses feuilles.

Cette fibre, très appréciée dans l’artisanat et l’industrie du textile pour sa solidité, sert à fabriquer des chapeaux, des cordes, des sacs et emballages, des sous-plats et des ficelles agricoles.

North Coast s’intéresse à l’agro-industrie et à d’autres filières génératrices d’emplois.

La compagnie loue des terrains aux paysans de la localité pour une période de dix ans.

Le sisal produit par ces derniers est racheté dans le cadre d’un projet pilote initié en 2016 par le ministère de l’Agriculture, des Ressources naturelles et du Développement rural (MARNDR).

Une trentaine d’employés de l’entreprise gère la production et le traitement du produit.

Sisal

Le sisal est décortiqué avant d’être lavé

À côté du Nord-Est, le sisal est aussi produit dans le Sud et dans l’Artibonite.

Dans le reste du monde, la Tanzanie, le Brésil, Madagascar, la Chine et le Kenya représentent les principaux pays producteurs de cette fibre, selon des statistiques de 2018.

La production mondiale de sisal brut et ses dérivés a été de 59 000 tonnes en 2022.

Avec des investissements conséquents, c’est un secteur qui peut être très bénéfique pour l’économie du pays.

Edson Pierre

Outre son utilisation dans l’industrie textile pour ses fibres, le sisal présente une multitude d’autres facettes exploitables, selon l’agronome Pierre.

Les déchets organiques issus de la feuille de la plante sont utilisés dans la production de biogaz, d’engrais organiques et d’insecticides.

« C’est justement là que nous voulons aller, exploiter toutes les opportunités offertes par cette plante », déclare Pierre.

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La petite industrie renaissante rencontre des difficultés.

Selon l’agronome Pierre, North Coast manque d’équipements.

La main-d’œuvre s’en va. Il demeure difficile de trouver du carburant, ce qui augmente le coût de production.

En 2016, une entreprise du nom de Sisalco, installée dans le parc industriel de Caracol, avait tenté de relancer la production dans le Nord-Est grâce à un financement de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

Équipée de matériels permettant la transformation du sisal, la société Sisalco était le principal client de North Coast.

Sisalco a commencé à réduire ses opérations en 2020, ce qui a conduit à leur cessation définitive en 2021, entraînant une « réorientation stratégique des opérations de North Coast », explique Pierre.

Sisal, North Coast

Le Sisal est placé dans un conteneur avant d’être exporté vers le Salvador

Ellies Etienne collabore avec North Coast depuis 2012.

Une cinquantaine d’autres producteurs comme cet homme de 59 ans assurent la production de sisal sur 57 hectares, vendu à 0,50 dollars américains le kilogramme à North Coast.

« L’argent généré par la vente de sisal me permet de prendre soin de ma famille », confie Etienne à AyiboPost.

Outre le sisal, des agriculteurs tels que Guylaine Mondésir et son époux cultivent également d’autres denrées de subsistance telles que le gombo, l’arachide et le giraumon sur le même terrain.

Grâce à cette production, le couple répond à ses besoins de nourriture et paie la scolarité des enfants.

Au niveau local, bien que de manière très limitée, le sisal est utilisé pour confectionner des cordages et des licols servant à la contention et à l’attache des animaux.

Consciente de l’importance des fibres naturelles utilisées comme matière première renouvelable, l’Organisation des Nations Unies leur a consacré l’année 2009.

« L’industrie du sisal promet beaucoup. Nous faisons en sorte qu’Haïti en profite », conclut Edson Pierre à AyiboPost.

Par Wethzer Piercin

Image de couverture : Un employé de Sisalco, une entreprise installée en 2016 au parc industriel de Caracol pour relancer la production de sisal, mais qui a arrêté ses opérations en 2021. | © Sisalco


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Wethzer Piercin est passionné de journalisme et d'écriture. Il aime tout ce qui est communication numérique. Amoureux de la radio et photographe, il aime explorer les subtilités du monde qui l'entoure.

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