Aujourd’hui, il est recherché pour trafic d’armes par la police nationale d’Haïti. Malgré une plainte déposée contre lui après l’attaque de sa femme, Vundla Sikhumbuzo a continué de jouir de bonnes relations avec l’Église épiscopale
Vundla Sikhumbuzo entame ses relations avec l’Église épiscopale d’Haïti en 2011. Le Zimbabwéen a été nommé dans la sainte église à titre de chef des opérations, un nouveau poste créé pour la gestion de nombreux programmes et activités développés en réponse au séisme du 12 janvier 2010.
Sa principale tâche était de gérer les activités financières, administratives et les ressources humaines du diocèse, tout en assurant la direction de l’ensemble des opérations, des systèmes et des contrôles.
Vundla Sikhumbuzo est titulaire d’un MBA en marketing international et gestion de l’Université internationale des États-Unis à Nairobi, au Kenya. Il parle couramment le français, l’anglais et le swahili.
Selon une source à l’intérieur de l’église épiscopale, les autorités religieuses américaines avaient envoyé Vundla Sikhumbuzo pour aider à freiner les désordres administratifs en cours dans l’église épiscopale d’Haïti.
L’ancien évêque retraité de l’église, monseigneur Ogé Beauvoir, est au courant des irrégularités administratives existants au sein de l’église avant son départ. « Je luttais en exigeant de la discipline et une bonne gestion des biens de l’église, en mettant sur place notamment un système de comptabilité contre les fraudes », a-t-il déclaré hier, lors d’une entrevue téléphonique avec AyiboPost depuis les États-Unis.
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Quand un prêtre a vendu un bien immobilier de l’église de façon irrégulière, monseigneur Beauvoir avait porté plainte auprès de ses supérieurs, mais l’affaire n’a pas fait long feu. « J’étais un trouble-fête, déclare Ogé Beauvoir. Ils ont même essayé d’attenter à ma vie. »
En 2018, Vundla Sikhumbuzo va divorcer d’avec sa femme, la Tchadienne Kassire Hawa Ohrgue, qui s’est plainte d’avoir subi une attaque à l’acide.
« J’ai été attaquée dans ma chambre par le père de mes [trois] enfants en complicité avec mon chauffeur, déclare la dame en 2018 dans TchadInfos. Après être attachée et torturée, on m’avait aspergée d’acide. Après une hospitalisation de 14 jours à médecins sans frontières (MSF), on m’a transférée à Memphis Tennessee (USA) compte tenu du fait de la détérioration de mon état de santé ».
Kassire Hawa Ohrgue a porté plainte en Haïti dès le mois de mai 2017 puis en janvier 2018 contre sieur Sikhumbuzo Vundla de nationalité zimbabwéenne, auteur de son agression, mais aucune suite n’a été donnée.
Dans une lettre ouverte adressée au chef de l’État et à la première dame du Tchad en avril 2018, Kassire Hawa Ohrgue écrit : « Je ne vous demande ni or ni argent, mais votre intervention pour que justice soit faite. Aucune lumière n’a été faite sur l’attaque, je voudrais juste une justice équitable. »
Quelques mois après, soit en septembre 2018, le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince a admis le divorce du couple.
Vundla Sikhumbuzo est renvoyée de son poste de chef des opérations en Haïti par les autorités épiscopales des États-Unis en 2018. Il n’est pas clair si cette décision a été motivée par l’attaque à l’acide. « Il a quitté son poste beaucoup plus corrompu que ceux qu’il était censé venir remettre sur les rails », a déclaré une source bien placée dans l’église.
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La décision de l’église épiscopale des États-Unis n’a pas occasionné une rupture de contact entre l’église en Haïti et Vundla Sikhumbuzo. Au lieu de rentrer aux États-Unis, ce dernier est resté dans le pays. Selon des informations obtenues par AyiboPost, il continue d’utiliser au moins un des matériels appartenant à l’église épiscopale d’Haïti.
En 2020, Vundla Sikhumbuzo est à nouveau embauché par l’église épiscopale pour aider au dédouanement d’un « gros camion » pour les besoins de l’église à La Gonâve.
« Le diocèse d’Haïti a engagé Vundla Sikhumbuzo pour gérer les négociations incroyablement complexes pour faire passer le camion à la douane et l’expédier d’Haïti continentale à La Gonâve », lit-on dans une publication datée de 2021 sur la page lagonavepateners.org. Ce camion avait été acheté dans la ville de Keyser dans l’État de Virginie-Occidentale, aux États-Unis.
Vundla Sikhumbuzo ne s’est pas arrêté là. Il y a un mois et demi, il prend contact avec l’ancien évêque aujourd’hui à la retraite, Ogé Beauvoir pour qu’il fasse jouer « ses multiples contacts à la douane » afin d’aider certains conteneurs destinés à l’église à échapper aux inspections réglementaires. « Je ne peux pas faire ça, l’État ne fait plus ça », a répondu père Ogé Beauvoir.
Depuis le 14 juillet 2022, les autorités policières d’Haïti recherchent Vundla Sikhumbuzo pour son implication présumée dans le trafic illégal d’armes et de munitions après la découverte d’une vingtaine d’armes de guerre, des milliers de cartouches et d’une liasse de dollars américains en faux billets dans deux containers destinés à l’église épiscopale.
En tout, quatre conteneurs destinés à l’Église épiscopale se trouvent à la douane de Port-au-Prince. Les opérations de fouilles se poursuivaient tard dans l’après-midi du vendredi 15 juillet 2022 au niveau des deux autres conteneurs suspects restants.
Vundla Sikhumbuzo n’a pas répondu aux multiples appels d’AyiboPost avant la publication de cet article. Dans un communiqué sorti jeudi, l’église épiscopale dit n’avoir « aucune commande de containeurs et n’avoir entrepris aucune démarche de dédouanement de containers à la douane de Port-au-Prince ». L’institution déclare n’attendre l’arrivage « d’aucun produit en provenance de l’étranger pour aucune de ses institutions diocésaines. »
Avant de rejoindre le diocèse d’Haïti, Vundla Sikhumbuzo a travaillé au Tchad, en Irak, au Kenya, entre autres. Il détient plus de seize ans d’expérience de travail avec des organisations non gouvernementales dont CARE International, World Concern International, Food for the Hungry.
Dans les postes précédents, il était responsable de l’administration publique et des finances, des opérations, de la planification, de la logistique, de la gestion des ressources humaines. Il est basé en Haïti depuis mars 2011, et a déjà travaillé avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).
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