ÉCONOMIE

Haïti doit prioriser la qualité de ses entreprises et non la quantité de Start-ups

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 Scale Up Haïti a réuni différentes composantes de la société qui s’engagent à améliorer des éléments clés de l’écosystème entrepreneurial. L’objectif est de favoriser la croissance  des  entreprises locales à partir de nouvelles approches .

 

Dans la foulée du forum sur la compétitivité et l’investissement organisé en septembre 2017, environ 70 représentants d’organisations non gouvernementales, des secteurs public, privé et universitaire ont participé à un atelier de formation intensif tenu du 12 au 15 septembre. Sous le thème « Favoriser le développement de l’Ecosystème Entrepreneurial pour la croissance économique », différents modules ont été dispensés par les éminents professeurs de Babson College, Daniel Isenberg et Vincent Onyemah.

Tout écosystème entrepreneurial est formé de six éléments clés : le leadership et les politiques, le financement, les infrastructures institutionnelles et physiques, le capital humain, la culture et les marchés. Haïti connait certainement des faiblesses au niveau de ces différentes composantes. Toutefois, ces professeurs nous rappellent que Haïti n’a pas le monopole des obstacles et des lacunes. L’étape la plus importante est le changement drastique de notre mentalité et de notre conception de la croissance. « Let’s focus on Growth, insistent-ils. Growth  happens in many small steps ». 

Reconsidérations pertinentes

Cette formation a permis de remettre en question les mœurs, les certitudes et certaines idées fausses véhiculées au niveau du secteur économique en Haïti et dans le monde.  Expériences et statistiques à l’appui, les professeurs ont démontré l’inefficacité des politiques axées sur la promotion et la création de nouvelles entreprises (start-up) pour une économie compétitive et florissante. La grande quantité de start-up n’est pas un indicateur pertinent pour une économie performante. Mais plutôt le contraire.

L’essentiel est de se focaliser sur  l’accélération de la croissance des entreprises existantes qui ont un certain potentiel. L’application de la règle de 3C (Customer, Capacity, Cash) « Clients, Ressources Humaines, Cash » est un outil qui a fait ses preuves et dont les effets sont ressentis sur le court terme. (Quick Wins). A cette recette, s’ajoute l’importance de communiquer et de célébrer la croissance de ces entreprises pour un impact conséquent sur l’écosystème.

Il existe certains indices clés pour identifier la croissance d’une entreprise: les ventes augmentent, de nouveaux emplois sont créés et de nouveaux marchés sont acquis. Il y a par ailleurs achat de nouveaux équipements ou de nouvelles installations. Pour que la croissance soit contagieuse et effective, les entrepreneurs doivent partager leurs expériences de développement économique. La presse doit relayer ces informations et l’opinion publique doit être réceptive et prête à célébrer les succès des différents acteurs.

La communication au service de la croissance

Dans un pays comme Haïti où les inégalités sociales sont criantes et l’insécurité rampante, le risque semble élevé pour ceux qui publieraient la situation avantageuse de leurs entreprises. Pourtant, c’est une condition sine qua non de la croissance au sein de tout écosystème. L’impact de la communication de la croissance d’une entreprise est multiforme. Non seulement elle sert d’inspiration, mais elle ouvre aussi la porte à diverses opportunités pour ceux qui la partagent et pour ceux qui la reçoivent. C’est un véritable cercle vertueux.

Imaginez qu’une l’entreprise X ajoute deux nouvelles lignes de  production pour desservir de nouveaux marchés. Elle compte importer la matière première dont elle a besoin car il n’y a pas assez de ce produit sur le marché local. Pourtant dans la ville voisine de cette entreprise X, il y a une entreprise Y, qui fabrique cette matière première, mais qui n’arrive pas à augmenter sa production faute de trouver preneur. La communication que ferait l’entreprise X est susceptible de changer la donne pour ces deux acteurs sur le marché.

Si les entrepreneurs communiquent leurs vrais chiffres pour illustrer la croissance de leurs entreprises, ils développeront une attitude responsable et éthique envers le fisc et les autres acteurs de la chaine de valeur. La suspicion quasi automatique sur la fortune des hommes d’affaires se verrait réduite, et ils pourraient être des modèles dignes d’être admirés par la société.

La croissance n’est pas un mythe!

Le cas de Manizales, petite ville de la Colombie qui s’est appropriée le concept de « Scale Up » malgré des défis similaires à ceux confrontés en Haïti, est un fulgurant succès. Si les habitants de cette ville avaient un niveau de vie élevé, ils étaient néanmoins confrontés à un sérieux problème de croissance. Ne créant pas assez d’opportunités d’emplois, Manizales ne pouvait retenir ses étudiants brillants qui migraient vers d’autres régions. Ce qui n’était pas bénéfique pour la ville. Des leaders locaux eurent l’idée d’implémenter une politique entrepreneuriale axée sur la croissance d’entreprise. Les résultats furent impressionnants. Près de vingt-cinq (25) compagnies ont  augmenté leurs ventes de plus de 50%. La croissance locale a ainsi été redynamisée. C’est une preuve que la croissance est normale et possible partout dans le monde.

Au terme de ces trois jours de formation, les participants ont créé dix projets qui doivent se réaliser dans un délai de six mois. L’objectif est d’influencer l’écosystème entrepreneurial et d’accélérer la croissance des entreprises en Haïti. Ils engagent leurs institutions, leurs entreprises, leurs moyens financiers et leur temps pour prouver que tout espoir n’est pas perdu. Scale Up Haiti n’est pas un mythe, cependant le travail sera de longue haleine.

Scale Up Haiti a été réalisé sous le leadership du Ministère de l’Economie et des Finances, de la BRH, et de ses partenaires PADF, BID, le Forum Economique du Secteur Privé, Alpha Haïti, Sa Se Biznis Pam, l’ Association des Entrepreneurs Digicel et  l’ Université Notre Dame d’Haïti.

Très attachée à mon cher pays, je demeure une personnalité ouverte, qui à travers sa profession de juriste et son implication au sein de diverses organisations soutient le projet du renouveau d’Haïti.

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