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Haïti brille à la dixième édition de Little Haiti Book Festival

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Avec un éventail de vendeurs ayant plus que doublé depuis sa création il y a dix ans, le festival propose une sélection de livres aussi variée que le sont les Haïtiens

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Le festival du livre de Little Haiti rassemble les histoires, ceux qui les racontent et ceux qui apprécient l’importance culturelle de la langue parlée et écrite.

Pour la 10e édition de l’événement, le dimanche 5 mai 2024, le Centre culturel de Little Haiti, un espace typiquement au cœur du dynamisme de la communauté haïtienne de Miami, a vu une explosion de diversité, alimentée par une foule bondée et une constellation d’écrivains.

Avec un éventail de vendeurs ayant plus que doublé depuis sa création il y a dix ans, le festival propose une sélection de livres aussi variée que le sont les Haïtiens.

Yvette Leroy, par exemple, qui a publié «Wanègès», est également l’auteur de «Nostalji», un recueil de poésies et de récits, publié en 2016.

Leroy dit qu’elle participe au festival depuis son lancement en 2014 et que l’événement est «extraordinaire» pour la communauté haïtienne.

Assise à côté de Leroy se trouvait Pascale Solages, cofondatrice et coordinatrice générale de l’organisation féministe Nègès Mawon.

Little Haiti Book Festival

Pascale Solages, cofondatrice et coordinatrice générale de Nègès Mawon, au festival du livre de Little Haiti pour son organisation. | © Philippe Henold Buteau/AyiboPost

Solages a assisté au festival du livre pour renforcer les voix féministes parmi les Haïtiens et collecter des fonds pour Nègès Mawon grâce à la vente de quatre de leurs livres. « Rezistans », « Fwontyé », « Fanmi » et « Poko Bout » présentent des œuvres de plusieurs écrivains parmi lesquels Edwidge Danticat.

«Il est important de faire entendre la voix des femmes haïtiennes en Haïti et dans la diaspora», déclare Solages.

Alors qu’Haïti traverse des difficultés – dont une grande partie repose sur la tête, les épaules et la capacité de charge des femmes et des enfants – Jean Th. Lindor était au festival pour son livre « Le Cri du Cœur », un recueil de poèmes.

«Tout le monde doit s’engager avec Haïti pour que le pays brille», dit Lindor, soulignant qu’Haïti est un bon pays plein de richesses.

Haïti traverse ce qui est très probablement sa plus grave crise politique et humanitaire depuis le tremblement de terre dévastateur de 2010.

Il en découle une migration hors du pays, ce qui peut s’avérer problématique pour de nombreuses personnes. Les différences culturelles, l’obligation de se motiver soi-même ainsi que d’autres attentes de la société peuvent constituer un défi à relever pour s’adapter.

Johanne Exilus le sait et a écrit « Révolution » pour aider ses lecteurs à se motiver.

Little Haiti Book Festival

Johanne Exilus, auteur de Révolution, un livre de poésie et de motivation pour ses lecteurs au Little Haiti Book Festival. | © Philippe Henold Buteau/Ayibopost

Il contient des poèmes et Exilus précise que son but est d’aider les lecteurs à sortir de leur zone de confort.

«Le livre vous expliquera comment rester fort et surmonter les défis» propose Exilus.

Explorant les défis auxquels les enfants sont confrontés, Kisha Bazelais affirme que le livre qu’elle a co-écrit avec son mari porte sur l’enseignement de la confiance en soi.

Bazelais dit que le livre « Ayo’s Life Lessons: The Barbershop» a pour but d’apprendre aux enfants à parler d’eux-mêmes. Le salon de coiffure sert de toile de fond.

Akilah Passe et son mari, Max Passe, sont un autre couple marié qui a travaillé ensemble sur un livre. Avec leurs enfants, ils ont créé «Ocean Heroes».

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Les personnages de la couverture – Ethan le protecteur et Alayla la déesse de la mer – sont inspirés sur les enfants d’Akilah et Max. Ethan et Alayla ont également aidé à créer le journal du livre. Selon Akilah, les Noirs doivent être les super-héros et non une réflexion après coup.

« C’est une façon vraiment amusante, fantastique et aventureuse d’intéresser les enfants à la préservation et à la protection des océans », ajoute Akilah.

La protection du patrimoine et de la culture est au centre des deux livres de Djenane Saint Juste : «La Sirène et la Baleine» et « Ti Sonson ak Pouvwa Tanbou ».

« La Sirène et la Baleine » parle de l’île de La Gonave, et « Ti Sonson ak Pouvwa Tanbou » est destiné à célébrer le tambour et le Fort Jacques, un site historique situé dans les montagnes de la capitale.

Saint Juste compare le tambour au premier téléphone portable des Haïtiens.

«[C’était] notre premier outil de communication d’une montagne à l’autre, pour préparer les marrons à la révolution sans que les colonisateurs ne le comprennent», explique Saint Juste.

«Ti Sonson ak Pouvwa Tanbou » comprend également un CD de musique originale, et Saint Juste a travaillé avec des illustrateurs haïtiens pour les illustrations du livre.

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Haïti et la culture haïtienne étant le thème commun du festival du livre signifiaient également que les éléments présentés dans un livre pouvaient être plus importants dans le travail d’un autre auteur.

«Spiritual Fasting » de Langlichmie Normile porte sur la pratique du jeûne dans le vodou.

Dans le livre, Normile explique pourquoi le jeûne est important. Elle aborde également l’importance des vêtements dans le vodou en identifiant la signification des tenues et en donnant un sens à l’utilisation des couleurs.

En se promenant dans le centre culturel de Little Haiti, les participants au festival ont vu plus de couleurs que d’habitude grâce aux chaises de jardin et aux parasols colorés installés dans la cour.

Le festival a été lancé par le propriétaire du Libreri Mapou, Jean Mapou, qui dit avoir lancé le festival pour donner un peu de vie à la communauté car elle se meurt lentement.

«Les développeurs prennent le relais, la culture ici disparaît», confie Mapou.

Le Little Haiti Book Festival est désormais en partenariat avec la Miami Book Fair, qui contribue à l’obtention de subventions. Sur les 10 à 15 vendeurs avec lesquels le festival a débuté, Mapou affirme qu’il y en a cette année plus d’une centaine.

Pendant que les vendeurs de livres attendent patiemment, espérant des acheteurs potentiels dans le foyer situé devant l’auditorium et la place du marché, les vendeurs de nourriture font la queue autour du bâtiment.

Little Haiti Book Festival

Une partie du marché du Centre culturel de Little Haiti où des livres étaient en vente par leurs auteurs. | © Philippe Henold Buteau/AyiboPost

L’événement est truffée de musique. Les vendeurs proposent non seulement des livres et à manger, mais aussi des boissons glacées, des vêtements et des accessoires, du savon, du lait corporel et des produits cosmétiques, ainsi que des peintures.

Dans la salle communautaire, il y a des ateliers et un espace aménagé pour les enfants appelé « l’allée des enfants ».

Selon le commissaire du comté du deuxième arrondissement, Marlein Bastien, le festival est complet.

« Partout où l’on regarde, il y a des activités pour les adultes et les enfants », déclare Bastien à la fin du deuxième des deux forums de discussion qui ont lieu dans l’auditorium.

Le premier forum porte sur l’IA dans les arts et a suscité des mises en garde sur l’effet des préjugés dans le développement de l’IA, où la technologie est principalement développée par des hommes blancs et riches. La prudence concernant la formation d’outils tels que ChatGPT a également été explorée, dans le contexte où des auteurs demandent à ce que leurs œuvres soient retirées et ne soient pas exploitées par les modèles.

Toutefois, l’un des intervenants propose que ChatGPT puisse être utilisé pour ajouter à la voix ou à l’identité de la marque des artistes. ChatGPT est utile, a déclaré un autre intervenant, dans la mesure où il peut capturer le sens littéral des mots, mais ne saurait le faire pour tout ce qui entre dans la composition d’une poésie.

Le deuxième forum met au défi à la fois les intervenants et le public, la discussion portant sur l’honnêteté dans les médias, compte tenu des attentes des lecteurs et auditeurs spécifiques qui ont bouleversé les Haïtiens.

Little Haiti Book Festival

Intervenants du forum Haïti dans les Médias – de gauche à droite – Patrick Eliancy, directeur de l’information d’Island TV ; Elizabeth Guerin, productrice et animatrice de radio et de télévision, copropriétaire d’Island TV, et propriétaire d’ImaginArt Media Productions; et Jafrikayiti, écrivain et animateur de radio.

Jacqueline Charles, correspondante à l’étranger du Miami Herald, a introduit la table ronde en abordant les malheurs auxquels sont confrontés les journalistes locaux en Haïti : l’imprimerie du Nouvelliste attaquée, Radio Caraïbes contrainte de déménager et six journalistes en Haïti tués au cours des trois dernières années.

Les difficultés liées aux reportages locaux – qui s’ajoutent aux informations disponibles pour les organisateurs, les militants et les électeurs – se font ensuite sentir à travers le public qui s’attend à ce que les reportages sur Haïti émanant des médias grand public soient aussi approfondis que ceux dont parlent les Haïtiens.

Charles doit se défendre et rectifier les informations sur le Conseil présidentiel de transition, créé avec un délai de deux ans pour sélectionner un président et un premier ministre et organiser des élections en Haïti, même si la plupart des Haïtiens n’auront pas leur mot à dire sur l’identité du président du Conseil et qu’il n’y aura pas de parlement pendant la période intérimaire.

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Le débat était aussi vivant et sincère que la plupart des discussions politiques impliquant Haïti.

Ensuite, vers la fin du festival, Inez Barlatier s’est produite avec son groupe d’enfants Tati Nuzi and Friends. Barlatier a déjà participé au festival, mais c’était la première fois qu’elle s’est produite en tant que membre d’un groupe d’enfants.

Barlatier dit qu’elle était heureuse d’être là, et que le festival est incroyable pour mettre en valeur les artistes.

« Ce type d’événement nous rappellent à preserver notre patrimoine », a ajouté Barlatier.

Par Philippe Henold Buteau

Image de couverture : Danse et musique à la dixième édition du Little Haiti Book Festival, le 10 mai 2024. | © Miami Book Fair


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Philippe started as a reporter with The Observer, student newspaper for Broward College. It was during the recession of 2007 and a story was about how the college was saving money came after a story about a painter who doubled as a college librarian and he tasked with creating a mural for a public school. As Philippe continued as a journalist for The Beacon of the student media department of Florida International University, an intern for The Sun Sentinel, The Miami Herald and a freelancer with The Miami Times, the importance of the connection with the painter, and the financial decisions of a public college kept up with Philippe's love of storytelling, his curiosity and that there should be accountability for people from marginalized communities.

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