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À quoi sert l’extrait des archives ?

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C’est un document important

L’acte de naissance est un document juridique authentique attestant la naissance d’une personne. Le Code civil, ainsi que d’autres décrets et lois prévoient les formalités relatives à l’obtention de ce document.

L’acte est délivré par un officier d’état civil au déclarant, c’est-à-dire celui qui vient enregistrer la naissance de l’enfant. Il peut s’agir du père, de la mère ou de toute autre personne présente au moment de l’accouchement, accompagnée de deux témoins.

À côté de l’acte de naissance, il y a l’extrait des archives. Selon Jean Simon Saint Hubert, avocat au barreau de Port-au-Prince qui travaille dans le domaine du droit civil, l’extrait des archives est le véritable acte de naissance.

Certaines institutions préfèrent utiliser les extraits, car il est beaucoup plus facile de se procurer un faux acte de naissance qu’un faux extrait des archives.

« Le papier sur lequel est écrit acte de naissance, délivré par l’officier d’état civil, est ce qu’on appelle une expédition. Mais l’extrait d’archives est le produit de l’enregistrement dans le registre, chaque année, par l’officier de l’état civil ».

Selon Marie Sabrina Lazarre, élève avocate au barreau de Port-au-Prince, l’extrait de naissance et l’acte de naissance contiennent les mêmes informations. « Ils sont juridiquement interchangeables, dit-elle. Toutefois, certaines institutions préfèrent utiliser les extraits, car il est beaucoup plus facile de se procurer un faux acte de naissance qu’un faux extrait des archives. »

Obtenir un extrait d’archive

Les articles 35 et suivants du Code civil haïtien régissent les actes de l’état civil. Ils prévoient qu’il y aura dans chaque commune « un registre tenu en double, pour chaque espèce d’acte de l’état civil. » Ainsi, il n’y a pas que l’extrait de naissance qui peut être délivré par les archives nationales, mais aussi tous les actes de l’état civil : acte de mariage, acte de décès, acte de divorce, etc.

« Les données de l’état civil sont enregistrées à l’office de l’état dans un cahier de l’enregistrement, dont un exemplaire est transféré chaque année au bureau des archives nationales, chargé de donner suite aux demandes des extraits d’archives », explique Me Saint-Hubert.

Marlee est une employée dans une succursale des archives nationales. Elle a demandé l’anonymat parce qu’elle ne parle pas au nom de l’institution. Elle explique le processus pour l’obtention d’un extrait. Il est en réalité simple. « Il faut adresser une demande aux archives nationales, avec la copie de l’acte en question et une somme de 700 gourdes. Un délai sera communiqué à la personne. Une fois ce délai arrivé, la personne peut passer récupérer son extrait. » Ce délai est de quinze jours.

Des difficultés courantes

Même si le processus paraît simple, il n’est pas toujours facile de se procurer un extrait. Les raisons sont diverses. Jessie Félix se souvient avoir fait la demande de ce document en 2015. Elle en avait besoin pour intégrer une entité de l’université d’État d’Haïti. Passé le délai de quinze jours, elle n’a pas obtenu son papier. Ses parents ont eu recours aux services d’un ami qui a facilité l’obtention du document.

Selon Marlee, plusieurs raisons peuvent expliquer un retard dans la délibération des extraits. Parfois, lorsque l’état n’a pas payé leur salaire à temps, les employés peuvent décider de ne pas travailler. « C’est l’un des principaux moyens de pression utilisés à l’intérieur de nos bureaux », avoue l’employée.

Mais il arrive aussi que certaines fois l’office de l’état civil qui a délivré une expédition à la personne comme acte de l’enregistrement de la déclaration de naissance n’ait pas enregistré cette déclaration dans le cahier d’enregistrement. À ce moment, la déclaration de naissance n’est pas rétractable aux cahiers d’enregistrement, parce qu’elle n’est tout simplement pas là.

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Des agences ou des tierces personnes offrent aussi des services de demande d’extraits. Parmi elles, il y a les démarcheurs qui chargent une somme qui peut varier, pour faciliter l’obtention du document. Souvent, cette somme dépasse le double du prix normal, entre 1 250 gourdes et 1 500 gourdes. Mais souvent le délai est moins long.

Jerry Jules est enseignant au nouveau secondaire. Il est aussi un démarcheur en extraits d’archives. Selon lui, il n’y a pas de grande différence entre le service qu’offrent les agences, et celui offert par les démarcheurs.

Mais parfois, il admet qu’il doit recourir aux services d’un ‘contact’, généralement un employé des archives. « Parfois, ce n’est rien de grave et le problème est résolu rapidement. Certaines fois aussi, il y a d’autres démarches que je dois entreprendre avant de pouvoir obtenir les extraits, il me le fait savoir et je m’exécute. »

Légaliser le document

Mais c’est pour légaliser le document que les prix peuvent grimper un peu plus. Selon l’avocat Saint Hubert, la légalisation permet de vérifier l’authenticité de l’acte de naissance, l’extrait d’archives certifiant que la déclaration de naissance de la personne a été enregistrée au bureau des archives nationales.

Normalement, pour légaliser le document, il faut se rendre à la DGI, pour se procurer un timbre. Pour chaque légalisation que requiert le document, on doit se munir d’un timbre distinct. Par exemple, un document qui doit être légalisé dans deux ministères aura besoin de deux timbres différents.

En plus de cabinets d’avocats, des fondés de pouvoir ou de jeunes étudiants finissants en droit, pour le compte d’agences qui n’ont ni local ni autorisation légale de fonctionnement, proposent des services d’accompagnement dans l’acquisition du document légalisé.

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Un étudiant en droit, responsable de l’une de ces agences, qui n’a pas voulu révéler son nom, affirme : « On procède par contact. Parfois on n’a même pas besoin d’acheter de timbres à la DGI. On donne le document au contact, moyennant un paiement au-dessus du tarif habituel, et il nous rend le document légalisé dans un délai beaucoup plus court que la démarche normale. »

Normalement, l’institution en question ne devrait pas charger de frais, car c’est la DGI qui collecte les taxes pour l’État. « Parfois, on n’a même pas l’intention de passer à côté pour obtenir le service, mais ce sont les employés qui nous le proposent. »

Selon Mario Smith Joseph, démarcheur et étudiant en troisième année à l’École de Droit des Gonaïves, la légalisation est importante. C’est ce qu’il a compris, d’après son expérience. « Le consulat d’Haïti en terre étrangère exige que l’acte en votre possession soit enregistré en Haïti, dit-il. L’extrait délibéré par la greffe du tribunal de première instance ou par les archives nationales certifie que l’acte a été enregistré. Mais, la légalisation de cet acte est requise pour l’utiliser à l’extérieur. Il faut l’acheminer au ministère des Affaires étrangères. Ce ministère a une liste de signatures validées par les consulats haïtiens. »

Phillerque Hyppolite

Phillerque Hyppolite est journaliste et étudiante en sciences juridiques à la Faculté de Droit et des Sciences Économiques de Port-au-Prince. Femme engagée dans la lutte pour les droits humains, elle prête actuellement sa plume à AyiboPost

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