POLITIQUE

Soulèvement national contre Ariel Henry

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Depuis hier lundi, la situation demeure tendue dans la capitale haïtienne et dans des villes de province

 Le 22 août marque l’anniversaire de la cérémonie du Bois Caïman, considérée comme la pierre angulaire de la révolution de Saint-Domingue. En 2022, cette date a été utilisée par des milliers de citoyens pour exprimer leur ras-le-bol face à la situation sociopolitique et économique du pays.

La colère a gagné principalement Cap-Haïtien, Petit-Goâve, Gonaïves, les Cayes et Port-au-Prince. Les citoyens de ces villes ont exigé à la fois le départ du Premier ministre de facto Ariel Henry et l’amélioration des conditions de vie dans le pays. Les protestations se sont poursuivies notamment aux Cayes ce 23 aout.

« Je ne peux pas continuer à vivre dans une situation pareille, s’est plaint à Port-au-Prince, Fritz Gérald, un militant s’identifiant au Mouvement de Liberté, d’égalité des Haïtiens pour la fraternité (Moleghaf). Ma famille croupit dans la misère », a déclaré le trentenaire.

La rentrée des classes préoccupe une bonne partie des manifestants. C’est le cas d’un homme d’une cinquantaine d’années rencontré à Lalue qui n’a pas voulu s’identifier. « Je n’ai encore rien préparé pour mes enfants pour l’ouverture de l’année scolaire et je ne sais pas à quel saint m’adresser », a-t-il dit.

Les figures de proue de la classe politique n’étaient pas remarquées dans la foule. Magalie Habitant, connue pour sa proximité avec Jovenel Moïse, a voulu participer au mouvement. Elle a été chahutée et chassée. N’était-ce pas la vigilance des forces de l’ordre, elle aurait pu laisser sa peau.

Les protestataires ont parcouru plusieurs artères de la capitale avec des banderoles comme : « Leve kanpe pou yon lòt endepandans ». Ils ont dénoncé le silence des autorités face à la montée du dollar américain, l’augmentation vertigineuse du prix des produits pétroliers et alimentaires.

La dernière mobilisation contre Ariel Henry remonte au 29 mars 2022, à l’initiative du Collectif 4 décembre.

Jean Robert Argant, coordonnateur du Collectif, appuie le mouvement lancé par le peuple.

« La population est en train de faire face à un gouvernement qui n’est pas à la hauteur pour assurer à bien la gouvernance du pays, déclare Argant. Nous avons affaire à une incompétence flagrante d’un Premier ministre sur la gestion de notre pays et ceci met en péril tout ce que le pays possède et qui nous identifie comme haïtiens ».

Au moins un mort a été enregistré lors des mobilisations à Port-au-Prince. La manifestation lancée dans le Nord hier lundi à l’initiative du parti politique Pitit Dessalines de Moïse Jean Charles Parti s’est déroulée sans incident majeur.

Les protestataires vêtus en noir et rouge ont menacé sur leur parcours de mettre le feu dans les banques commerciales en cas de non-baisse de la toute-puissance du dollar par rapport à la gourde.

Parallèlement, la Banque de la République d’Haïti (BRH) a hier annoncé qu’elle va déverser sur le marché des changes entre 100 et 150 millions de dollars pour tenter de redresser l’économie.

Selon les experts, la stabilisation — même temporaire — du taux de change ne veut pas dire que les problèmes économiques profonds du pays sont adressés.

Molière Adely a participé à ce reportage.

Couverture : Johnson Sabin / Ritzau Scanpix

Fenel Pélissier est avocat au Barreau de Petit-Goâve, professeur de langues vivantes et passionné de littérature.

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