POLITIQUE

Que savons-nous du journal qui aurait révélé l’implication de Claude Joseph dans la mort du président ?

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Selon une journaliste colombienne, qui a notamment travaillé à France 24 Espagnol, certains journalistes d’investigation fiables, qui ont un bon accès aux sources, travaillent à Noticias Caracol

L’enquête sur l’assassinat de Jovenel Moise ne manque pas de rebondissements. Plusieurs équipes tentent de comprendre les événements et découvrir ce qui s’est passé exactement. La Colombie, pays très impliqué à cause de la nationalité de la majorité des présumés assassins, a envoyé des enquêteurs. Les États-Unis ont des agents sur place. La police nationale d’Haïti, sans compter le soutien d’Interpol, est aussi à pied d’œuvre.

Malgré la présence de toutes ces équipes, le puzzle peine à se reconstruire. Mais, pour Noticias Caracol, un journal colombien, ce casse-tête chinois a commencé à prendre forme. La cellule d’investigation de ce journal assure que selon des témoignages de trois Colombiens, et aussi selon des détails de l’enquête qu’ils ont pu consulter, le Premier ministre a.i. Claude Joseph serait le principal auteur intellectuel du crime. Il existerait des images, ainsi que des appels téléphoniques qui lient Joseph aux mercenaires. Le plan, selon Noticias Caracol, était de le mettre à la tête de l’État après avoir arrêté Jovenel Moïse.

Toutefois, toujours selon des témoignages dont le journal aurait eu connaissance, Claude Joseph a décidé de changer l’arrestation en assassinat, au dernier moment.

Cette information, non verifiée indépendamment par AyiboPost, a fait l’effet d’une bombe. Elle est partagée à tout va sur les réseaux sociaux, et a été reprise par des médias comme Listin Diario en République Dominicaine.

« Écoutez, je pense que ceux qui ont tué le président (…) ont la capacité d’étouffer l’affaire », a déclaré Claude Joseph, la soirée même, à un journaliste du Washington Post.

Quelques heures après, la police nationale d’Haïti s’est empressée de démentir ces allégations dans un communiqué. La police colombienne, par la voix de son directeur général le commandant Jorge Luis Vargas, a assuré que pour le moment, le nom du Premier ministre par intérim n’est pas cité dans l’enquête.

Cependant dans un dernier article sorti après que la police ait nié les déclarations de Noticias Caracol, le journal a réitéré ses accusations, affirmant que « les autorités de plusieurs pays, dont Haïti, ont reçu des témoignages qui mentionnent la supposée implication du Premier ministre dans le complot. Le journal n’a pas oublié de préciser que le Premier ministre ad intérim est aussi le chef du Conseil supérieur de la Police nationale, comme pour dire que le démenti de la PNH peut être expliqué par rapport à cela.

Une source d’AyiboPost auprès de cette affaire a fait référence à la position des autorités policières colombiennes.

El Tiempo, le journal le plus diffusé en Colombie, a pour sa part rapporté qu’une source américaine proche de l’enquête a assuré que le Premier ministre ferait partie de l’enquête.

Selon une journaliste colombienne contactée par AyiboPost, qui a notamment travaillé à France 24 Espagnol, certains journalistes d’investigation fiables, qui ont un bon accès aux sources, travaillent à Noticias Caracol. Ce journal télévisé fait partie d’un groupe, Caracol TV, qui a plusieurs ramifications. En plus de Noticias Caracol, le groupe responsable de Caracol TV exploite aussi une radio, qui serait parmi les plus écoutées en Colombie.

Noticias Caracol est une émission colombienne très suivie, et aussi sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, plus de neuf millions d’abonnés sont connectés à ce journal dont le compte a été créé en 2008. Sur Facebook, la page compte plus de six millions d’abonnés. Quoiqu’il en soit, pour le moment, à part quelques médias haïtiens et dominicains, la nouvelle n’est pas reprise à l’international.

« En plein cœur d’un évènement aussi inattendu, c’est normal que tout un flot d’informations nous arrive, déclare Yvens Rumbold, spécialiste en communication. Il faut que les gens soient extrêmement prudents parce que l’on se trouve au tout début d’une enquête, et en ce moment, les informations qui nous arrivent ne sont pas la vérité. Elles peuvent nous conduire à la vérité, mais ce n’est pas encore le cas. »

Des observateurs pointent également des points à éclaircir dans l’article de Noticias Caracol. Par exemple, la planification pour l’évènement macabre aurait commencé en 2020. Mais à cette époque, Claude Joseph n’était que ministre des Affaires étrangères. Il deviendra Premier ministre ad interim en avril dernier. Il n’est pas clair comment il aurait pu s’installer  président de la République à l’époque du supposé démarrage des opérations de l’assassinat.

« Ceux qui ont commis l’acte vont sortir des informations pour brouiller les pistes, analyse Yvens Rumbold. Ceux qui sont contre, qui sont partisans d’un camp ou l’autre vont sortir des informations pour confondre les gens. La désinformation c’est un laboratoire. Il faut toujours remettre en question ce qui nous arrive, toujours. »

Le FBI n’a pas encore apporté de démenti aux déclarations de Noticias Caracol pour le moment. Les révélations de ce journal, si elles sont avérées, sont le dernier épisode d’un long feuilleton à rebondissements autour de la mort de Jovenel Moise, assassiné depuis plus de huit jours.

Widlore Mérancourt a participé à ce reportage. 

Journaliste. Éditeur à AyiboPost. Juste un humain qui questionne ses origines, sa place, sa route et sa destination. Surtout sa destination.

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