J’ai longuement réfléchi avant d’écrire ce texte. Je ne voulais point être une personne de plus jasant sur les problèmes du pays via les réseaux sociaux à coup de hashtag « #Haiti », « #PwoblemPapFini. » Car au fond, je suis bien consciente que des palabres du genre pullulent depuis des décennies et que cela n’a rien changé à la situation de notre société. J’ai essayé de faire preuve d’un optimisme tragique, je voulais croire au changement et à l’amélioration de ce pays. Je voulais personnellement faire partie de ce changement. Mais je suis arrivée au moment où je dois vraiment regarder la réalité en face.
Je n’écris pas ces lignes pour vous inciter à prendre ce ton tragique si propre à nos concitoyens pour parler encore et encore des maux qui nous rongent sans pour autant trouver une solution tangible à nos problèmes. Je remplis ces pages blanches avec toute mon amertume, toute mon exaspération et toute la fougue de ma jeunesse pour tenter de vous réveiller de votre sommeil comateux !
Le pays est dans la merde. Ne prenez pas un air offusqué, car je n’ai nullement l’intention, ni l’envie de mâcher mes mots. Nous avons suffisamment joué la politique de l’autruche. Oui, nous avons suffisamment fait semblant. Il est temps que chacun d’entre nous fasse preuve d’assez de courage pour affronter tous nos vieux démons. Arrêtons d’ajouter des ‘’ filter’’ à notre réalité et à tout ce qui est en train de se passer autour de nous. Et parlons franc. Parlons cru, sans faire de chichi, de l’état dans lequel nous avons mis notre société.
Nous sommes tous responsables. Et vous savez pourquoi ? Parce que nous n’avons jamais su apprendre correctement notre histoire, ni tirer des leçons de nos Héros de l’indépendance. Nous prenons plaisir à glorifier notre passé, à parler de cette perle des Antilles que nous avions été sans prendre le temps de réfléchir aux nombreuses erreurs qui ont été commises, aux séquelles, aux traumatismes du système colonialiste que nous portons toujours en nous, et ceci 2 siècles après notre indépendance.
« L’union fait la force » n’est-ce pas ? L’union des noirs et des mulâtres ? Mais, au début il n’y a jamais eu de véritable union ! Il y a eu un arrangement tactique entre deux castes sociales qui voulaient se débarrasser du colon. Deux castes sociales qui secrètement voulaient régner l’une sur l’autre après cette indépendance. Vous vous rappelez du Pont rouge ? De la scission ? Et que dire des discours actuels ? «wòch lan dlo pral konen doulè wòch nan solèy»; et plus récemment, « Dessalines pral kay Petion »?
Voici notre principal problème: notre pays n’a jamais été bâti sur une véritable entente. Haïti est formé d’individus traumatisés du système esclavagiste portant en eux qu’un seul désir : vouloir ressembler au maitre. Vouloir imposer sa suprématie à l’autre. Il faut pouvoir affronter cette psychose pour finalement tourner la page.
Le pays en a assez de ces questions de couleurs, de préjugés. Oui, Haïti en a assez des personnes cupides voulant uniquement se remplir les poches avec ce désir instinctif de « paraitre » pour ressembler à leur oppresseur. Il est temps d’y mettre un terme. Il est temps de faire la paix avec notre passé et nous-même. Et le moment est surtout venu que l’on ne fasse pas de la politique uniquement pour fanfaronner, mais apporter des solutions aux crises économico-politico-sociales que traverse ce pays.
Notre société a besoin d’une véritable éducation. Une éducation morale, civique mais aussi culturelle. Il faut aussi comprendre qu’Haïti ne peut uniquement avoir la politique comme centre d’intérêt, mais également l’environnement et la santé. Pourquoi ne pas profiter du post-Matthew pour relancer notre économie agricole ? Pourquoi ne pas restructurer le budget de l’état en diminuant les dépenses inutiles pour redynamiser notre système sanitaire qui est complètement inexistant en ce moment ? Pourquoi ne pas encourager beaucoup plus les petites entreprises, subventionner des projets pour diminuer le chômage et essayer de redonner à notre gourde une certaine valeur ?
Pourquoi ne pas prioriser des systèmes de formation professionnelle, de dons de matériels de travail auprès de l’international ? Au lieu de privilégier le gaspillage d’argent de nos chers pays amis ? 1 dollars us équivaut à 68 gourdes. Nos hôpitaux publics sont à nouveau en grève. Les simples loisirs deviennent un luxe. La classe moyenne n’existe pratiquement plus. La crise électorale persiste.
Oh que oui cela dérange ! Cela dérange énormément !
Et il faut savoir le dire à haute voix pour finalement crever l’abcès et réfléchir de façon intelligente pour apporter ce changement dont tout le monde a besoin. J’en ai ras-le-bol de la situation du pays. Et je sais que vous qui lisez ce texte partagez également ce sentiment. Mais il faut à présent agir. Il faut arrêter de penser qu’à soi et finalement « penser pays ». J’ai soulevé des problèmes, j’ai tenté d’apporter des explications et même des solutions.
De grâce, faites-en de même. Sispann toupizi peyi m!
Milady Auguste
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