Cette construction nationale implique de faire avec tous ceux et celles qui la veulent et sont prêts à s’y engager. Ils sont plus nombreux qu’on ne le pense
L’urgence me semble de trouver les termes d’un discours national. Et de constituer une force suffisamment transversale pour le porter.
Nous allons, c’est inévitable, vers des élections. Aucune force politique ne pourra gagner seule. Avec qui parler ? Avec qui s’entendre ? Autour de quoi ? Le front à constituer, sans prétendre faire l’économie des conflits de classe et de la différence des idéologies politiques, ne peut être aujourd’hui qu’un front national.
Pour constituer ce front, il faudra oser penser les possibilités et les limites du moment historico-politique et historico-éthique que nous vivons. Construire une radicalité sur fond d’humilité. La radicalité : s’opposer à tout ce qui ne va pas dans le sens d’une construction nationale. L’humilité : faire avec tout ce qui va dans ce sens.
En comprenant bien sûr que la construction nationale ne peut se faire sans le minimum d’égalité qu’on n’a jamais su établir dans ce pays.
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A-t-on suffisamment poussé la radicalité jusqu’à se demander de quoi 1806 est-il le nom ? A-t-on suffisamment, à part quelques chercheurs dont les travaux restent de salutaires exceptions, quels ont été tout le long de notre histoire les rapports entre l’État et la nation ? Nous avons fui tant de questions, pactisé avec tant de routines du pire…
Il faut oser cette radicalité de principe proposée dans la constitution de 1987 vers une république sociale, garder en tête le préambule de cette Constitution, l’un des rares documents politiques portant l’idée d’un pays habitable pour tous.
Nous avons fui tant de questions, pactisé avec tant de routines du pire…
Oser cette radicalité, c’est aussi faire preuve d’humilité. Cette construction nationale implique de faire avec tous ceux et celles qui la veulent et sont prêts à s’y engager. Ils sont plus nombreux qu’on ne le pense. Avec les contradictions dues à l’origine, au parcours, aux idées et réflexes auxquels ils ont été exposés, et plus encore aux idées auxquelles ils n’ont pas été exposés. Le patriotisme, c’est un espace de contradictions, ses expressions sont variées, et personne aujourd’hui ne peut prétendre en avoir le monopole.
Il y a certes ceux que des pratiques criminelles et la défense d’intérêts privés irréconciliables avec ceux de la nation excluent d’une telle démarche. Il y a aussi ceux qu’une idéologie fondée sur un individualisme opposé à toute éthique républicaine ou sur des préjugés indécrottables exclut. Mais il y a, avec des parcours différents, des gens de bonne volonté qui arrivent par des chemins multiples à cette nécessité d’une construction républicaine habitable. Comme ce fut le cas à la fin du 19e siècle et au début du 20e.
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Radicalité et humilité pour un ensemble citoyen dans le sens d’une construction nationale. Avec de vieilles figures incarnant depuis longtemps ce rêve. (Arrêtons de dire et de croire que tous ceux qui sont sur la scène politique sont vils et corrompus). Et sans doute de nouvelles. (Arrêtons de croire que ce pays a épuisé son fond de bonne volonté et de sentiment patriotique).
Par Lyonel Trouillot
Image de couverture éditée par AyiboPost, illustrant certains moments de trouble dans le pays ces dernières années.
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