On va finir par arriver à ce moment où il faudra que les politiques haïtiennes offrent des propositions de transformation et de gestion au pays
Un Conseil qui se fait attendre. Pas par tous. L’idée de faire appel à un juge de la Cour de cassation — sans séduire, rien ne peut séduire dans une pareille conjoncture — semble à un grand nombre de citoyens plus simple, plus facile à mettre en place, et moins risquée politiquement. Selon eux, elle garantirait une plus grande neutralité que ce Conseil sous forme de partage politique et dont certaines des «obligations» semblent encore dictées par les puissances internationales ayant conduit à cet effondrement du politique. Lequel Conseil fait en plus une grande place aux PHTK sous les multiples formes, faux regroupements et dénominations qu’il a pu se trouver tantôt par ruse, tantôt pas les luttes internes pour profiter du pouvoir.
La violence qui perdure. Incendies. Assassinats. Échanges entre policiers et bandits. Les victimes de ces échanges, tuées par les balles des deux camps. Des deux camps. Ce qui est inacceptable de la part de la police. Et aussi des exactions commises par des policiers profitant du désordre pour régler des comptes et augmenter leurs revenus. La corruption, l’arbitraire, la police n’en est pas exempt. Cela veut-il dire que tous les policiers sont des corrompus ? Bien sûr que non. Dans ce processus de destruction des institutions haïtiennes, les policiers et les fonctionnaires honnêtes sont des victimes. Pourtant, dans le processus de relèvement, ils devront jouer un rôle majeur. On ne pourra mettre en place et conduire à son aboutissement un processus de restitution de la souveraineté politique sans eux.
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La pauvreté et la précarité qui augmentent.
La production d’une pensée politique, économique et sociale qui n’est pas favorisée par une conjoncture qui condamne à être dans le présent. Dans l’instant. La survie jusqu’au lendemain. On va finir par arriver à ce moment où il faudra que les politiques haïtiennes offrent des propositions de transformation et de gestion au pays. Seront-elles prêtes ? Ou se retrouveront-elles dans la position de ce chef d’État qui, le soir de son élection, demandait à son directeur de cabinet : «Qu’allons-nous faire pour eux» ?
Le mouvement visible. La jeunesse entre la fuite et la radicalisation des discours revendicatifs ou le parti pris individualiste. La multiplication de nouvelles organisations qui dénoncent, revendiquent. Ce qu’elles valent. Le nombre réel. La fuite vers l’ailleurs (momentanément arrêtée sauf pour les fils de riches qu’on emmène par bateau ou par hélicoptère de membres). La pensée derrière les slogans. Des points de vue authentiques ou une stratégie pour se faire remarquer et virer par la suite. Nouveaux SDP ou véritable radicalisme. Nul ne sait.
Quelques ministres qui osent encore radoter. Faire comme si. La rumeur est qu’il en est qui voudraient que le Conseil ou le futur de gouvernement provisoire les garde. Ils ont si bien servi la patrie. Dans ce temps qui court arrêté, patauge dans l’urgence et la lenteur, perdure aussi le sans-gêne.
Par Lyonel Trouillot
Image de couverture : des gens fuient la violence des gangs à Port-au-Prince en mars 2024. | © Jean Feguens Regala/AyiboPost
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