SOCIÉTÉ

L’eau douce consommée en Haïti dépend des bassins versants qui sont fortement dégradés

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Il est estimé qu’en 2050 près de 6 humains sur 10 manqueront d’eau au moins un mois par an. Comme l’eau que nous buvons dépend beaucoup des bassins versants, il est important de comprendre leur fonctionnement afin de mieux les protéger. L’agronome Arnold Affricot nous aide à mieux comprendre les enjeux.

Lorsqu’il pleut, l’eau de pluie ruisselle sur les pentes d’un bassin versant. Ce sont les eaux de ruissellement. Il y a aussi les eaux d’infiltration, qui pénètrent le sol. Le bassin versant est donc un élément important dans le circuit de l’eau. Il peut être défini comme l’ensemble d’une surface géographique qui reçoit les eaux qui s’en vont naturellement vers un fleuve, une rivière, une ravine ou une nappe d’eau souterraine. Une montagne est généralement le point de départ de l’écosystème d’un bassin versant. Elle peut être alors divisée en plusieurs bassins qui à leur tour peuvent être subdivisés en sous-bassins.

On recense 30 bassins versants principaux en Haïti. Chacun de ces bassins est unique par sa forme, son orientation, le relief, la nature du sol etc. Le plus grand est celui de l’Artibonite qui couvre une superficie d’environ 6 345 km2. Ce bassin est important pour la culture du riz, denrée principale produite dans ce département. Le plus petit bassin versant est celui de l’île de la Tortue qui totalise 179 km2. Sur les 30 bassins versants du pays, il n’y en a que 7 qui ont une superficie de plus de 1000 km2. On parle d’unité hydrographique quand on regroupe plusieurs bassins versants d’une même zone.

Important pour la faune et la flore

Les bassins versants jouent un grand rôle dans l’écosystème et dans l’économie du pays, selon Arnold Affricot. La majeure partie de l’eau douce du pays, qui sera ensuite transformée en eau potable, dépend des cours d’eau générés et régulés par le bassin versant. Le développement de plusieurs espèces d’animaux et de végétaux est aussi favorisé par les bassins.

Quand il pleut, l’eau qui coule en amont sur les pentes du bassin emporte avec elle de la terre. En aval, ces particules de terre vont s’amasser en couches successives. C’est ce qu’on appelle la sédimentation ; ces sédiments aident à la fertilité des sols. Les paysans dépendent beaucoup de ces ressources ; ils peuvent ainsi exploiter les forêts et les sols agricoles.

Beaucoup de sites touristiques haïtiens sont constitués de paysages naturels et d’éléments culturels situés dans des bassins versants, par exemple la Citadelle Laferrière.

De grands défis pour les aménager

« Il n’existe pas de politique publique adéquate pour la gestion des bassins versants. Les lois sur l’environnement et l’insécurité foncière sont faibles. L’État ne dispose pas d’un plan d’aménagement du territoire centré sur les bassins versants », déplore l’agronome Affricot.

La multiplication des constructions anarchiques dans les mornes, le déboisement et certaines pratiques agricoles inadaptées sont aussi des menaces pour le bon fonctionnement de l’écosystème des bassins versants.

Le changement climatique n’est pas en reste. Le cycle des pluies est modifié. Nous assistons à des pluies torrentielles suivies de sécheresse prolongée. Les rivières, les lacs, les mers, qui recueillent l’eau des bassins versants se dégradent à un rythme accéléré.

Plus de 75 % des terres d’Haïti devraient être des forêts, compte tenu de la raideur des pentes des montagnes. Mais ces pentes sont soit construites anarchiquement, soit mises sous culture sans contrôle. Cela les expose à l’érosion et au manque d’eau. Quand les bassins versants ne sont pas aménagés, les eaux de ruissellement emportent avec elles de la terre qui se déverse dans les cours d’eau en aval du bassin. Cela conduit à une pollution de la mer, qui a un impact négatif sur la pêche, entre autres.

Quelles solutions ?

Pour la gestion des bassins versants, Arnold Affricot croit que les solutions doivent tenir compte des moyens d’existence des populations locales.

Il faut encourager une agriculture qui conserve les sols, et aussi développer le tourisme écologique, c’est-à-dire plus centré sur la nature. Si les habitants des zones rurales vivent du tourisme, la coupe anarchique de bois peut diminuer.

La protection des pentes des montagnes peut se réaliser grâce à des techniques qui ralentissent l’érosion et favorisent la restauration de la couverture végétale.

Photo couverture: Comité interministériel d’aménagement du territoire 

Journaliste. Éditeur à AyiboPost. Juste un humain qui questionne ses origines, sa place, sa route et sa destination. Surtout sa destination.

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