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La bavure de trop: la PNH doit nettoyer ses rangs !

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OPINION. Une vidéo amateur prise lors de la grande journée de manifestation contre la corruption du 9 juin montre des policiers d’une cruauté exceptionnelle à Pernier (Pétion-ville)! Ces policiers zélés, oubliant qu’ils font partie du peuple, qu’ils viennent des entrailles de ce pays, piétinent toute notion de droits humains pour s’en prendre à un manifestant étendu au sol. La méthode est criminelle, barbare, analogue à celle des bandits qui règlent des comptes sans égard à l’humanité de leurs adversaires. Or il ne s’agissait pas ici d’une lutte entre bandits.

Que des policiers décident de disperser une manifestation parce que la hiérarchie policière le veut en dépit du droit qu’ont les Haïtiens de manifester est inconcevable. Que des policiers lapident crûment un manifestant qui jouit d’un droit constitutionnel est totalement inacceptable ! Dans les deux cas, ces agents des forces de l’ordre sont en train de saper la base de confiance indispensable entre l’institution et la population.

Le pays ne peut pas, ne peut plus, accepter ces genres d’accrocs aux libertés fondamentales des Haïtiens. Quelle que soit la circonstance, un policier se doit de protéger la vie de tous : celle du président Jovenel Moïse et ses acolytes, et davantage celle de tout individu lambda. Car le salaire des policiers ne dépend nullement de la bonne volonté de Jovenel Moïse et de son administration, mais de tout citoyen haïtien payant leurs taxes et trimant pour une vie meilleure.

Il est intolérable, inacceptable, impensable qu’une police non militaire (et même lorsqu’elle le serait) emploie des méthodes aussi criminelles pour protéger des chefs dont la gronde populaire réclame la démission. Les chefs passeront, mais les institutions resteront. Haïti restera. À chaque fois que des policiers commettent de telles bavures, ils ne font que ternir l’image d’une institution régalienne dont la bonne marche, le développement et le financement dépendent des civils, des jeunes d’aujourd’hui qui enregistrent, notent, photographient tout et qui deviendront les dirigeants de demain.

Cette enquête doit aboutir !

Le Directeur général de la Police, Michel-Ange Gédéon, a annoncé sur Twitter que l’institution va ouvrir une enquête. Dans le communiqué de la PNH, le DG explique : «  l’Inspection générale de la PNH a été instruite pour diligenter une enquête afin d’identifier le ou les policiers suspects et appliquer la loi et les règlements de l’institution jusqu’à la dernière rigueur. Ils seront remis à la justice conformément à la loi.»

Le communiqué prouve que la Direction de la police reconnaît la gravité de l’acte, mais souvent les enquêtes de police en Haïti restent au stade de promesses. Face à la flagrance des faits et la portée de l’acte, la PNH doit annoncer à la population haïtienne l’arrestation et la révocation de ces deux individus postés dans la zone de résidence du président et les remettre à la justice. Ce n’est pas la mer à boire. Il est très facile pour la police d’identifier qui était posté où. Il n’y a pas deux polices.

Aucune loi n’autorise des policiers à tirer à balles réelles sur des manifestants, encore moins à lapider de pierres un manifestant blessé et inoffensif, et le traîner comme un animal sans vie. Cet acte dépasse tout entendement. Pas besoin d’être expert en criminologie pour déceler une attitude criminelle indigne de l’institution policière.

Protéger la confiance de la population envers la PNH  

Il est temps que la police élimine les mauvaises graines de ses rangs si elle veut être du bon côté de l’histoire, garder la confiance de la population et remplir dignement ses fonctions. Il est temps que les fils et les filles du pays cessent de subir les traitements que des bandits leur infligent, qu’ils soient du rang de la police, à La Saline, ou sur la Route Nationale #1.

En octobre 2018, une enquête de la police avait été annoncée après les brutalités et décès enregistrés lors de la marche des #PetroChallengers et d’autres citoyens opposés à ce gouvernement. Pourtant, jusqu’à date, les résultats sont encore attendus. Ce qui s’est passé le 9 juin lors de la grande journée de manifestation des #Petrochallengers contre la corruption ne doit pas rester impuni. Les citoyens qui ont perdu leur vie sous les balles assassines de quiconque doivent trouver justice. Une seule victime, dans ce pays où la misère bat son plein, est une victime de trop !

Le DG de la PNH doit bien savoir que maintenir la confiance d’une population envers sa police prend du temps. Le pouvoir d’Aristide avait détruit toute confiance dans la police avant son départ en février 2004. Nous avons vu comment la population s’est retournée contre l’institution sans aucun mot d’ordre avec des barricades dans toutes les rues. Les policiers doivent comprendre que les luttes ne sont jamais contre eux, mais contre le système de corruption qui tient ce pays en otage.

Il a fallu du temps pour que la police regagne cette confiance… fragile. Sans elle, la police ne pourra pas remplir sa mission de protéger, servir et poursuivre les bandits. C’est une responsabilité historique qu’a Monsieur Gédéon de montrer à la population de quel côté de l’histoire il veut être et une responsabilité professionnelle de réparer toute entorse à la confiance entre la population et l’institution qu’il dirige. Si même les bandits dans les quartiers populaires gagnent la confiance des gens en « investissant » dans les communautés, que ne devrait pas faire la police pour sauvegarder une confiance pareille ?

Yvens Rumbold

Twitter : YRumbold

 

Contributeur Ayibopost

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