Le responsable de la Fondation « Avenir » était passé Chita pale avec AyiboPost, le mois dernier. Extraits choisis de cette entrevue
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« Je ne suis pas candidat. Je ne suis pas encore convaincu de ma candidature. Il faut une acceptation et aussi, il faut que les conditions politiques soient réunies pour que je puisse l’envisager, ce qui n’est pas encore le cas. Devenir candidat est beaucoup plus sérieux que ça. Il ne se résume pas à ce qu’en pense ou ce que souhaite une ou deux personnes », déclarait Etzer Emile, lors d’un Chita pale à AyiboPost le 20 février dernier.
Toutefois, l’économiste estime qu’il y a une nécessité pour les jeunes de s’engager politiquement, de pousser plus de gens à s’impliquer. « Les questions politiques et économiques sont des questions d’intérêts. L’inflation de la gourde, les décisions politiques et leurs retombées, les crises politiques sont déterminantes dans la vie de demain. »
« Je ne suis pas toujours d’accord quand on m’appelle jeune. Je ne veux pas être catégorisée ou alors avoir l’impression de jouer en deuxième division. Je suis un citoyen normal. Pour moi, il ne devrait pas y avoir de différence entre un jeune de 18 ans et un autre de 70 ans », affirme-t-il.
« Beaucoup de gens ont tendance à croire qu’être jeune vous rend honnête, ou alors fait de vous une meilleure personne que celui qui est beaucoup plus âgé. Ce n’est en aucun cas vrai. L’échec collectif du pays ne veut pas forcément dire que chacun des citoyens est mauvais. Il y a eu des gens honnêtes dans les générations passées. »
« Le renouveau que nous devons faire, nous devons le faire avec de bonnes personnes. Et ils ne seront pas forcément jeunes. »
« Lorsque vous êtes un professionnel et que vous vivez des situations de crise, cela agit sur votre mental et votre carrière dans tous les sens. 40 % de la population est confrontée à un stress dû aux soucis alimentaires. Mais ce n’est pas seulement la misère de la population qui a augmenté, il y a aussi l’insécurité. Le dernier bilan de NOU PAP DÒMI sur la question s’est avéré beaucoup plus grand qu’en 2004 qui a été considérée comme l’année la plus meurtrière qu’Haïti ait connue au cours des dernières décennies. »
« Haïti est plongé dans une situation sans précédent, une situation pratiquement invivable qui montre de façon évidente que ceux qui dirigent le pays n’en ont pas la capacité. Et ce n’est pas sans raison que beaucoup de jeunes quittent le pays. Ceux qui restent n’en ont pas vraiment envie, ils n’ont peut-être pas encore les moyens, ou alors pensent qu’ils seront beaucoup mieux ici qu’ailleurs. »
« Le pays est totalement effondré, rien ne fonctionne, des zones sont devenues infréquentables. Mais ce qui dérange le plus, c’est qu’à entendre le discours de ceux qui en ont la direction, on pourrait croire que tout va bien. C’est une situation sans issue pour demain qui met des gens comme moi mal à l’aise. »
« Nous sommes dans une crise constitutionnelle. La situation est cynique. Les gens utilisent le mal pour en acquérir un bien. Businessman, politicien et autres. Des gens créent du désordre pour que d’autres puissent payer, de façon à faire cesser le désordre. »
« Le plus grand mensonge qui fait la une depuis le début du mandat de Jovenel Moïse, c’est de faire croire que les oligarques et les fortunés en ont après le président. Pour la première fois, aucune chambre de commerce ne s’est positionnée politiquement. Ce n’est pas un hasard si aucune note n’a été écrite pour constater la fin du mandat de Jovenel Moise. »
« Ceux qui ont de l’argent ne sont pas en face du président. La majorité d’entre eux sont avec lui, et ceux qui ne le sont pas ont peur de lui. Il essaie effectivement de remplacer quelques secteurs, mais toujours par les gens du même secteur. Il y a quelques individus qui ont des contentieux politiques avec le président, mais ils ne font pas partie des plus riches. »
« Le secteur privé n’est pas seul. Il suit la position des ambassades les plus influentes. Tant que leurs intérêts économiques ne sont pas menacés, ils ne se sentent pas concernés alors ils ne se prononcent pas sur la politique. »
« L’un des éléments constituants du problème haïtien découle de sa relation avec l’étranger. La colonialité est permanente dans nos rapports, nos écoles, et bien d’autres. L’État haïtien n’a pas toujours eu la fonction de développement. S’il n’est pas défini à cette fin, il ne peut pas aboutir à ce résultat. »
« 200 ans après, le schéma fonctionnel de l’État demeure le même. La population rurale est totalement délaissée et les villes sont surpeuplées. Il en résulte une désarticulation. L’état doit être redéfini et sa fonction aussi. »
« Je n’ai jamais vu par exemple aucune formulation d’une politique de l’emploi, encore moins un focus systématique sur la question fondamentale qui m’intéresse comme économiste, à savoir comment créer la richesse. »
« Le pouvoir est utilisé comme fin et non comme moyen. Il faut redéfinir les rapports entre l’État et la population. On n’a pas besoin de réforme en Haïti, on a besoin d’une révolution. L’État haïtien est pris en otage par un groupe politique qui s’est allié à un groupe économique et le meilleur moment pour le voir, c’est la période des élections. »
« Ce n’est pas sans raison que la participation aux élections a chuté au fils des ans. Les personnages politiques ont perdu leur légitimité et inspirent de moins en moins confiance. Or, lorsqu’il y a élections, notre faible participation facilite la fraude. Il nous faut rompre avec cette pratique. Il faut un groupe de gens prêts à s’engager. »
« Sortir de cette impasse demande beaucoup. En dehors de toute légalité, tout est à envisager. Les dirigeants n’ont pas les mêmes objectifs que les citoyens. Tandis que nous combattons la misère et l’insécurité, le président s’occupe des élections, de la constitution et de l’énergie. »
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