Début mai, l’artiste Fatima Altieri a signé son premier album à Pétionville. Face à un public restreint, la chanteuse accompagnée de cinq musiciens, 3 danseurs, a livré une prestation remarquable pendant deux heures sur la scène de Fubar.
« Enspirasyon » est le titre de ce disque coproduit par Samy Beatz et Jael Auguste, sur lequel a collaboré le rappeur Trouble Boy. Il comporte 12 titres dont Silwèt, Avè w m ta ye et Dènye fwa. Celui-ci interroge la violence faite aux femmes dans les relations de couple.
Dènye fwa : entre ressentiment et dénonciation
Classée en 6e position sur l’album, la chanson « Denyè fwa » porte la signature de Trouble Boy et de Fatima. Elle soulève un problème récurrent qui ronge la société haïtienne : la question de la violence conjugale.
D’entrée de jeu, la chanteuse évoque deux faits qui avaient marqué l’actualité socio-politique haïtienne l’an dernier : l’affaire de Nice Simon, la maire principale de la commune de Tabarre qui a été victime de violence de la part de son conjoint. Et celle de Marlène Colin, une jeune fille de Jacmel âgée d’environ 30 ans, sauvagement assassinée par son partenaire.
« Se dènye fwa ou leve men sou mwen,
dènye fwa ou fè moun ap trip sou mwen
Se dènye fwa ou leve men nan figi m » chante la jeune artiste qui ne cesse d’augmenter sa côte de popularité dans le monde musical haïtien depuis la sortie du tube « nou paka ansanm » qu’elle a interprété en duo avec Trouble Boy.
Fatima n’attend pas une seconde fois
La chanteuse invite la femme à agir au premier coup subi afin d’éviter que cela devienne une habitude. De son avis, les mêmes actes peuvent se reproduire à l’avenir. « Li pap yon abitid, m p ap pran l dezyèm fwa ». D’où la nécessité de passer à l’action, de rompre la relation en cas de violation de son intégrité physique. « Li lè pou tout fanm ayisyèn di nou pap pran yon lòt Nice Simon », clame-t-elle en exigeant simultanément son respect en tant qu’être humain, en tant que femme.
La dénonciation de Fatima ne s’arrête pas au rapport des deux conjoint-es dans la sphère familiale. Elle s’étend aussi dans l’espace public. Sa chanson intitulée « Dènye fwa » cible les autorités judiciaires qui maintes fois classent les dossiers de femme victime dans la longue série « l’enquête se poursuit ».
Entre ressentiment et colère, Fatima rompt le silence autour des actes de violence dont les femmes font l’objet. Dans sa démarche, même sa famille a été pointée du doigt. Lors de sa prestation, la jeune chanteuse s’en est prise également à son père pour avoir frappé sa mère dans le passé. Son acte est très courageux dans la mesure où il invite à un dépassement de soi. Nombreux sont les cas de violence étouffés pour des motifs liés au secret familial.
La lutte contre la violence faite aux femmes nécessite-t-elle des actions similaires à celle de Fatima ?
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