La professionnelle admet son implication, mais affirme qu’elle ne connaissait pas le contenu des conteneurs, remplis d’armes de guerre
Les conteneurs sont destinés à l’Église épiscopale. Ils proviennent de la compagnie Alliance International Shipping LLC, créée à Miami en 2015 et dirigée par Michèle Corvington Moraille et Gregory Moraille, selon une base de données publiques.
D’après les documents de douanes, les containeurs contiennent « des donations » et ne peuvent être revendus. Mais à l’intérieur des énormes boîtes rouges, une cargaison surprise accueille les autorités douanières le 14 juillet 2022 : 18 armes de guerre, 4 pistolets de calibre 9 millimètres, 14 646 cartouches, 140 chargeurs, un viseur et 50 000 dollars américains en faux billets.
L’Église épiscopale prend ses distances avec la cargaison peu sainte, dans un contexte d’accélération de l’insécurité en Haïti. Mais Gina J. L. Rolls, le « broker », présentée par le commissaire du gouvernement comme la personne habituelle quand il s’agit de dédouaner des colis pour l’église, admet dans une entrevue avec AyiboPost jeudi soir avoir effectivement fait les démarches nécessaires pour les conteneurs illégaux.
« Le conteneur ne m’est pas destiné, a-t-elle déclaré au téléphone. Je signe parce que je suis broker, je fais un travail administratif. »
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Le broker est un agent chargé du processus de dédouanement pour un client importateur. C’est lui qui devrait recevoir du shipper, la personne qui envoie le colis, la liste de l’ensemble des éléments que contient le conteneur. C’est à l’aide de ce document que le broker va initier des démarches de dédouanement.
L’Église Épiscopale d’Haïti nie son implication dans ce dossier à travers un communiqué sorti hier 14 juillet. « L’Église Épiscopale d’Haïti n’attend l’arrivage d’aucun produit en provenance de l’étranger pour aucune de ses institutions diocésaines », lit-on dans ce document.
Gina J. L. Rolls refuse de donner plus de détails sur son client, importateur d’armes. « Mon avocat est en train de travailler sur le dossier. Je ne peux rien ajouter de plus », lâche Rolls.
Alliance international Shipping LLC doit être en mesure d’expliquer qui leur a confié le conteneur contenant les armes. Pour une exportation de ce genre, il faut légalement un permis spécial des autorités américaines. Dans une note transférée à AyiboPost ce 15 juillet, Eric Carré, comptable logistique de la compagnie, declare qu’ils ne peuvent pas divulguer des informations spécifiques sur les clients.
« Comprenez qu’aucun des conteneurs n’est jamais chargé par Alliance, continue Eric Carré. Nous fournissons les conteneurs vides et les services de camionnage à nos clients pour la livraison et le ramassage. Ces clients chargent les conteneurs vides, les scellent et nous appellent pour le ramassage. »
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Selon une source proche de Gina J. L. Rolls, elle a repris la compagnie de « brockage » d’un membre de sa famille décédée.
Contacté par AyiboPost, le commissaire du gouvernement informe n’avoir pas encore invité Gina J. L. Rolls et l’Église épiscopale dans le cadre de cette affaire. Le zimbabweyen, Vundla Sikhumbuzo, 57 ans et ancien employé de l’Église Épiscopale d’Haïti selon le monseigneur à la retraite Ogé Beauvoir, se trouve dans le collimateur de la justice dans le cadre de ce dossier.
Le colis illicite importé au nom de l’Église Épiscopale d’Haïti représente la troisième cargaison d’armes et de munitions saisies par les agents douaniers et la police nationale d’Haïti pour ce mois de juillet. Ces saisies surviennent après la révocation spectaculaire de l’ancien directeur général des douanes, Romel Bell au début du mois de juillet 2022.
Cet article a été mis à jour avec la réaction de la compagnie Alliance international Shipping LLC. 11.35 15.07.2022
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