Il faudra, dans la (re)construction de ce pays, faire des choix lucides : sortir de l’immobilisme et des prétentions statutaires de quelques gérontes fatigués et faire une place méritée aux jeunes
Dans la vie politique haïtienne, deux idéologies du pouvoir, apparemment opposées, mais également inefficaces : le jeunisme et la gérontocratie.
Le premier est plus évident, le second plus pernicieux. Le jeunisme : il y aurait un échec collectif des « générations précédentes » (comme si tous leurs membres se ressemblent et toutes les pratiques se valent) à quoi s’opposeraient des qualités intrinsèques de la jeunesse : le dynamisme, la pureté, l’innocence, l’inventivité… Le second, il y aurait une légitimité de l’expérience, un savoir-faire supposé, conféré par l’âge et le fait « d’avoir été là ».
Chez les « jeunes », croire que tout ce qui nous précède n’avait qu’une fonction qui serait de conduire à nous, et se complaire dans l’ignorance et la négation de tout savoir et savoir-faire produit avant nous. Chez les « vieux », justifier une présence sans efficacité transformatrice par une revendication statutaire et au nom d’une expérience élue synonyme de savoir-faire.
Chez les chauves ni chez les imberbes, il faut voir les pratiques, sur quoi elles se fondent et vers quoi elles tendent. Il y a des jeunes, à droite, bien plus vieux que Leslie Manigat, à gauche, bien plus vieux que René Théodore. Et il y a des vieux qui n’ont pas participé à l’effondrement de la pensée politique et à la criminalisation de la vie politique. C’est sur les pratiques qu’il faut juger.
Cela peut faire rire quand on entend des propos du genre : « laissez les (vieux) politiques s’occuper de la politique » Pour ce qu’ils en ont fait depuis le temps qu’ils prétendent s’en occuper. Cela peut aussi faire rire d’entendre : « place aux jeunes ». Quand on y pense, le PHTK est en grande partie affaire de jeunes qui, avec la même avidité que certains de leurs aînés, ont considéré le pouvoir politique comme source d’enrichissement personnel et de transfert de classe.
Le jeunisme n’est pas en soi porteur d’idées nouvelles ni d’une conscience de classe allant dans le sens de la transformation des rapports sociaux en faveur des masses. De même son ancêtre, le conservatisme, dans sa peur des idées nouvelles et de la montée de nouvelles figures n’est que volonté de reproduction de la réaction intellectuelle !
Quand on y pense, le PHTK est en grande partie affaire de jeunes qui, avec la même avidité que certains de leurs aînés, ont considéré le pouvoir politique comme source d’enrichissement personnel et de transfert de classe.
Il faudra, dans la (re)construction de ce pays, faire des choix lucides : sortir de l’immobilisme et des prétentions statutaires de quelques gérontes fatigués et faire une place méritée aux jeunes.
Pour sortir ce pays de ce merdier, il faut penser une alliance entre les représentants et représentantes des forces progressistes, tous âges confondus. C’est d’une telle alliance que les forces réactionnaires ne veulent pas. En misant d’un côté sur le conservatisme de ceux qui ne savent pas se retirer et s’accrochent à leurs petits privilèges statutaires, et de l’autre sur le « je veux tout tout de suite » de jeunes gens en mal de réussite personnelle.
Le jeunisme n’est pas en soi porteur d’idées nouvelles ni d’une conscience de classe allant dans le sens de la transformation des rapports sociaux en faveur des masses. De même son ancêtre, le conservatisme, dans sa peur des idées nouvelles et de la montée de nouvelles figures n’est que volonté de reproduction de la réaction intellectuelle !
Place aux jeunes, oui, porteurs de propositions et animateurs d’activités allant dans le sens de la transformation des rapports sociaux dans le sens des intérêts de la majorité. Place aux vieux qui restent jeunes en croyant encore en un avenir meilleur pour tous et les plus défavorisés en particulier, et mettent leur expérience de lutte et la force de leur conviction au service de la cause haïtienne.
Par : Lyonel Trouillot
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