Le souhait que les jeunes revisitent son œuvre, sa pensée, son action : Jacques Stephen Alexis, dirigeant politique, penseur et créateur de génie, porteur de l’espérance d’une Haïti et d’un monde faits de justice sociale, homme de haute stature
Soixante-quatre ans de cela mourait un homme dont la mort faisait peur à ses assassins. Fait exceptionnel dans l’histoire d’un pouvoir qui conjuguait aux yeux du monde le verbe tuer à voix haute, la dictature des Duvalier n’avait pas osé signer son crime.
Alexis, c’était trop. On ne pouvait pas déclarer avoir tué tout cela en même temps : un romancier d’un réalisme rigoureux doublé d’un conteur à la langue envoûtante ; un intellectuel marxiste, mais résolument haïtien, voyant le marxisme comme outil pour transformer la société ; un penseur voulant (ré)concilier culture savante et culture populaire ; un jeune homme exerçant un charisme sans égal sur ses contemporains et les plus jeunes ; un descendant de l’empereur Jacques 1er, fils de l’Artibonite sacré dont il fera quasiment un personnage de ses romans ; une figure de la dignité, un homme debout n’ayant jamais tremblé devant qui que ce soit dans la défense de ses convictions.
Un tel homme, même le pire de ses ennemis ne pouvait se vanter de l’avoir tué.
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Pourtant, son œuvre littéraire peu lue des jeunes, malgré quelques rééditions. Quelques hommages, les uns sérieux et dignes, les autres fourre-tout et n’importe quoi. Comme si on pouvait parler de l’œuvre littéraire d’Alexis en la vidant du rapport dialectique entre esthétique et réalité sociale.
Sa pensée de théoricien de la culture, de la politique, les pistes qu’il propose pour un marxisme haïtien, sa passion pour les classes défavorisées, non comme une abstraction qu’on connaît dans les livres, mais dans leur vraie vie, injuste, inacceptable, qu’il ne cesse de dénoncer, tout cela semble bien absent de la vie politique actuelle.
On voit des gens qui se sont réclamés de lui se battre pour un coin de pouvoir dans des exécutifs condamnés à la répression des aspirations populaires. On entend des gens qui se sont réclamés de lui parler de tout : de la forme que doit prendre le pouvoir, du partage des profits de transitions sans fin, mais pas de la condition des masses populaires ni de la transformation de cette condition.
Un tel homme, même le pire de ses ennemis ne pouvait se vanter de l’avoir tué.
On voit et on entend des gens qui se sont réclamés de lui se ranger sur la position des ambassades, obéir au diktat des puissances étrangères. Et cette sensibilité à la condition populaire omniprésente dans ses romans ne se retrouve que dans quelques livres.
Le souhait que les jeunes revisitent son œuvre, sa pensée, son action : Jacques Stephen Alexis, dirigeant politique, penseur et créateur de génie, porteur de l’espérance d’une Haïti et d’un monde faits de justice sociale, homme de haute stature.
Par : Lyonel Trouillot
Couverture | Photo du neurologue, écrivain, homme politique, Jacques Stéphen Alexis. Photo : DR ( Source : Memoire esclavage )
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