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Haïti perd le Dr Nathalie Laurent, abattue par les bandits

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 Dr Nathalie Laurent a tragiquement perdu la vie à un moment où le pays manque cruellement de personnel de santé

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Des bandits lourdement armés semaient le chaos à Delmas 28 le weekend du 3 mars.

Pour fuir la tempête de balles, un couple s’enfuit en urgence à Delmas 31.

Alors qu’ils s’empressaient de regagner leur logis de secours le lundi 4 mars, plusieurs balles tirées par un bandit traversent leur voiture à Delmas 24.

Grièvement atteinte à l’abdomen, la dame, Nathalie Laurent, est transportée en urgence à l’hôpital Bernard Mevs : le centre était fermé.

La famille court vers l’hôpital OFATMA à Cité-Militaire. Mais l’anesthésiste qui devait en toute urgence arriver à l’hôpital pour permettre l’intervention chirurgicale a dû rebrousser chemin, à cause des tirs nourris survenus à la route de l’aéroport.

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Après maintes démarches, la victime est transférée d’urgence au sein d’une autre structure sanitaire à Fragneau-Ville.

Mais après neuf jours d’hospitalisation, son combat pour la vie s’est achevé le 12 mars 2024 : la jeune médecin, Nathalie Laurent, est morte.

Dr Nathalie Laurent

Dr Nathalie Laurent

«C’est une épreuve insupportable que d’assister à la perte d’un être cher devant ses propres yeux, impuissant», déclare à AyiboPost Jean Rosvald Laurent, époux de la victime.

Médecin au Grace Children’s Hospital de Delmas 31, Nathalie Laurent refusait toujours de quitter son pays. Ceci « l’a tragiquement exposé à l’insécurité », déclare son mari.

Après neuf jours d’hospitalisation, son combat pour la vie s’est achevé le 12 mars 2024 : la jeune médecin, Nathalie Laurent, est morte.

Née aux Gonaïves en 1977, Laurent a consacré près de seize années de sa vie professionnelle à servir Haïti.

Unique enfant de sa famille, elle a complété ses études secondaires dans sa ville natale avant de poursuivre des études supérieures à la Faculté de Médecine de l’Université Lumière à Port-au-Prince entre 1997 et 2004.

En décembre 2013, Laurent épouse l’avocat Jean Rosvald Laurent, membre du barreau de l’ordre des avocats de Mirebalais.

Ses engagements professionnels sont multiples. Laurent a par exemple travaillé au Centre de Traitement du Choléra (CTC) de Médecins Sans Frontières à Martissant ou comme membre du corps médical de l’Église de Dieu de Delmas 17.

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Nadia Leblanc Jeanty, infirmière et longtemps compagne de travail de la défunte à Grace Children’s Hospital pendant près de douze ans, peine à contenir l’ampleur de sa tristesse.

«Au fil de mes années en tant qu’infirmière, je n’ai jamais rencontré un médecin aussi infatigable», confie-t-elle, en soulignant le dévouement «exemplaire» de Nathalie Laurent. «Elle prodiguait des soins empreints d’une tendresse inégalée, traitant chaque patient avec une sollicitude digne des membres de sa propre famille».

Stéphane Michel, médecin présent sur les lieux au moment de l’admission de Laurent à l’hôpital de l’OFATMA, réagit sous le choc de cette nouvelle.

«C’est une situation qui décrit l’ampleur d’un contexte en Haïti où personne n’est épargné », dit Dr Michel qui regrette que les professionnels de la santé n’aient aucune structure « ou ressources disponibles qui pourraient venir à notre rescousse en cas de besoin pour fournir des soins sanitaires en temps opportun ».

Née aux Gonaïves en 1977, Laurent a consacré près de seize années de sa vie professionnelle à servir Haïti.

Décrite comme une personne qui ne baissait jamais les bras malgré la situation du pays, Dr Nathalie Laurent a passé l’arme à gauche à un moment où le pays manque cruellement de personnels de santé.

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Bien avant l’accélération de l’insécurité en 2021, des études ont rapporté que 40 % des médecins formés en Haïti avaient fui le pays. 13 % d’entre eux trouvent refuge aux États-Unis.

Dans un rapport de 2017, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) affirmait que le pays compte en moyenne 5,9 médecins ou infirmières, et 6,5 professionnels de santé pour chaque 10 000 habitants. Ces chiffres sont très loin des recommandations minimales de l’organisation internationale.

«C’est une perte pour la communauté médicale, pour Haïti, pour la famille, et ce n’est que du regret, dans un pays où rien ne fonctionne», déclare avec frustration son conjoint, Jean Rosvald Laurent.

L’avocat ne compte même pas porter plainte, car, selon lui, ce serait un « acte inutile ».

L’État « a failli à sa mission », conclut-il à AyiboPost.

Par Lucnise Duquereste

Image de couverture : la médecin Nathalie Laurent. | © Son compte Facebook


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Journaliste à AyiboPost depuis mars 2023, Duquereste est étudiante finissante en communication sociale à la Faculté des Sciences Humaines (FASCH).

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