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Un Fresco pour Quatre

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Haïti, c’est l’étonnante histoire de ces femmes qui élèvent leurs fils et filles rien qu’avec leurs barques de sucreries. C’est l’histoire d’un peuple qui en dépit de la ciguë qu’on lui a administré ne veut pas mourir.

Haïti c’est l’histoire de cette femme qui vend son lit pour habiller sa fille unique, c’est le récit d’une vieille femme qui déteste la mort parce qu’en dépit des mauvais traitements que lui a fait subir la vie, elle voudrait voir son petit-fils terminer ses années d’études de droit…

Haïti c’est l’histoire de tous ces pères qui oublient ce qu’est le sens du mot loisir, qui ne sourient que par convention parce que la vie par ici est un éternel calcul, une arithmétique sans solution.

Haïti c’est la satisfaction d’une mère parce que son fils a enfin terminé sa scolarité. C’est la prière de cette fille qui ne veut pas redoubler sa classe de baccalauréat…

Haïti c’est l’histoire d’un fresco qui se partage entre quatre élèves, c’est un plat de riz qui se mange entre plus de cinq étudiants… Haïti c’est le paysan qui au lever du soleil propose à son voisin une tasse de café avant la konbit.

Haïti c’est malheureusement aussi l’histoire d’un peuple qui a oublié son passé, l’histoire d’un peuple divisé, le récit d’un peuple opprimé et frustré qui aujourd’hui encore reflète les séquelles d’une dictature sanglante.

Haïti c’est l’Etat contre ces fils, qui ne peut ou plutôt qui refuse d’assurer a ces derniers les soins minimum de santé. C’est le triste récit de cette femme qui perd ses jumeaux parce qu’elle n’a pas assez d’argent pour l’accouchement

Haïti c’est le discours d’un pasteur qui exhorte ses fidèles à ne pas se mêler des affaires de l’Etat parce que tout compte fait le royaume des Cieux est à eux. C’est l’histoire d’un peuple qui prie plutôt que d’agir, qui croie que son secours ne peut venir que d’en haut.

 C’est la sottise d’un peuple qui à chaque soulèvement brûle ce qui lui appartient. C’est l’histoire de ce sexagénaire qui voit partir sous les feux ses trente années de sacrifice, c’est cette femme qui jure de ne plus revenir par ici parce que son père s’est fait tué par la foule en ramassant le sac d’une petite fille.

 C’est l’insouciance d’une jeunesse américanisée, d’une nouvelle génération qui ne peut s’auto assumer et qui tristement copie l’inacceptable. C’est le triste constat d’un peuple qui méprise ses origines et qui se fait humilier partout où il va.

 Haïti, c’est une propension pour l’alcool et la drogue, c’est ce groupe d’adolescents qui préfère les fêtes nocturnes à l’éducation. C’est la débauche, c’est ce monsieur d’une bonne cinquantaine d’années qui avec ses billets de mille gourdes s’approprie le bas ventre d’une fillette de quatorze ans.

 Quiconque aura vécu ici vous confirmera que la patience ne s’apprend pas ici, mais quelle vous rattrape. C’est le triste récit de vie de ce garçon qui après maintes études ne devient qu’en fin de compte qu’un chauffeur grincheux et frustré.

 Les années se succèdent et on se demande si un jour on pourra se dire que cet île est vivable. Mais par-dessus-tout nous oublions qu’un seul homme ne construit pas un pays.

Haïti, c’est en réalité notre histoire commune, et la question demeure celle-ci: Comment procédera-t-on pour bien la biographier ?

 Pradley Vardly VIXAMA

La rédaction de Ayibopost

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