POLITIQUE

Martelly est-il vraiment parti ?

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L’intronisation de Michel Martelly à la présidence est l’une des pires profanations de la haute fonction publique que retiendra l’histoire d’Haïti. Usant des manœuvres impudentes qui ont caractérisé sa carrière musicale, l’ex-président n’a même pas su assurer sa succession. Son départ aux commandes du pouvoir présidentiel soulage les cœurs épuisés par le règne de l’indécence politique. Mais, Michel Martelly est-il vraiment parti ?

La dérive sociopolitique haïtienne a encore enfanté un gourou : Michel Martelly. Pendant au moins 25 ans, notre système a toléré les actes insolents de ce citoyen drapé dans son fameux pseudo Sweet Micky. Nous avons peaufiné le parcours de cet homme par notre indifférence. Et, il en a profité. Pleinement. Jusqu’à s’imaginer… Président ! (Se sòt ki bay, enbesil ki pa pran).

Michel Martelly est aussi la victime d’une société qui refuse de définir une marge de manœuvre à ses progénitures ; il est la personnalisation d’un système banalisant les hautes sphères qui socialisent l’humain. En effet, l’effritement des valeurs institutionnelles a amorcé une gangrène sociétale inquiétante : l’assaut d’ignorants dans l’élite politique.

L’école comme fabrique de notre mal social

L’école et sa pédagogie archaïque se révèlent comme une génératrice abondante de frustrés. Beaucoup d’appelés, peu d’élus. L’on retrouve d’abord, ceux qui abandonneront prématurément ce carcan  de gré ou de force. D’autres s’échapperont nus à travers le feu, ne récupérant qu’un inutile diplôme qu’ils traineront toute leur vie. Enfin, le faible reste servira de charpente vertébrale enrichissant de plus en plus un système économique conservé par les nantis.

La désacralisation de cette institution se remarque premièrement par sa prolifération dans n’importe quel interstice. Des pancartes accusant de grossières faute d’orthographe pêle-mêle, accrochées aux gourbis de la ville démontrant le laxisme de l’État. L’on n’a jamais vu autant de mépris envers l’éducation … l’unique moyen de propulser l’homme à la lumière de la civilisation.

D’un autre côté, nous formons nos chimères sociales en plein jour. À chaque décibel qui tonitrue des aventures sexuelles dans les « After School Party ». À chaque goutte d’alcool ingurgitée par nos écoliers en signe de protestation contre cette pédagogie humiliante. A chaque tour de reins de ce préfet enfourchant son écolière pour laquelle il paie simultanément les frais scolaires.

Que dire de l’église ?

Elles se bondent de parents lassés par l’oisiveté que leur impose le chômage, bernés par le discours illusoire de certains évêques qui remettent tout au surnaturel. Des renards qui courtisent les corbeaux ! Dorénavant, il faut savoir dans quelles églises vous rentrez, car certaines ont des sorties onéreuses.

L’église prône trop d’incivisme en refusant de joindre le réalisme à l’idéalisme. Cette institution se dévalorise en déchargeant l’État de ses responsabilités. Elle remet sa nature en question en apprenant ses fidèles à diaboliser leur culture. Ses leaders devraient mieux s’inspirer des Martin Luther et Martin Luther King Jr.

Des familles sont plongées dans le désarroi en constatant que la morale ne s’occupe pas de tout. Elle ne retiendra pas l’adolescente qui ne peut pas compter sur ses parents dépassés par les événements, incapables de lui procurer le pain quotidien. Dès la puberté, elle maquillera sa prostitution en vantant ses atouts de Limenna. Ce père qui passe son temps à saluer le passage de Martelly à la présidence inculque implicitement à son fils que tout chemin mène à Rome.

Notre mal est institutionnel. Michel Martelly n’est que le premier fruit tombé de l’arbre. D’autres s’ensuivront autant que nous garderons cette indifférence. En vérité je vous le dis, Michel Martelly n’est pas parti !

Hadson Albert

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