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Freiner la spirale de l’insécurité nationale : une proposition citoyenne

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Les nouvelles au quotidien en Haïti dans le courant du mois de mars 2016 font état d’une population aux abois face à une insécurité sociale grandissante liée au banditisme de tout acabit. Les clients des banques commerciales à Port-au-Prince sont particulièrement visés aussitôt une transaction financière effectuée ; les plus chanceux, s’il faut le dire ainsi, sont rançonnés et les malchanceux froidement assassinés.  Comble de l’effroi, les citoyens qui craignent particulièrement pour leurs vies sont ceux-là même chargés de garantir la sécurité de leurs concitoyens, en l’occurrence nos policiers nationaux, assassinés souvent durant leurs heures de service.éc

Il n’est nullement nécessaire d’être un politicien madré pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’un banal banditisme à grande échelle mais plutôt de l’établissement progressif d’une psychose sociale généralisée ou peut-être d’une déstabilisation étatique dans une transition politique bancale. Le président provisoire Jocelerme Privert dans son discours-bilan de son premier mois au pouvoir penche pour cette dernière thèse.

En témoigne une longue liste de crimes de simples citoyens et de policiers, semblables à de véritables exécutions. Les victimes se comptent par dizaines depuis le début de l’année. Certaines subissent la mitraille des assassins à motos, d’autres font face à des kidnappeurs qui dans leurs ignominies et leurs cruautés ne se contentent plus de leurs rançons et tuent sauvagement par simple gratuité. Que les âmes des victimes de tous ces crimes effroyables reposent en paix ! Toutes mes sympathies aux parents et à leurs proches !

Les enquêtes policières n’ont jamais abouti et continuent à se poursuivre dans la malencontreuse tradition haïtienne.  Les potentiels témoins se taisent, probablement par peur de représailles. La loi du silence, l’omerta du « je wè, bouch pe » enveloppe la nation.  Quelques arrestations s’opèrent ici et là mais le mal de l’insécurité semble se muer en une épidémie incontrôlable.  C’est bien le mal qui répand la terreur… Que faire ? Quoi faire ?

La responsabilité primordiale de la sécurité d’une nation repose évidemment entre les mains de ses autorités étatiques, nommément du président, du gouvernement, du parlement, de la justice et de la police.  Ces autorités se doivent de prouver qu’il existe au sein de l’état une véritable volonté politique pour contrer l’insécurité. Mais est-ce assez ? Que doivent faire les citoyens ?

Il est d’un devoir civique pour tous citoyens « konsekan »,  patriotes,  ceux et celles qui ne dorment pas dans l’apathie politique, d’avancer des propositions réalistes face à l’insécurité rampante. Au côté des rapports soumis par les experts en sécurité, ces opinions seront l’expression d’une citoyenneté engagée. C’est donc dans cette optique, avec humilité et dans le souci de l’intérêt général que je présente cette proposition en cinq points principaux  à qui veut s’en soucier :

1 – Le désarmement de la population doit se poursuivre, aussi bien parmi les gangs des anciens quartiers miséreux de non-droit que des résidents des cossus villas de luxe. Le désarmement des anciens militaires doit s’opérer dans le cadre de la loi et de la dignité que mérite ceux qui ont vraiment portés l’uniforme ; quant aux usurpateurs qu’ils soient traités avec toute la rigueur de la loi ! Si la Minustah veut se rendre vraiment utile avant son départ définitif du sol national, elle devrait s’engager auprès de la PNH pour un désarmement complet et effectif, qui dans le passé n’a pas eu lieu. La sécurité nationale ne peut se concevoir avec la libre circulation d’armes illégales sur le territoire.

2 – Un contrôle strict et sévère de toutes motocyclettes devrait s’opérer sur le territoire national. Les patrouilles policières mobiles et fixes devraient prêter une attention particulière au fléau sécuritaire que représentent ces véhicules au pays.

3 – Les prisonniers devraient être photographiés dès le début de leurs incarcérations. Leurs photos devraient être publiées dans tous médias visuels lors des évasions et exposées dans tous les centres de grande visibilité sur tout le territoire national.

4 – L’urgente nécessité existe au sein de la PNH pour la mise en place d’une division de renseignements ou d’espionnage faisant constamment recours à des indicateurs pour dépister les criminels et les poursuivre sans relâche.  Un service d’intelligence est vital à toute nation pour s’assurer de sa sécurité territoriale.

5 – Des spots radiophoniques et télévisés ingénieux offrant une récompense monétaire adéquate pour toute information amenant à la capture des criminels qui courent les rues devraient être vulgarisés en boucle et rivaliser avec les spots publicitaires de la bière Prestige ou du rhum Barbancourt.  Face au taux élevé du chômage de la population, une récompense monétaire peut être une arme redoutable contre les criminels. Grace aux téléphones intelligents, les renseignements pourraient prendre la forme de photos, vidéos, texto ou courriels.

La lutte contre l’insécurité ne sera jamais gagnée car elle est complexe et perpétuelle. Cette insécurité s’appuie également sur la mentalité fataliste, défaitiste, du « bondyebon » de nos concitoyens, du « lesegrennen » et du « je-m’en-foutisme » politique de nos dirigeants ainsi que d’une multitude de facteurs liés à notre sous-développement chronique.

Cependant dans notre cheminement démocratique, il y a et aura toujours de l’espoir de devenir maitres et souverains de notre destin, de formuler notre vivre-ensemble à notre manière et dans ce but d’affronter courageusement l’insécurité et d’y apporter les solutions adéquates pour la contenir, vivre en paix et construire une nation digne de notre passé glorieux.

Patrick André

Je suis Patrick André, l’exemple vivant d’un paradoxe en pleine mutation. Je vis en dehors d’Haïti mais chaque nuit Haïti vit passionnément dans mes rêves. Je concilie souvent science et spiritualité, allie traditions et avant-gardisme, fusionne le terroir à sa diaspora, visionne un avenir prometteur sur les chiffons de notre histoire. Des études accomplies en biologie, psychologie et sciences de l’infirmerie, je flirte intellectuellement avec la politique, la sociologie et la philosophie mais réprouve les préjugés de l’élitisme intellectuel. Comme la chenille qui devient papillon, je m’applique à me métamorphoser en bloggeur, journaliste freelance et écrivain à temps partiel pour voleter sur tous les sujets qui me chatouillent.

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